En souvenir de la reine des eaux... [ Maximilien ]

En cette après-midi banalement commune à celles qui s'étaient déjà écoulées, Isis trônait en territoire opposé. Cela faisait maintenant vingt minutes qu'elle était agenouillée au bord de la Bièvre, le fleuve s'écoulant au travers du pays des êtres de l'eau. Devant elle, elle avait fait se surélever la terre, et il y avait à présent une pierre tombale faite des antres de Gaïa. Dessus, elle y avait posé une photo, où semblait s'effacer le portrait d'une défunte. Isis n'avait jamais porté ses semblables Anciens dans son coeur, et même si elle était loin de la considérer comme une soeur, Octopus restait celle qu'elle avait le plus respecté.
Peut-être était-ce parce que c'était la seule qu'elle avait eut le temps de connaître. Malgré tout, un profond regret, une saveur amère, remuait le fond de ses entrailles. Elle avait beau se donner toute la consistance du monde pour paraître être un coeur de pierre, une partie du sien s'était envolée lorsque l'on avait annoncé la disparition mortelle de la reine des eaux.

- Te voilà chez toi, ma chère.

Quelques fleurs ornaient joliment le petit mur de terre. A défaut de ne pas pouvoir aller tout de suite faire payer cette infamie à celui qui avait osé envoyer Octopus dans l'antre d'Hadès, elle pouvait tout de même, elle se devait, de lui rendre un dernier hômage. Regardant le coquillage qu'elle tenait entre ses mains, elle s'adressa à son âme qui perdurerait à tout jamais à travers les cieux.

- C'est un homme prometteur que tu nous as laissé. Maximilien s'en sortira. Je pense que tu pourras être fière de lui, où que tu sois. Il est prêt, Octopus...

* ... Mais ce n'était pas une raison pour partir.*

Elle ne savait depuis combien de temps on l'observait, mais le bruit de quelques pas enclencha le mouvement de son corps, qui se redressa par la suite, pour finir par se tenir debout, à côté de ce qu'elle avait bâti. Elle tenta en vain d'esquisser un sourire en distinguant la silhouette de Maximilien.

- J'ai pensé qu'elle serait mieux ici.

Tout en regardant le gros coquillage qu'elle tenait dans ses mains, elle reprit :

- Dans mon pays, on avait pour coutumes de laisser des objets aux défunts avant de les laisser s'envoler. C'est elle qui me l'avait donné, c'est tout ce que j'ai...

Elle déposa le coquillage au pied de la petite montagne, et reporta son regard sur le nouvel élu des eaux.

- Il paraît que cela aide les âmes à se sentir moins égarées, à se sentir chez soi...

Elle avança ensuite vers lui, s'apprêtant déjà à partir. Néanmoins, elle s'arrêta une dernière fois, à sa hauteur, et posa sa main sur son épaule.

- Je ne peux me vanter d'avoir porté autant d'amour que celui que tu lui portes dans ton coeur... Mais grâce à toi elle restera à jamais éternelle, Maximilien.

Laissant retomber mollement sa main le long de son corps, elle fit un pas en avant, opposé à la direction vers laquelle était tourné Maximilien.

Minutes, heures, jours, semaines, tout cela se confondait, si bien que Maximilien n'aurait sut dire si le décès d'Octopus remontait à veille ou à la semaine antérieur. Peut être même s'était il écoulé un mois… Qu'importe. Les jours n'avaient guère été différents depuis le drame. Ils s'étaient succédés, mollement, suivant une routine ancestrale, sans se soucier des vies qu'ils dévoraient, et Maximilien au même titre que tous les mortels n'avait pas pu arrêter l'engrenage, mais uniquement s'y soumettre, le suivre. Hier ne sera jamais plus, demain n'est pas encore, alors vis aujourd'hui. Et c'est ce qu'il avait fait : Continuer à vivre. A ce lever chaque matin, à travailler chaque jour, à manger chaque midi et soir, comme si tout était toujours pareil, comme si rien n'avait changé.
Mais sous la croûte fine de la routine, se cachait une plaie béante, qu'il trainait comme un boulet. Condamné à vivre avec. A attendre que le temps fasse son office. Mais le processus était long, et le chagrin vorace continuait à dévorer l'âme du successeur, agrandissant chaque jour la blessure, comme une gangrène purulente qui prolifère.

Alors pour oublier, Maximilien travaillait. Encore et toujours. Plus que jamais. A s'en faire naitre des cernes, à s'en user les mains, à s'en limer l'esprit. Les nuits lui faisaient peur. Elles étaient devenues un univers hostile où les rêves lui renvoyaient le cauchemar de la réalité en pleine tête. Il revoyait son visage, sa douleur, sa mort, encore et toujours, pour mieux se réveiller en sueur, tremblant de peur et de chagrin.
Son lit étant devenu un lieu d'angoisse, alors il s'endormait sur le canapé. Se réveillant courbaturé d'un repos à moitié réparateur certes, mais pas hanté. Il préférait la douleur physique que la douleur mentale. C'était plus facile à supporter.

Son intérêt pour les chasseurs avait viré à l'obsession. Bible et ouvrages de théologies étaient devenus ses livres de chevet. Il les sillonnait sans savoir ce qu'il y cherchait vraiment… Un moyen de comprendre, de pardonner, ou de détester d'avantage ceux qu'on appelait "Chasseur". Ou peut être espérait-il simplement trouver entre ces lignes une raison de se pardonner à lui-même…

Ainsi donc avait évolué Maximilien Chevalerie, le "successeur", depuis la dernière fois qu'Isis avait pu le croiser.

Aujourd'hui, il errait dans le parc comme on parcourt la maison de son enfance avant de déménager. Il connaissait l'endroit par cœur. Mais il allait devoir y renoncer… Tout avait changé si rapidement… Il peinait à croire à la réalité des événements… Il caressa du regard les alentours, y cherchant à y croiser un souvenir heureux, mais hélas il n'y avait de place ici que pour le regret.


Lorsqu'il la vit au loin, il sentit immédiatement grandir en lui une colère sombre. Isis, sur ces terres lui semblait le pire des affronts. Il n'avait rien oublié de leur première conversation. "Le poulpe qui vous sert de guide", voilà la façon dont elle avait osé qualifier Octopus. Et voilà qu'elle venait se pavaner sur ses terres ?!

Il dévora l'espace qui les séparait d'enjambées souples et menaçantes, et lorsqu'elle pivota vers lui, il affichait la froideur d'une banquise… Raide comme une statue, il garda le silence alors qu'elle lui expliqua sa venue… Il avait eut l'intention de la chasser d'ici bien rapidement, et sans y mettre de gants, pourtant, il ne pu s'y résoudre…


Le regard sombre de Maximilien glissa sur la "tombe", et il dut réprimer à haut de cœur, alors que la photo qui l'ornait l'observait avec calme.
Il ne pu supporter une seconde de plus d'avoir à affronter le regard même figé d'Octopus… Comment pouvait-il oser la regarder, la penser … Lui qui l'avait laissé souffrir et mourir si loin des siens ? Hô lâcheté quand tu nous tiens…

Car oui il avait été lâche. Il s'était contenté d'agir comme un simple valet. Elle avait pourtant été sa cousine. Mais il s'était toujours refusé à la voir comme autre que son ancienne. Et il ne mesurait qu'à présent que l'ampleur de la solitude à laquelle il l'avait condamné… Avec Arven et Staroxia, il avait été le seul à qui elle aurait pu se lier sans craindre de voir la vieillesse les séparer. Mais il n'avait jamais franchit la limite… Et maintenant il était trop tard.


Il eut un rictus amer. Lui continuer à la rendre éternelle ? Il ne connaissait même pas les fleures qu'elle préférait…

-Attendez !

Ordonna-t-il d'une voix dont il essayer de contrôler les accents tremblants. Et comme si il avait craint que l'ordre de la retienne pas, il lui avait accroché le poignet pour la forcer à croiser son regard.

-A quoi jouez vous ? Vous n'avez exprimé aucune sorte d'amitié envers Octopus, à notre première rencontre… Et voilà que vous lui confectionnez une tombe, comme si elle vous été chère ! Vous entachez son honneur quand vous la pensez encore vivante, mais quand il s'avère qu'elle n'est plus, vous revêtez le deuil comme si elle avait été une sœur !

