Bienvenue [Tiphanie]

* Ne panique pas. Surtout, ne panique pas. Récapitulons. Tiphanie arrive dans un quart d’heure, et rien n’est prêt. Ça pourrait être pire… non ?
Voyons, ce ne doit pas être si terrible. Alors… tu es en caleçon, ce n’est pas rangé, tu n’as rien préparé à manger… Tu aurais pu ne pas être douché, vois le bon coté des choses. *

J’allais me tirer une balle. Qu’est-ce qui m’avait pris de vouloir dormir cette après-midi ? J’allais à cent à l’heure, un instant dans une pièce, celui d’après dans un autre.
Enfin, c’était vite dit, prenant en compte le fait que je ne faisais qu’aller de la chambre au salon, passant par la cuisine qui était dans la même pièce que mon salon. Arranger le salon, faire la dernière vaisselle, ranger mes vêtements et faire le lit au cas où elle veuille visiter.
J’ouvrais en grand les fenêtres, et décidais de préparer quelque chose de rapide : des pates. Oui, c’était cliché pour un italien, mais j’étais plutôt limité niveau choix.

Ouf, j’avais réussi. Le repas était en train de cuire, le salon et la chambre étaient impeccables, et j’en avais même profité pour ranger la salle de bain. Ce n’est que quand l’interphone sonna que je me rendais compte que j’avais oublié le plus important. Ouvrir à Tiphanie en sous-vêtements serait très mal vu…

Je lui ouvrais la porte d’en bas, lui rappelant l’étage et la porte, et fonçais dans ma chambre d’habiller. Je sortais des tiroirs la première chose qui me venait, à savoir un jean noir et une chemise bordeaux. Oui, je devais avouer avoir pris goût à ce vêtement depuis la soirée d’anniversaire.

Je venais de refermer les fenêtres quand la sonnette retentit. Retroussant mes manches de chemise que je ne boutonnais jamais jusqu’en haut, je déverrouillais la porte, et l’ouvrais, souriant en voyant Tiphanie.

Bonjour Tiphanie. Entre, je t’en prie. Tu peux te déchausser et laisser ton manteau ici, dis-je en lui indiquant le porte-manteau.
Le repas est en train de cuire… Je te fais visiter ?

Pas qu’il y avait grand-chose à faire visiter, mais bon… Je m’exécutais, puis, finissant par le salon, j’ajoutais :

Ce n’est pas bien grand, mais je n’ai pas besoin de plus, et on y vit bien.
Installes-toi, je verifie juste que les pates ne collent pas…

Pas besoin de dire que je revenais, je n’allais pas quitter son champ de vision, ou pas entièrement, étant donné que nous ne serions séparés que par le bar.
M’étant assuré que la cuisson se passait bien, je me retournais vers elle.

Tu veux boire quelque chose ?

Puis je venais m’installer. Nerveux ? Oui, un peu… Mais je n’allais pas en mourir.

Alors ? Comment vas-tu ?

À l’autre bout du fil, Alessandro Padolli, roux aux cheveux longs, à l’âge incertain, tout de noir vêtu, avec un bandeau sur l'oeil, était affalé dans son canapé. Depuis le départ de son protégé pour Paris, le mentor était retourné vivre dans son appartement, trop petit pour à l’époque héberger son apprenti.
Alessandro essayait de s’imaginer à quoi ressemblait la demoiselle qui avait fait céder les positions d’Ulrich. Blonde à forte poitrine ? Non, pas son genre… D’un autre coté, aucune fille n’était vraiment son genre. Passer à coté d’une personne de gente féminine pour Ulrich n’était pas plus différent que passer à coté d’un chat de gouttière : on le remarque uniquement s’il se fait remarquer.
Entendre le rire de cette Tiphanie faisait sourire le chasseur, et la pensée d’Ulrich charmé par ce rire parvint à l’esprit d’Alessandro. C’était de trop, il écarta le téléphone pour rire à son tour.

Et bien M.Padolli, je dirais qu'il n'est pas vraiment insupportable, Ulrich est juste obstiné... très obstiné.

Je le sais, pauvre enfant. Quand il a une idée en tête, l’arrêter est impossible, et cela n’a pas changé en dix ans. Je crois qu’il faut le tuer pour ça, parce que même mortellement blessé il reste une tête de mule.

L’italien rit, et posa son regard sur une photo où ils étaient réunis avec Ulrich. Son rire devint un sourire, qui disparut pour laisser place à un soupire.