Sombre comme les profondeurs des mers le regard du successeur vrillait celui de la jeune femme en quête de réponse.

Il était là, à la fixer comme s'il avait voulu sa propre mort. Blessé dans son orgueil qu'une femme telle qu'elle était eut pu se permettre de rôder en ses terres. Elle n'était pas venue pour lui, et pourtant ils se faisaient maintenant face. Et lorsqu'il lui demanda de ne pas partir tout de suite, elle s'arrêta. Elle jeta un coup d'oeil sur sa main qui lui avait agrippé le poignet, comme craignant qu'elle ignore son interpellation.

- A quoi jouez-vous ? Vous n'avez exprimé aucune sorte d'amitié envers Octopus, à notre première rencontre... Et voilà que vous lui confectionnez une tombe, comme si elle vous était chère ! Vous entâchez son honneur quand vous la pensez encore vivante, mais quand il s'avère qu'elle n'est plus, vous revêtez le dueil comme si elle avait été une soeur !

Elle laissa son regard bleu affronter ses yeux sombres, mais sans une once de violence. Les siens reflettaient plutôt la sincérité des mots et des intentions qu'elle avait eu en se rendant au bord de la Bièvre. Maximilien ne comprenait pas. Et il souhaitait visiblement comprendre. Comment, comment elle qui s'était fichue ouvertement de la forme hybride d'Octopus, pouvait se permettre d'afficher le dueil sans que cela ne paraisse être un affront de plus. C'est ça, il prenait son geste comme un outrage, comme une action volontaire pour lui faire encore plus mal, pour affecter d'autant plus les hybrides aquatiques. Mais comment pouvait-elle atteindre quiconque sans spectateurs ?

- Si tu ne m'avais pas vue ici, tu n'aurais jamais su que c'était moi. Tu aurais remercié, sans jamais savoir à qui cela devait s'adresser. avait-elle dit simplement.

Mais attention, cela ne signifiait aucunement qu'elle s'attendait à une quelconque politesse de sa part. Elle n'avait pas fait cela dans le but d'impressionner ou même de s'attirer de la sympathie. Elle avait agi pour elle-même, et, surtout pour " elle "...


- Crois-tu que je me contente de qualifier l'un de mes ennemis par un si petit patronyme ? C'était une façon que j'avais de l'appeler.

Son visage d'ordinaire aussi inexpressif qu'un sol de marbre sembla se détendre, tandis qu'un léger sourire, plus semblable à un rictus incompréhensible, se dessinait étrangement au coin de ses lèvres.

- Je conçois que tu trouves cela affligeant que j'ose venir chez " toi ", mais je t'en prie, ne blâme pas une femme qui vient déposer ses prières en simple humaine.

Voilà comment l'étrangère justifia sa venue :


Maximilien s'en trouva plus égaré que satisfait par cette réponse évasive. Elle ne répondait que partiellement à la véritable question, et si il lisait de la sincérité dans son regard de nuit, il continua à "dressait des barrières" pour ne pas se laisser abuser. Il sentit la frustration le tirailler, trop facilement à son goût. Fut un temps où il aurait usé de son charme, jouer de sa dextérité de paroles pour extirper les réponses qu'il cherchait sans que la jeune femme ne puise le mener par le bout du nez comme elle semblait le faire en ce moment même. Mais les temps avaient changeaientt. Maximilien n'avait pas envie de jouer, et ne trouvait plus la patience de se vouloir subtil.
Il avait simplement envie de la gifler. De quel droit se permettait-elle de lui dire ça ? Elle, une terrestre, bâtir une tombe pour Octopus… Et il faudrait qu'il la remercie ? Il aurait rit jaune si sa gorge n'avait pas été si sèche. Il ne lui devait rien !


Cela voulait-il dire qu'Octopus n'avait pas été une ennemie ? Avait-elle tenu le statut d'amie ? Une nouvelle fois, les réponses avaient un goût de trop peu, autant voir une pomme un jour de famine sans pouvoir croquer dedans !
Il se passa la langue sur le coin des lèvres. C'était un tic qu'il avait acquis depuis peu, mais dont il n'avait déjà plus conscience d'effectuer. Il la toisa du regard, jusqu'à ce qu'il comprenne ce qui le blessait tant. La jalousie. Oui, aussi stupide que cela puise paraître, il était jaloux. Jaloux qu'Isis ait en sa possession quelque chose qui lui venait d'Octopus elle-même, jaloux qu'elle ait entre ses mains quelque choses à déposer sur la tombe de sa plus que bien aimée cousine… Car ses mains à lui étaient vides.
Il ferma les yeux, et extirpa l'air de ses poumons au prix d'un profond soupir… Il n'était plus temps d'être possédé par des réactions immatures, à propos d'une jalousie stupide.
Il savait que la distance qui les avait séparé lui et Octopus, n'était que de son fait. Il ne pouvait s'en vouloir qu'à lui-même.
Il balaya résolument son sentiment d'envie, pour essayer de retrouver un minimum de courtoisie envers la jeune femme. Si elle avait été connaissance d'Octopus, il lui devait le respect.



-Ici n'est plus "chez moi". Répondit-il avec un ton laconique qu'il ne se connaissait pas. Mais aussi brutal qu'était cette révélation, il en avait comprit toute l'exactitude au moment même ou il l'avait prononcé. Il y avait ici trop d'Octopus. Des souvenirs, comme un champ de violettes sous le soleil brillant, dont il n'émanait que l'innocence et le bonheur. Ses sensations, il ne les retrouverait pas.
Aussi attaché fut il à l'endroit, il lui faudrait couper le lien, comme on se sépare d'un membre gangréné. Il fallait amputer pour sauver ce qui pouvait encore l'être. Il l'avait comprit dès l'instant où Arven lui avait annoncé "sa promotion", et il se rendait compte à quel point son âme était déchirée entre la résignation, la determination, le courage, l'obstination de pas se laisser abattre, et la douleur du deuil, le manque d'espoir, sans oublier la tentation de céder à l'accablement que lui causait la peine de sa nouvelle et présente solitude.
En lui, les deux partie s'affrontaient toujours, et il n'aurait pas eut l'audace de parier sur l'une d'elle…
D'un geste las, il ferma une nouvelle fois les paupières et caressa le haut de son arrête nasale. Après un nouveau soupir, il re-ouvrit les yeux et tendit la main à Isis.

-Pardonnez mon ton abrupte de toute à l'heure. Le manque de sommeil en est la seul cause, et je n'ai, en effet, aucun droit sur vos manières de deuil. Ainsi je vous présente mes plus sincères excuses, et vous propose de repartir de zéro. Maximilien Chevalerie, dit Maximus, pour les miens. Cousin et successeur d'Octopus, nouvellement ancien du clan aquatique, comme vous le savez déjà. A qui ai-je l'honneur ?

- Ici n'est plus " chez moi ".

Elle le regarda un moment, sans émettre la moindre expression faciale. S'exhiler volontairement... Non, il n'en avait pas le droit, c'était trop facile. La fuite n'avait jamais rien résolu en ce monde. C'était retarder quelque chose que l'on redoutait, partir pour mieux endurer. Mais au fond, cela ne changeait rien. Ou si, cela empirait.
Elle fixa un point aléatoire, et laissa voler quelques paroles :

- Le monde est ta maison. Mais aussi loin que tu t'égares, tu ne peux renier ta terre d'origine.

Ainsi Isis avait parlé. Sensés ou non, ses dires restaient de ceux que les sages confient à une oreille attentive en pleine tempête psychologique. Ou bien, simplement une réflexion philosophique énoncée à haute voix, sans cible réelle attendue.

- Pardonnez mon ton abrupte de tout à l'heure. Le manque de sommeil en est la seule cause, et je n'ai, en effet, aucun droit sur vos manières de deuil. Ainsi je vous présente mes plus sincères excuses, et vous propose de repartir à zéro. Maximilien Chevalerie, dit Maximus, pour les miens. Cousin et successeur d'Octopus, nouvellement ancien du clan aquatique, comme vous le savez déjà. A qui ai-je l'honneur ?

Cette fois-ci, une légère once de sourire se dessina finement sur ses lèvres de sable. Pas un de ceux que l'on veut par moquerie, ni par émerveillement. Plutôt par satisfaction d'avoir su que l'on se trouvait bien en face d'une personne respectable, digne de son statut.
Elle se saisit de sa main, pour effectuer cette poignée commune à chaque salutation.

- Meera, surtout connue comme Isis, ancienne du clan terrestre sur le continent africain. Quant à mon nom, je crains de l'avoir oublié avec le temps.

Il ignora pourquoi, mais le jeune successeur sentit un picotement d'effroi lui courir sur la nuque. Que craignait-il ? Qu'elle ait raison ? Que cette phrase lancée de façon désinvolte dissimule une sorte de prophétie ? Qu'il ne puisse délaisser son passé comme il l'avait espéré ?

Ses réflexions furent coupées alors qu'elle glissa sa main dans la sienne. D'une poignée ferme qu'il n'aurait prêté qu'à un homme d'affaire, mais avec autant de délicatesse qui ne pouvait que l'assurer qu'elle appartenait à une femme, elle accepta de se présenter.

Définitivement cette femme animait en lui, un trouble permanant… Un trouble qu'il ne put que difficilement dissimuler, car son regard qui avait été gorgé d'assurance une minute plutôt se retrouvait légèrement voilé. Et lorsque leur poignée de main prit fin, il eut un coup d'œil rapide vers celle d'Isis comme pour vérifier que cette mimine pleine de force était bien la sienne…


-J'ignorais qu'il existait d'autres anciens … Avoua-t-il troublé, fronçant sans s'en rendre compte les sourcils. Mais au fond de lui, il calculait déjà… Il avait pensé devoir s'en remettre à Arven car il était le seul à en savoir plus que lui, et qu'il puise le former à sa nouvelle tâche, mais s'il existait d'autres gens comme eux peut être n'aurait-il pas à se soumettre à l'enseignement de l'aigle rouge… Peut être trouverait-il quelqu'un de son "sang" qui puise poursuivre l'enseignement entamé par Octopus…

-Mais voilà qui m'éclaire sur de nombreux points … Il se raclât la gorge, perplexe et soulagé à la fois de comprendre ce qui lui avait échappé jusque là; Le fait qu'elle paraisse si jeune et connaisse Raphael de longue date, l'intervention qu'elle avait eut l'audace de faire le jour du rassemblement, l'entretient qu'elle avait réussit à obtenir avec Arven, il resta pourtant surpris de la nouvelle.

Il fit un pas en arrière.

-M'accorderiez vous un peu de votre temps afin que nous discutions au cours d'une petite promenade ? Demanda-t-il avec courtoisie, piqué par la curiosité d'en savoir plus, et désireux de se tenir loin de la tombe qu'il percevait toujours dans le coin de son champs de vision.

Aussi troublante fusse cette femme, il désirait connaître ses intentions, les raisons qu'elle avait de se trouver ici, pourquoi être si loin de son pays, Et aussi, même si il ne voulait pas se l'avouer, il désirait aussi en savoir plus sur la relation qu'elle entretenait avec défunte ancienne qu'il se devait de succéder.

Il n'aurait pas eut l'audace de lui demander son âge. Mais il était sûr de ne pas se tromper en songeant qu'elle avait au moins autant d'ancienneté que l'aigle rouge lui-même, et le fait qu'elle ne puise pas se souvenir de son prénom de faisait qu'acoitre cette hypothèse. Il n'était pas encore sûr de vraiment réaliser qu'il se trouvait en face d'une de ses ainées, mais il songea qu'étant à présent aussi ancien, il était de son devoir d'en savoir plus sur la condition de ses semblables.

- J'ignorais qu'il existait d'autres anciens... [...] Mais voilà qui m'éclaire sur de nombreux points...

Isis esquissa un léger sourire, plus ironique que tout autre forme d'expression. " D'autres anciens. ", elle avait son propre avis là-dessus.

- Peut-on réellement considérer Staroxia comme une Ancienne ? Je pense que c'est plus par procuration.

C'est vrai, un peu partout l'on connaissait le nom d'Isis. Mais, c'était surtout en Afrique à vrai dire. Les autres parlaient d'elle comme un mythe, une histoire pour jeunes hybrides afin de les rassurer, de leur dire que oui, un hybride pouvait être capable de lutter contre les forces qui se qualifiaient de divines. Du reste, le conte n'était que très rarement vérifié, et à force, c'en devenait plus une rumeur déformée que quelque chose de concret. Un " on dit " des temps modernes.
Comment Staroxia en était-elle arrivée à prendre la place qui lui revenait de droit ? Tout cela était un mystère. Elle-même ne comprenait pas trop ce qui avait bien pu se passer. Elle nota dans un coin de sa tête qu'un jour il faudrait qu'elle s'entretienne en tête-à-tête avec elle. Au moins pour lui donner son avis, même si celle-ci n'en avait certainement que faire.

- M'accorderiez-vous un peu de votre temps afin que nous discutions au cours d'une petite promenade ?

Meera hôcha la tête solennellement, et se mit en marche. Maximilien pouvait bien cache tout ce qu'il voulait, elle arrivait quand même à ressentir l'interrogation qui était né en lui quand elle lui avait appris ces quelques choses sur sa condition. Il avait le droit de vouloir savoir certaines choses. Et puis, rien ne l'engageait à lui répondre. Tout dépendrait, en somme, de ce qu'il était désireux d'apprendre.

La reine scorpion accepta l'offre du prince successeur. Ils commencèrent leur marche en silence. Maximilien osa un regard en biais en direction de Meera.
Il avait reprit contenance, et réfléchissait au sujet qu'il allait mettre sur la table. Il avait tellement d'interrogations… Mais il serait déplacé de lui poser toute les questions qui le taraudaient, il lui faudrait faire un tri.

Pesant tour à tour les questions qu'il pouvait choisir, il commença à parler.

-Merci de m'offrir un peu de votre temps.


Fugace, un léger sourire illumina les traits tirés de Maximilien. Ainsi donc, la rivalité existait aussi entre les anciennes.

Il se composa une mine surprise.

-Vous ne partagez pas son opinion de neutralité ?

Demanda-t-il avec précautions, sentant qu'il effleurait là un sujet épineux.
Ils avaient progressé lentement et seul. Mais bientôt ils arrivèrent dans une partie du parc plus peuplée. Il écoutait avait soin la réponse que l'ancienne égyptienne lui donnait si bien qu'il ne remarqua pas une présence qui aurait du lui être familière.

Arianne était une femme distinguée, un brin superficiel, qui aimait le bon vin et la musique classique. Elle ne brillait pas particulièrement d'une personnalité attrayante, mais ce qui avait "séduit" Maximilien la première fois, s'était ses manières bien pesées, le fait qu'elle pouvait lui donner son corps sans qu'il n'ait à lui délivrer des longs discours enflammés, et surtout qu'elle n'éprouvait pour lui qu'une attirance physique.
Ils n'étaient que deux âmes qui conjuguaient leurs solitudes le temps d'une nuit, sans apprendre plus que ça à se connaître.

Ses longs cheveux noirs tombaient en cascade ondulés sur des épaules fines et élégantes et ses yeux bleus éclairaient sont visage pâle.
Arborant une tenue classe digne d'une parisienne, sa démarche féline la porta jusqu'au deux anciens.

-Et bien je m'étonnais de ton absence de réponse, et de ton brutal mutisme Maximilien, mais je vois que je n'avais nul raison de m'inquiéter.

Minauda la jeune femme, un sourire artificiel planqué sur les lèvres en posa sur Meera un regard qui en disait long sur les soupçons qu'elle nourrissait.

Le PDG fut surpris de cette intervention brutale, qu'il n'avait pas vue arriver, et les paroles de sa "petite amie" éveillèrent une sincère incompréhension en lui. Isis quand à elle, pouvait surement sentir la jalousie qu'elle éveillait chez l'humaine.
Masquant sa surpris, et son déplaisir de se voir de la sorte importuné, le successeur se força à sourire :

-Arianne, quelle surprise ! S'exclama-t-il.

-Tu m'étonnes … Murmura la dite Arianne avec un sourire mesquin.