C’est quelqu’un de bien, Tiphanie. Je te le dis en connaissance de cause, parce que j’ai passé plus de dix ans avec lui. Il peut ne pas avoir l’air bien distingué, c’est mon meilleur élève à ce jour, et il le restera surement. Et je ne te parle pas seulement au niveau chasse aux hybrides. Ulrich est ma fierté.
Et tu ne veux pas savoir combien de jeunes j’ai pris sous mon aile, tous plus compétents et distingués les uns que les autres.
Il suffit juste de le connaitre.

Emporté dans son monologue, Alessandro avait oublié que Tiphanie n’était pas la seule à entendre.


Je faillis faire tomber le téléphone. Surprise était un bien petit mot pour designer l’expression de mon visage. Alessandro ne m’avait jamais parlé d’autres apprentis, et encore moins dit qu’il était fier de moi. Seule la première partie de son discours m’était connue, et m’avait même tiré un sourire.

Tu dois être quelqu’un de bien, toi aussi, pour qu’il t’ait choisi, toi et pas une autre. Prends soin de lui, et il prendra soin de toi. Et je te dis pas ça parce que c’est mon élève, mais parce que je le connais.

Et n’oublies pas de l’appeler Rico de temps en temps, qu’il pense un peu à son vieux mentor.

J’étais figé, une statue. J’entendais à peine le rire d’Alessandro, je n’étais même pas sûr d’être vraiment réveillé. Je m’attendais à ce qu’il m’enfonce, mais ça…

Tiphanie ? Tu es toujours là ?

Elle referma la porte, puis se retourna. Voir les larmes dans ses yeux m’était insupportable. Quel monstre étais-je pour la faire pleurer ? J’avais du mal à garder mon impassibilité devant ce triste visage.

Pourquoi la seule chose que je sache faire soit de faire souffrir les autres ?

C’en était trop. Je franchissais la distance qui nous séparait pour la prendre dans mes bras. Je me moquais de ce qu’elle pourrait en penser, de ce qui pourrait arriver. Elle avait besoin d’une épaule, et j’avais besoin qu’elle ne pleure plus. Parce que quoi qu’il arrivait, quelle que soit la raison de sa venue, je voulais être là pour elle.

Je peux l’endurer, pour toi, cette souffrance. Je peux tout endurer pour toi.

Ma voix était faible, et mes mots n’étaient pas analysés avant que je les dise. Je devais être sincère, elle devait comprendre. Comprendre que c’était bien plus douloureux de la voir souffrir que de souffrir moi-même, comprendre combien elle représentait pour moi.

* Ce n’est même pas toi. C’est moi qui te fais souffrir avec mon amour. Pardonne-moi. *

Mes pensées n’étaient pas vraiment adressées à elle, ou plutôt n’étaient pas faites pour qu’elle les entende. J’avais oublié ses pouvoirs, et j’avais oublié les miens. J’avais oublié que nous étions des chasseurs, j’avais absolument tout oublié. Il n’y avait plus qu’elle. Elle seule comptait, et je ne savais plus comment le lui dire, comment le lui faire comprendre.

Au contacte chaud et rassurant d'Ulrich je ne fis rien. En temps normal, je l'aurais envoyer balader, ou je lui aurait physiquement fait mal pour lui faire comprendre que je ne voulais pas de cette proximité. Pourtant là je ne faisait rien, je n'en avait pas envie plus que réellement pas la force.
Dans ses bras j'avais une curieuse sensation de châleur un peu comme quand j'étais avec Nathaël, mais s'était fondamentalement différent. Ce n'était pas le même genre de lien, enfin si l'on pouvait parler d'un lien en ce qui concernait Ulrich...

A l'entendre j'en était même arrivé a me blottir contre lui. Finalement peu être que tout ses beau discourt que je n'avais pas écouter avait fini par entré dans ma petit tête d'âne bâté.
Je ne ressentait pas le vide habituel, ce n'était pas très fort, ni même envahissant, s'était un peu comme la flamme d'une bougie sur le point de s'éteindre et pourtant s'était là.

Plus que jamais hésitante je laissais doucement glisser ma main jusque dans la sienne. S'était un peu bête d'avoir fait tout cela pour rien. Très bête...

* Ce n’est même pas toi. C’est moi qui te fais souffrir avec mon amour. Pardonne-moi. *

Ses pensé était-elle pour moi, ou pour lui ?
Finalement peu importait le principale était que je les avais entendues. Pourquoi voulait-il se faire pardonner ? Après tout s'était moi qui avait fait la plupart des gestes qui pouvait être et qui avaient été blessant, insultant...
Toujours aussi hésitante j'allais poser mes lèvres sur les siennes.

Je ne savais pas exactement ce que je faisait, mais finalement ça ne pourrait pas être pire que ça ne l'était déjà.