Isis profitait du calme que leur offrait Mère Nature. Des chants de feuilles bercées par la brise du vent. Une démarche gracile, et une expression... Simple. Neutre. Au fond d'elle, elle attendait que le nouveau roi des eaux la questionne. Elle était certaine que ça allait arriver.

- Merci de m'offrir un peu de votre temps.

Oscillant légèrement la tête, elle posa son regard bleuté sur son visage. Une esquisse de sourire vint teinter ses lèvres, marquant joliment une petite fossette au coin droit de sa bouche. Celle-ci n'apparaissait que lorsque ses traits changeaient. Pourtant, avec son âge, elle aurait dû marquer son visage comme un feutre indélébile. Mais non.

- Ce n'est rien d'extraordinaire. dit-elle simplement.

Elle fit allusion à ses pensées quant au statut de Staroxia, et Maximilien en revint finalement à ce sujet.

- Vous ne partagez pas son opinion de neutralité ?

Meera s'arrêta, et se pencha pour ramasser une feuille qui s'était détachée d'un arbre. Elle prit la main de Maximilien, et l'y déposa face visible au creu de sa paume.

- Tu vois ici la ligne centrale, toutes les autres sont rattachées à celle-ci. Quand tu la retournes, elle accompagna ses mots du geste, les lignes semblent effacées, certaines n'apparaissent même plus. Et quand elle se fâne, poursuivit-elle en enlevant les deux côtés de la feuille pour ne laisser que la tige dans les mains de Maximilien, il ne reste plus qu'une infime partie.

Evidemment, il y avait de quoi se sentir totalement perdu.

- Staroxia est une feuille fânée. Un Ancien est le recto d'une feuille.

Est-ce que cela répondrait à sa question ? Honnêtement, elle en doutait. Mais s'il avait un tant soit peu de réflexion, il comprendrait où elle voulait en venir. Staroxia ne méritait pas le renom qu'elle s'était attribuée.

Ce moment fut interrompu par la venue d'une jeune femme au teint blafard et à la chevelure ébène ondulée.

- Eh bien, je m'étonnais de ton absence de réponse, et de ton brutal mutisme Maximilien, mais je vois que je n'avais nulle raison de m'inquiéter.

- Arianne, quelle surprise !

- Tu m'étonnes...

Pause. Est-ce que ce qui venait de se passer était réellement arrivé ? Meera cligna plusieurs fois des yeux, incrédules, et ses lèvres furent soudainement étirées d'une expression hilare. Elle reprit automatiquement une mine plate, et laissa son esprit s'aventurer à l'écoute des pensées de la jeune femme.

* Franchement, si tu as osé trouver un terrain de jeu mieux que moi, je meurs. Je m'ennuie la nuit. Mais non, tu n'as pas le droit. Fais ce que tu veux de ton âme, mais ton corps, garde-le pour moi. Surtout qu'elle a quoi elle, hein ? *

Alors cette minette modèle pensait qu'Isis était la nouvelle conquète de Maximilien ? Soit. Elle se ferait un plaisir de jouer le jeu.
Passant ses bras autour de la taille de l'hybride aquatique, elle prit un ton fluet accompagné d'un léger accent, posant sa tête sur son épaule.

- Max, who's this girl ? Tu connais elle ?

Puis s'approchant de la jeune femme, arborant un sourire aussi faux que naturel :

- Nice to meet you, Arianne ! Le ami de mon darling is mon friend aussi.

Une envie d'exploser de rire comme jamais.


[ Désolée, j'ai pas pu m'en empêcher. xD ]

Staroxia est une feuille fanée. Un Ancien est le recto d'une feuille.

C'était sur la réflexion qu'avait éveillé cette phrase qu'Arianne avait choisit de faire son "entrée en scène", et alors que Maximilien tenait toujours la tige que l'ancienne avait posé au creux de sa main il dut orienter son attention sur l'humaine et remettre à plus tard les pensées qu'Isis avait éveillé chez lui.

Il comprit à son attitude qu'elle lui tenait rigueur d'un tord, et il cru bêtement que c'était le silence qu'il lui avait imposé… Il n'avait jamais annulé un seul de leur diner. Sauf depuis la mort d'Octopus. Il lui était devenu impossible de toucher une autre femme… Alors il avait tenu à distance Arianne, sans avoir le courage de la chasser définitivement de son existence.

Jamais, il n'avait songé à ce que l'humaine avait pu ressentir à cette "mise sur la touche". Et d'ailleurs, il s'en fichait. Il avait tellement d'autre préoccupation que celle de s'occuper d'elle.

Il avait l'esprit tellement loin de toutes ces vaines préoccupations… Si loin qu'il lui fallut sentir la tête d'Isis posée sur son épaule, et entendre la voix miaulant pour comprendre la plénitude de la situation dans laquelle il se retrouvait prisonnier.

Ce n'était pas son silence qui dérangeait Arianne, mais le fait qu'elle le retrouve en compagnie d'une femme –et Maximilien n'aurait pas démentit ce propos- plus belle qu'elle. Maintenant qu'il comprenait mieux la situation, il voyait l'humaine qui vrillait du regard l'ancienne terrestre, qui inondait d'une jalousie amère, et qui se portait hautaine et agressive comme si elle était prête à lui sauter à la gorge.
Il devait bien admettre qu'Isis avait comprit plus rapidement de lui, et elle s'amusait visiblement de la situation… Ce qui n'était pas le cas du prince successeur.

La plaisanterie d'Isis n'éveilla en lui qu'un intense sentiment de dégout. Il ne pouvait supporter qu'une femme le touche avec autant de douceur… Aussi feinte fut-elle, cette douceur n'était qu'un coup de pied dans la fourmilière qui réveilla son sentiment de solitude.

- Maximilien, je ne te croyais pas de cette veine là. Murmura Arianne d'une voix doucereuse qui ne cachait pas son mépris.

-Tu te trompes Arianne. Répondit l'ancien avec une froideur deux fois plus grande. Alors qu'il arracha Isis à son bras, non comme l'aurait fait un amant prit en flagrant délie de tromperie, mais avec sécheresse comme on se débarrasse d'un enfant collant.

L'espace d'un instant, il songea à la façon dont il aurait réagit des mois plutôt si il avait prit dans la même situation; il s'en serait amusé. Il aurait eut un petit rire indulgent devant l'attitude possessive d'Arianne, et il l'aurait charmé avec intelligence et habilité pour la garder… Comme ce temps lui semblait loin.

-Je te présente Meera, une connaissance professionnelle. Meera, Arianne, ma compagne.

L'attitude distante et glaciale du PDG sembla surprendre la demoiselle qui en oublia un moment sa jalousie pour s'abandonner dans la contemplation plus poussé de Maximilien.

Il n'avait jamais été mauvais, méchant, ou même désagréable. Au contraire, il était toujours patient, certes mystérieux, mais pas agressif …

Son observation lui indiqua qu'il n'avait rien d'un homme qui vivait une gourmande idylle aux bras d'une somptueuse étrangère. Il avait des cernes, et elle était persuadée que la ride qui lui barrait le front n'avait pas été si profonde la dernière fois qu'elle l'avait vue…
Le regard noir et indéchiffrable de l'homme la mettait mal à l'aise. Elle n'en quitta pas moins son attitude accusatrice…

-Nous partagions une discussion de la plus haute importance, que tu as interrompue. Continua Maximilien devant le silence que sa compagne avait choisit de garder. Une nouvelle fois, le ton cassant qu'il avait prit la mit mal à l'aise, et ses pommettes se colorèrent d'un mélange rouge de colère et d'outrage devant l'attitude surprenante que l'homme affichait.

-Bien. Dit-elle d'un ton guindé. Dans ce cas, puisque je dérange, je n'ai plus qu'à m'en aller.

Elle s'attendait à ce que Maximilien comprenne qu'il l'avait heurté, et qu'il se radoucisse, mais lorsqu'il ouvrit la bouche ce fut pour clore sans la moindre parole amicale :

-A bientôt alors.

Elle pinça les lèvres, mais ne bougea pas tout de suite. Maximilien quand à lui avait tourné son esprit vers Isis.

*Vous ! Ne recommençait JAMAIS ça ! Suis-je clair ? Votre plaisanterie de mauvais gout n'aurait provoqué que votre hilarité ! Et je ne vois pas en quoi semer la discorde entre Arianne et moi peut vous amuser ! *

Maximilien ne semblait visiblement pas du tout amusé du petit jeu d'Isis. Rapidement, devant la jalousie flagrante d'Arianne, il s'extirpa des bras de l'Ancienne, et avoua quelque chose de pas complètement faux. " Connaissance professionnelle. " C'était à peu près ça, oui. Du moins, dans leur monde. Un éclair fuyant traversa les yeux de l'égyptienne lorsqu'il lui révéla son prénom. Aussitôt dégagée, elle en profita pour activer un pouvoir qui n'était commun qu'à la race des êtres de nuit, dont elle avait hérité de Raphaël lui-même. Les traits de son visage se modifièrent, pour paraître plus vieux. Elle s'était permise de le faire car le soleil jouait en sa faveur, ainsi Arianne avait été désavantagée par la lueur du ciel, c'est ce qu'elle se dirait sûrement en croyant voir la même femme mais en plus vieille. Isis prit un air plus sérieux, visiblement plus irritée de la révélation de son prénom que d'autre chose, et s'adressant à l'humaine :

- Ne retiens pas mon nom, ce soir, j'aurai oublié le tien.

Ils mirent fin à ce léger imprévu, mais la demoiselle ne bougea pas pour autant. Maximilien quant à lui, pensa si fort que Meera aurait pu en avoir mal aux oreilles si cela avait été dit à haute voix.

* Vous ! Ne recommencez JAMAIS ça ! Suis-je clair ? Votre plaisanterie de mauvais goût n'aurait provoqué que votre hilarité ! Et je ne vois pas en quoi semer la discorde entre Arianne et moi peut vous amuser ! *

Elle braqua un regard sec sur lui, partagé entre la colère et le je-m'en-foutisme, toujours sous cette forme vieillie d'elle-même.

* Tu viens de faire bien pire en lui révélant mon nom. La prochaine fois je ne me forcerai pas à changer d'apparence pour une misérable vie d'humaine. *

Puis repportant son regard vers l'humaine en question :

- Que n'as-tu pas compris dans les mots " discussion de la plus haute importante, que tu as interrompue " ?

Puis s'adressant aux deux " tourtereaux " :

- Va-t-on perdre plus de temps en batifolage, ou pourrait-on enfin revenir aux choses qui sont réellement sérieuses ?

Elle affichait une expression froide, limite glaciale. Quelle perte de temps. Un Ancien ne pouvait pas se permettre de se laisser aller à une idyle, qui plus est avec une simple humaine. Elle mima un geste de quelqu'un qui va vomir, puis chassa Arianne d'un mouvement de main hautain, comme on fait pour faire fuir un chien errant.
Amour, et humain, deux choses qu'elle détestait profondément.

La remise en place que Maximilien avait obligée à Isis semblait lui avoir fait perdre toutes envies de jouer. Bien au contraire, elle affichait un air contrarié qui s’ajoutant à celui de l’ancien aquatique ne faisait qu’alourdir l’ambiance.
Leurs regards réciproquement noirs se défiaient avec fureur.


Pire ? Pire que de mettre la zizanie dans un couple simplement pour se divertir ? Pire que d’envoyer valdinguer l’unique chose qui tenait encore à peut prêt debout dans la vie d’un homme ? Pire que de bafouer son honneur en le faisant passer pour un homme sans fidélité ? Pire que tout cela en dévoilant simplement les 5 pauvres lettres qui composaient le prénom de cette scorpionne ?
Il avait pensé l’avoir mal jugé au début, mais il devait se rendre à l’évidence, elle lui apparaissait sous sa véritable apparence : caractérielle, violente, et sans gène ! Elle n’avait aucun respect pour les créatures qu’elle ne jugeait pas à sa hauteur : cela englobait donc tout le monde apparemment...
Arianne avait fait volte face, et Maximilien n’avait rien fait pour la retenir. Il savait qu’il s’était montré plus que blessant, et que son attitude n’avait rien du gentleman qu’il lui avait toujours montré. Il ressentait une certaine honte à s’être de cette façon déchargé sur elle.
Il s’horrifiait de voir avec quelle facilité la fatigue, la tristesse et la peine avait fait de lui un être non seulement distant, mais aussi froid et méprisant… Il n’avait pas à refouler sa haine et sa frustration, et elle coulait à présent dans ses veines comme si elle était un constituant de son sang.
Son sang qui battait si fort dans ses tempes… A lui en donner la migraine et le vertige. Il était furieux, en colère… Et cet état d’esprit ne lui était pas du tout naturel. Il n’exprimait qu’un ras le bol. Une goutte d’eau de trop dans un vase qui avait débordé depuis trop longtemps. Il se sentait à bout. Au bord de lui-même…
L’attitude immature de la reine des déserts lui semblait inacceptable, et le regard qui lui lançait en exprimait clairement les pensées qu’elle lui inspirait.


-Je pense pourtant que nous n’avons rien d’autre à nous dire. Laissa-t-il filer dans un murmure glacial.
En vérité, il se sentait tellement furieux qu’il se savait au bord de l’irréparable… La colère le submergeait avec la force d’un tsunami qu’il était incapable de contenir. Il brûlait d’envie de frapper dans la première chose à porté de main. Et en ce moment cette chose était la tête d’Isis…
Et il savait que si tout son corps lui disait qu’il désirait qu’elle paye, il n’en avait pas vraiment envie. Il aurait regretté tel un geste à l’instant même où il l’aurait exécuté…
Il était chez lui. En toute logique, il aurait dut la chasser, mais il craignait que le simple fait d’entendre sa voix soit l’élément qui aurait précipité son geste. Ainsi il se contenta de faire volte face et de s’éloigner, les poings serrés et les oreilles rougies de colère, la plantant sur place comme elle avait faillit le faire avec lui quelque minutes plutôt.

Il s’éloigna à grande enjambée, et la colère, même moins forte n’en restait pas moins présente. Il inspira profondément pour calmer ce feu, cherchant à comprendre à quel moment il s’était laissé prendre par ses sentiments…

*Ô ma reine, pourquoi es tu partie si tôt. Si vite… Que vais-je devenir… Voilà que je me perds déjà en moi-même … Comme j’ai besoin de toi pour me guider encore…*

La simple pensée d’Octopus , chassa un peu plus sa colère, pour la remplacer par le vide et la tristesse. Son corps relacha la tension que la colère avait fait monter pour ramollir de fatigue et de lassitude...
*Que vais-je devenir sans toi ? Je m’égare déjà, loin de ta sagesse …*
[i]

- Je pense pourtant que nous n'avons rien d'autre à nous dire.

- Parfait ! lâcha-t-elle après avoir froncé les yeux.

Visiblement, il ne comprenait pas l'erreur qu'il venait de faire ! Un prénom, ça peut sembler n'être rien de très important, mais quand on est une ancienne comme Isis, c'est bien plus qu'un simple patronyme. Ca en devient presque une question de vie ou de mort. Sérieusement, vous imaginez qu'un chasseur apprenne son véritable prénom, et qu'il fasse ensuite des recherches dans les anciens registres égyptiens. A force de remonter trop loin, il finirait par apprendre bien plus que la normale. Il découvrirait le fruit ultime de sa chair... Maximus ignorait totalement qu'il aurait pu mettre son sang en danger. Elle n'aurait jamais pu pardonner une telle chose... Il ne comprenait rien !

Mais... Elle non plus. Malgré son âge, elle ignorait beaucoup de choses. A commencer par ce qui se passait dans la tête du nouvel ancien. A trop se fermer aux humains et à éviter par tous les moyens ce sentiment qui vous pourrit le coeur, elle avait fini par le rejeter totalement. Ainsi, il lui semblait invraissemblable que l'aquatique ait pu avoir une once d'adoration pour cette humaine. Mais Maximilien n'était pas Isis. Et c'est là la faute qu'elle avait commise.

- ...

Elle soupira, et son visage sembla arborer une mine coupable alors que ses traits reprenaient leur forme rajeunie. Elle détestait devoir l'avouer, mais, peut-être que cette fois-ci, elle avait été trop loin. Au début, elle n'avait pas pensé à mal. C'était juste histoire de mettre Arianne mal à l'aise, pour voir comment chacun allait réagir. Peut-être Maximus tenait à cette humaine au fond. Dans un enième soupir, elle regarda dans la direction qu'il avait prise. Et finalement, non sans la moindre amertume, elle se dirigea sur ses pas.

Il ne lui fallut pas longtemps pour apercevoir la silhouette du nouveau roi.

- Maximilien... * Par pitié ne t'énerve pas tout de suite, je fais rarement ce que je vais faire. --' *

Elle fit encore quelques pas, fixa un instant le sol, comme pour chercher ses mots, une expression de culpabilité sur le visage.

- J'ai été trop loin. J'en suis désolée. J'ai encore du mal à concevoir qu'on puisse sérieusement " s'accrocher " à quelqu'un.

Un léger sourire naquit sur ses lèvres.

- Je ne voulais pas te blesser.

C'était dit. Il pouvait bien en faire ce qu'il voulait.

- Voilà, maintenant je peux m'en aller. ajouta-t-elle avant de se tourner dans la direction opposée.

Malgré ses sens aiguisés l’ancien n’avait pas entendu Isis. Surement ses esprits étaient bien trop accaparés pour qu’il fasse attention à ce qui l’entourait.
Il tressaillit, et ses muscles se bandèrent, il sentait déjà la colère revenir alors qu’il pivota vers elle. Mais il l’a découvrit un peu mal à l’aise, fixant le sol comme pour éviter sa fureur.


Les lèvres de Maximilien formèrent un « O » et il haussa les sourcils surpris de ces excuses. Il dissimula pourtant son étonnement bien rapidement et il poussa un profond soupir.

-Je ne suis pas « sérieusement » accroché à Arianne. Ni elle à moi.
Concéda-t-il.
-C’est juste que … J’aimerais qu’on cesse de s’amuser à envoyer valser les éléments de ma vie les uns après les autres.

Reprit-il avec un air las. Il glissa ses mains dans ses poches et égara son regard vers le ciel avant de continuer.

-Je ne suis pas sûre qu’elle me pardonne les paroles que je lui ai dis. Je ne peux rien lui dévoiler de moi, et cela ne fera que rétrécir la vision de ma situation et mes chances qu’elle me pardonne. Je n’ignore pas que cette relation ne mène nulle part…. Mais je ne suis pas encore prêt à vivre seul pour l’éternité qu’il me reste à vivre. C’est tout.

Se confier de la sorte lui faisait un drôle d’effet. Surtout à celle pour laquelle il avait ressentie une haine si cuisante il y a peine quelque minute, mais ça n’était pourtant pas désagréable.

-Octopus ne se plaignait jamais de ce qu’elle devait vivre. Je me rends compte pourtant qu’elle avait énormément à supporter et à endurer… Certes, Arven et Staroxia étaient là pour l’épauler. Mais il m’arrive de penser qu’elle était plus triste qu’elle ne le montrait.

Il marqua une pause avant de sentir sa voix fléchir. Et brusquement il changea de sujet, ayant retrouvé son calme il avait reprit un ton neutre :
-Arianne n’aurait rien fait de votre identité et j’ignorais que vous présenter sous votre vraie identité vous contrarierez de la sorte. Je m’en excuse aussi. Mais vous présenter sous « Isis » aurait peut être éveillé ses doutes sur qui vous étiez réellement.


-Me trouvez vous aussi antipathique pour essayer de me fausser compagnie par deux fois en moins d'une heure ?

Demanda-t-il avec malice, alors qu'il avait gommé toute trace de colère sur les traits de son visage.

-A moins que vous preniez simplement plaisir à voir un homme vous rappeler ?

Ajouta-t-il. Un nouvelle fois il n'y avait nul agression dans ses paroles. Que des mots formulés avec calme et une pointe d'amusement. Comme si rien ne s'était passé...

-Vous êtes une femme étrange Isis... Très sérieusement, j'essaye de vous cerner mais vous ne cessez de me surprendre. Vous n'êtes pas le genre de femme qui se laisse approcher n'est pas ?
Ne voyez pas ma question comme une insulte surtout. J'exprime juste le souhait que nous trouvions un terrain d'entente, sans que nous passions notre temps à s'excuser l'un envers l'autre comme cela vient de se produire. Je me suis montrée froid en vous voyant ici, il est vrai, et encore une fois mon attitude n'était que déplacée et je m'en excuse de nouveau. J'aurais espéré que vous ne m'en tiendrez pas rigueur et que nous pourrions discuter... J'ai beaucoup d’interrogations qui restent sans réponses, comme par exemple les raisons qui vous mènent en France, ce qui vous pousse à y rester, ou encore; pouvons nous compter sur votre aide dans le conflit qui nous oppose à Xander?

Il s'était doucement rapproché d'elle en capturant ses prunelles dans la noirceur des siennes. Son charisme accru avait accentué la douceur, et la malice de sa voix. Il aspirait à lui apparaître comme quelqu'un de confiance à qui elle pouvait confier la réponse de ses questions.

Maximus soupira, et sembla privilégier un calme nouveau en avouant d'abord :

- Je ne suis pas ‹‹ sérieusement ›› accroché à Arianne. Ni elle à moi. C'est juste que ... J'aimerais qu'on cesse de s'amuser à envoyer valser les éléments de ma vie les uns après les autres.

Puis :

- [...] je ne suis pas encore prêt à vivre seul pour l'éternité qu'il me reste à vivre. C'est tout.

Elle afficha un rictus de compassion. Evidemment, elle ne savait que trop ce dont il parlait. Mais personne n'est prêt à vivre seul un jour ou l'autre. On apprend juste à s'y habituer, et à force, on finit par ne plus trop y penser. Sauf quelques fois... La solitude devient notre meilleur ami, nous sommes le martyr de notre propre existence.

Maximilien continua en parlant d'Octopus, et de ce qu'il constatait avec peine. Fallait-il vraiment faire un quelconque commentaire en justifiant ses dires ? Ils avaient beau être des Anciens, ils n'en restaient pas moins humains. Et leur fardeau était bien plus lourd que pouvaient l'imaginer les gens à peu près normaux.
Il l'informa ensuite qu'il ignorait l'impact de l'information qu'il avait donnée à Arianne, et que c'était aussi une façon d'éviter de lui faire soupçonner quelque chose en lui révélant qui elle était en tant qu'Isis. Après quoi, elle se prépara à s'en aller comme elle l'avait annoncé.

- Me trouvez-vous aussi antipathique pour essayer de me fausser compagnie par deux fois en moins d'une heure ? demanda-t-il alors qu'elle lui faisait de nouveau face. Puis il reprit :

- A moins que vous preniez simplement plaisir à voir un homme vous rappeler ?

Un sourire amusé se dessina sur ses lèvres. Elle aurait pu de nouveau se sentir offensée, mais il n'y avait aucune sonorité d'attaque dans la voix du prince des eaux.

- C'est une mauvaise habitude que j'ai, j'évite de m'attarder ailleurs que sur mes terres. répondit-elle simplement.

- Vous êtes une femme étrange Isis... Très sérieusement, j'essaye de vous cerner mais vous ne cessez de me surprendre. Vous n'êtes pas le genre de femme qui se laisse approcher n'est-ce pas ? [...]

A cet instant précis, il devait certainement ignorer à quel point il avait raison. Depuis de nombreux siècles, elle s'efforçait de n'être que de passage. Maximilien ne faisait sûrement pas allusion au sens premier que l'on pouvait comprendre dans sa phrase, mais il en était plus proche que jamais. Dans n'importe quelle circonstance, elle gardait une mise à distance avec son ou ses camarades de dialogue. Il n'y avait qu'avec Raphaël qu'elle se permettait quelques fantaisies, bien que d'ordinaire leurs conversations restaient très politiquement correctes. Elle avait flanché une seule fois. Une unique fois qui lui avait valu tous les chagrins du monde. Une unique fois elle avait baissé sa garde, et son coeur s'était mêlé à un autre, de façon même à engendrer la vie qu'elle n'avait jamais pu connaître réellement. Une fois de trop. Mais une fois qu'elle ne regrettait pas. Une fois qui ne devait quand même plus se reproduire.

[...] les raisons qui vous mènent en France, ce qui vous pousse à y rester, ou encore, pouvons-nous compter sur votre aide dans le conflit qui nous oppose à Xander ?

Elle soupira. Tout ce qu'il venait de dire résonnait encore dans sa tête, comme si... Comme s'il avait volontairement voulu qu'elle l'écoute avec une double attention. Elle ne lui en tiendrait pas rigueur. Peut-être avait-il craint qu'elle s'en aille quand même dans le cas contraire ? Enfin. Elle rassembla les pans de sa robe, et s'assit simplement sur l'herbe. Cet entretien risquait d'être long. Et elle craignait sérieusement de ne pas pouvoir éclaircir tous les nuages qui faisaient de l'ombre sur l'esprit de Maximus.
Pourtant, en se posant ainsi, elle acceptait de lui livrer quelques réponses. C'était en quelque sorte une invitation au dialogue. Comme un écrivain qui livre les secrets de son récit.

- Il y avait plusieurs raisons qui m'incitaient à revenir en France. Puis il y en a eu une autre, plus personnelle, qui m'a convaincue de ne pas retarder plus longtemps mon départ. confia-t-elle en prenant machinalement le petit pendentif qui pendait à son cou.

- C'est aussi ce me pousse à rester, en grande partie. reprit-elle en lâchant le bijou, qui, à bien y regarder, semblait pouvoir s'ouvrir.

- Je ne suis pas là pour faire de l'ombre à Arven, encore moins à Staroxia. La gloire ne m'intéresse pas, c'est l'avenir que je veux construire.

Ses deux perles d'océan se posèrent sur le visage du nouveau roi des eaux.

- Tu disais penser parfois à la peine que pouvait ressentir Octopus. Sais-tu ce qui rend une femme malheureuse, Maximilien ? C'est de voir ses enfants souffrir et tomber les uns après les autres. Et quand on est face à la mort, notre plus grand regret est de ne pas avoir su leur assurer un avenir meilleur...

Elle n'insinuait pas par là que c'était exactement ce qu'avait ressenti Octopus le jour du jugement dernier, mais, elle était certaine qu'une part de ce qu'elle disait avait effleuré l'esprit de la défunte.

- Il n'est pas facile d'endosser le rôle d'un leader. Au début, j'ai même pensé que ça gâcherait ma vie. Je voyais ça comme une véritable malédiction. Mais avec le temps, tu prends conscience des réels enjeux. Et dans toute la solitude à laquelle tu te confrontes, dans toute la peine que tu ressens d'être ce que tu es, tu ne peux t'empêcher d'être heureux, parce que tu maintiens l'équilibre de la vie. Tu deviens un parent universel, et rien n'a plus d'importance que de voir vivre ceux que tu dois protéger.

Ainsi avait-elle parlé, assurée de ce qu'elle disait. Un réel sourire aux lèvres. C'était selon elle une loi évidente, sûrement celle-ci changeait selon les visions des autres Anciens. Puis elle afficha un regard qui se voulait rassurant, comme celui qu'une mère vous offre lorsque vous doutez de la suite.

- J'ai souvent dit : Je ne pourrai partir que lorsque les chasseurs ne nuiront plus. Je compte bien appliquer cette devise jusqu'à mon dernier souffle.

Oui, ils pouvaient compter sur elle dans le conflit contre Xander. Et même sans cette alliance qui paraissait inévitable, Meera, Ancienne des terres d'Afrique, aurait oeuvré pour la sérénité de tous ces enfants.

La reine du désert prit place dans l'herbe. Satisfait de la voir accepter de rester Maximilien l'imita, oubliant presque qu'il portait un costume italien sur lequel une tache d'herbe aurait pu se montrer fatale.


Le geste machinale qui l'avait poussé à effleurer le pendentif qu'elle portait au cou n'échappa pas à Maximilien, mais il se garda bien de faire une quelconque remarque. Evidemment il se sentait intrigué par ce qu'elle venait de dire, mais il ne voulait pas non plus se montrer indiscret. Ainsi donc il brida sa curiosité pour mieux l'écouter.


Il sentit un picotement étrange lui remonter le long de la nuque… Ces paroles avaient éveillé quelque chose en lui, sans qu'il ne puise véritablement dire quoi.
Il se prit à éviter son regard pour le tourner vers l'horizon. Un avenir meilleur ? Pouvaient-ils encore y rêver… Un avenir sans sang, mort, chasseur et déchirure.


Se détournant de l'horizon il reporta son attention sur elle, et la vit sourire. Ce discours le touchait plus qu'elle n'aurait pu l'imaginer. Lui que les questions assaillaient en permanences : Pourquoi moi ? Que dois-je faire ? Est-ce comme cela que je dois faire ? Qu'attend-t-on de moi ?
Il n'avait fait part à personne de ses doutes. Il avait toujours sut comment serait son avenir. Mais il n'avait jamais imaginé prendre la place d'Octopus dans une telle situation de crise. Et parfois, il enrageait contre le ciel de l'avoir ainsi piégé …
Parfois il rêvait d'une vie plus simple: être marié à une femme et père d'une tribu d'enfant qui offrirait des poissons en pâte à sel pour sa fête… Tout simplement.
Mais ces projets n'étaient plus que des illusions lointaines qui mourraient dès qu'il tendait la main vers eux.


Il laissa planer un silence pendant lequel ils se regardèrent et où il se prit à sourire à son tour.

-Vos paroles sont riches de sagesse, Isis…

La sincérité de dont il faisait preuve n'était pas feinte. Elle parlait comme la mère d'un peuple … On disait souvent que les femmes naissent mère. Isis ne faisait que confirmer ce dicton. Elle avait la voix calme et apaisante de celle qui porte l'espoir et faire naître le courage.

-Vous savez, je partage beaucoup de votre vision… Arven parle souvent d'anéantir les chasseurs. Mais savez vous ce que je crains Isis ? Que ça ne suffise pas à bâtir un monde stable et tolérant pour nos frères… J'ai peur qu'une fois que nous ayant réussit à les faire disparaitre leur place soit prises par d'autres et que le cauchemar recommence.
J'ai l'intime conviction que notre rôle en tant qu'ancien n'est pas seulement celui d'éliminer ce qui peut nuire à nos peuples, mais aussi à leur forger une place stable pour que plus jamais à l'avenir ils aient à se heurter à l'intolérance d'autres races. Quand vous parlez de maintenir l'équilibre, je pense que c'est un peu la même chose.

Il laissa passer un ange.

-J'ai toujours pensé que la position pacifique d'Octopus nous protégeait… Que si nous ne représentions aucune menace pour les chasseurs, alors nous pourrions vivre en paix. Je me rends compte aujourd'hui de la naïveté de mon raisonnement…. La cruauté avec laquelle ils l'ont assassiné ne me laissera jamais en paix… Ils ne l'on même pas traité avec honneur et ont bafoué son humanité juste pour nous atteindre… Ils sont les bêtes qu'ils nous accusent d'être, et j'enrage de voir avec facilité ils ont frappé et touché.
J'ai conscience que partir se cacher et ignorer le combat de ne ferait que nous rendre encore plus vulnérable… Mais l'idée de bâtir l'avenir sur le cimetière de nos ennemies et les mains couvertes de leur sang de me plaint guère…

Il ferma les yeux et soupira lourdement.

-J'aspire à honorer l'enseignement d'Octopus et à poursuivre ses projets, mais me faire une place n'est pas chose aisée… Arven fait miroiter à mes hommes le triomphe d'une guerre armées, et beaucoup trop sont aveuglés par le désir de vengeance pour comprendre qu'ils n'y perdront peut être pas la vie mais une bonne partie de leur conscience… Je ne veux pas de séquelles plus lourde que de blessures reçut dans ce conflit, et j'aimerais leur faire comprendre qu'ils se battent pour leur avenir, mais aussi pour ceux de leur enfant. Que leurs gestes d'aujourd'hui feront notre histoire demain …

Il ne remarqua qu'alors qu'il s'était laissé emporté par ses paroles, et il laissa filer un sourire désolé à l'adresse de la jeune femme.

- Excusez-moi, je me suis laissé entrainer… Qu'en pensez-vous ? Est-ce un sentier qu'il est bon de suivre …?

Elle se contenta d'acquieser de quelques hôchements de tête à ces paroles. Puis il reprit, et elle se contenta d'écouter. De l'écouter, simplement. Elle avait déjà la réponse à la plupart des questions qu'il se posait encore. Aussi bien celle de l'utilité de l'extermination des chasseurs, que celle concernant la position d'Arven. Mais Maximilien n'avait pas fini de parler, il avait comme qui dirait besoin de vider son sac. Elle était prête à ce qu'il lui confie ses angoisses. En tant qu'ainée, elle recevrait aussi bien ses interrogations, ses doutes. Alors elle était restée attentive à chacune de ses paroles.

- Excusez-moi, je me suis laissé entrainer... Qu'en pensez-vous ? Est-ce un sentier qu'il est bon de suivre ?

Elle marqua un temps avant de répondre en le regardant.

- Comment définit-on ce qui est bien ou mal ? C'est à toi seul que tes convictions souffleront de te diriger dans telle ou telle direction. Mais...

Nouvel arrêt. Elle se mit à fixer l'horizon avant de reprendre :

- Je pense que tu te diriges sur la bonne voie, si je puis dire. Beaucoup de choses dépendent des aspirations et des croyances, mais l'issue d'une guerre totale est d'une évidence frappante. Détruire les chasseurs ne nous mènera nulle part. Ca ne fera qu'engendrer plus de haine et de combats. Evidemment nous devrons nous défendre en cas d'attaques, mais ce n'est pas l'homme qu'il faut détruire, c'est leur Dieu. Ou plutôt, les fausses accusations de ce Dieu. Il n'est écrit nulle part dans la Bible que nous sommes des erreurs. Toutes ces batailles ne sont que le fruit d'une trop grande intolérance, d'une peur de ce qui est différent, et de mauvaises rumeurs lancées par des fanatiques.

Elle reporta son regard sur Maximus.

- Tu sais, Arven est aussi conscient que moi que si pour le moment nous collaborons, nos chemins se sépareront rapidement. Je doute franchement que nous puissons nous entendre à long terme. Quand les idéaux se confrontent, c'est là que le réel conflit se crée.

Un temps.

- Quand je disais que je continuerai d'appliquer ma devise jusqu'à la mort, je ne parlais pas d'exterminer une race entière. Nous devons la contrôler, établir de nouveaux décrets. Je ne serai pas leur Satan.

Elle soupira.

- Une guerre éclatera, tu peux en être sûr, et je me demande de quels êtres seront formés les différents clans. Il y aura certainement plus de deux partis qui se confronteront. Mais toi, Maximilien, que choisiras-tu ?

Son discours sonnait comme une prophétie. Pourtant, il fallait se rendre à l'évidence. Un jour ou l'autre, elle serait confrontée à Arven, tout comme Raphaël qui semblait aspirer à un autre avenir que celui que paraissait désirer l'Aigle Rouge. Maximilien devait se préparer dès maintenant.

- Comment définit-on ce qui est bien ou mal ? C'est à toi seul que tes convictions souffleront de te diriger dans telle ou telle direction

Il ne pouvait pas contredire la sagesse de cette parole.


Il n'aurait pas su décrire le sentiment de soulagement même infime qu'il ressentit à ce moment. Non pas qu'il était un enfant hésitant qui avait besoin de reconnaissance pour prendre des décisions, mais savoir que l'on était appuyé par ses aînée était chose encourageante.
L'approche et l'analyse de la situation que lui fit Isis était proche de ses constatations… C'était la foi de Dieu et l'intolérance qui poussait les hommes à devenir des chasseurs redoutables. Tous les tuer ne servait à rien si on laissait se reprendre la source de leur naissance. Ils en tueraient 10 pour en voir 20 de plus arriver si ils n'arrivaient pas à mettre fin à leur foi et leur intolérance.


Un sourire fugace étira ses lèvres… Allez savoir pourquoi mais cette information ne l'avait même pas surpris…


A cette affirmation il ne pu réprimer un léger soupir. Il savait que les guerres faisaient des alliances et non des familles. Lorsqu'ils n'auront plus d'ennemie commun contre lequel lutté, il était fort probable que les familles commencent à montrer plus de divergence… Chacun partirait de leur côté.

-A dire vrai, j'ai préféré ne pas me poser la question. Nous nous sommes unis contre l'ennemi, et c'était je pense la chose la plus saine à faire… Je n'ignore pas les différents qui pourront naître…

Il marqua une pause durant lequel il cherchait ses mots.

-Arven est un chef de guerre qui hait plus son ennemi qu'il aime son peuple. Mais il disait vrai sa protection a évité beaucoup de perte…

L'orque se souvenait de ce que Arven avait dit " Lorsque cette guerre finira enfin, ce sera mon tour de m'effacer, je n'aurai plus ma place dans votre monde.""
Oui, mais si il fallait se dresser contre lui avant la fin de la guerre, Maximilien le ferait-il ?
Les idées que partageait Meera était tellement plus proches des siennes … La rejoindrait-il ?

-Si un choix s'impose à moi, je le ferais en m'efforçant de prendre la meilleure décision pour mon peuple.

Conclut-il résolu. Peut être trouverait-elle que pour un aquatique il ne se mouillait pas beaucoup mais il n'en savait pas assez sur chacun pour dire

‹‹ Si un choix s'impose à moi, je le ferais en m'efforçant de prendre la meilleure décision pour mon peuple. ››

Meera esquissa un sourire satisfait. Elle avait eu raison, lorsqu'elle s'était recueillie sur la tombe qu'elle avait faite pour Octopus, Maximilien, connu des siens comme Maximus, était bel et bien prêt à endosser son nouveau rôle.

- Voilà des paroles dignes d'un dirigeant. Tu es prêt, Maximilien.

Elle porta son regard vers le ciel, laissant s'intaller un léger silence.

- Enfin... Concentrons-nous sur les prochains mois à venir pour le moment, le reste suivra son cours au fil de nos actes.

Elle se tut de nouveau, puis une sonnerie de téléphone retentit du fond de sa poche. Elle en tira un portable, qu'elle porta à son oreille.

- J'écoute. [...] Bien, j'arrive.

Tournant son visage vers Maximilien.

- Je suis navrée, je vais devoir y aller. annonça-t-elle avant de se mettre debout.

- Nous nous reverrons assez tôt, je pense, mais si tu as besoin, je reste à ta disposition.

Elle entama quelques pas.

- Sois fort, Maximilien. Et reste toi-même.

• " Voilà des paroles dignes d'un dirigeant. Tu es prêt, Maximilien. "

  
  Le successeur n'aurait sut dire si cette phrase lui faisait plaisir, ou peur. Puisqu'il était digne pour ce rôle, il n'avait pas la moindre excuse en cas d'échec… Mais puisqu'il était prêt, cela voulait dire qu'il avait en main toutes les cartes qui lui seront utiles…
  Il réfléchissait encore à ce que cette phrase avait éveillé en lui quand le portable d'Isis sonna.
  Pour être homme d'affaire, il savait reconnaître un ton important, même pour quelque phrase.
  Au bout du fils ne se trouvait pas la meilleure amie de Meera qui lui parlait des dernières soldes à en juger par la mine et la voix de l'égyptienne.
  L'orque ne fit donc pas surprit de l'entendre s'excuser :
  
  

  " Je suis navrée, je vais devoir y aller "

  
  Elle lui proposa son aide avant de conclure :
  
  

  " Sois fort, Maximilien. Et reste toi-même. "

  
  D'un geste solennel il courba le cou.
  
  -Je tacherais de ne décevoir personne.
  
  Son peuple le premier.
  
  -Au revoir Meera. Dit-il en la voyant s'éloigner. Il se sentait étrange… Cet entretient avait était non seulement riche en découverte, mais aussi enemotion… Il avait matière à réfléchir. Mais d'abord son portable sonna et "Arianne" s'affichait sur l'écran. Il fallait régler une chose à la fois, et il se doutait que la jeune femme l'appelait pour discuter de ce qui s'était passer… Avec un soupir résigné, il décrocha…
  

Sujet finit