Le hasard est un rendez vous.[ Bobby]

*Saloperie de journée de merde !*

Nelïya manquait un peu de bonne foi en jurant de la sorte. La vérité était que sa journée n’avait pas été si terrible que ça. Levée du bon pied, elle avait fait sa tournée de prospectus sous un beau temps, et avait profité de son aprèm pour peaufiner son casse du soir. Tout c’était donc déroulé selon ses plans.
23h : Elle avait simulé un vol dans une bijouterie, déclenché l’alarme, et attendu d’avoir la police aux trousses pour les distancer. Elle avait besoin d’évaluer leur vitesse de réaction avant de s’attaquer vraiment au Louvre. Et elle n’avait pas était déçu !
La course poursuite avait été dantesque ! Et ce fut les jambes molles et tiraillés par son effort qu’elle avait dut attaquer l’ascension des toits de Paris pour se mettre à l’abri. La montée avait été rude, et elle avait encore du s’éloigner, en allant de toits en toits.
Les sirènes de police hurlaient toujours, mais s’éloignaient de plus en plus.

Alors pourquoi jurer ? La réponse se trouvait au moment où Nelïya avait commencé à descendre des toits. La façade qu’elle avait choisit n’était pas la mieux adaptée pour l’escalade, et ce ne fut qu’arrivé à peine à moitié de descente qu’elle se rendit compte de son erreur. En équilibre et coincée sur la bordure d’une fenêtre du 4 ème étage, il était aisée de comprendre qu’elle maudissait la suite des événements qui l’avaient amenés ici.
Les jambes flageolantes, la nuque dégoulinante de transpiration, et la cagoule qui lui gratte le visage, Nelïya commençait vraiment à se dire qu’elle ne se sortirait jamais de se pétrin !

La panique menaçait de la submerger, quand enfin elle décida le tout pour le tout, et qu’elle s’élança dans le vide, pour essayer d’atteindre une autre fenêtre. Son ange gardien était visiblement de son côté, car, elle réussit son coup.
Le corps plaqué contre la façade, la respiration haletante, elle savoura à peine sa réussite, et recommença à monter. Elle choisirait un endroit plus sur pour descendre.
Remonté au sixième, elle reprit son souffle, heureuse de constater que le calvaire serait bientôt finit.. Reprenant son souffle, elle vira sa cagoule de voleuse qui lui tenait décidément trop chaud. Un court instant, elle s’appuya contre la vitre de l’appartement, mais presque immédiatement, elle se sentit basculer en arrière.

On n’avait pas verrouillée la fenêtre… Avec un cri étouffé de stupeur, Nelïya sentit la vitre s’ouvrir sous son poids, son corps s’enfoncer dans le rideau, pour, atterrir à l’intérieur.
Chancelante, elle se releva, en balayant la pièce du regard. Spacieuse, et bien ordonnée la pièce n’en était pas moins vide de toute présence humaine.
C’était déjà ça !


Que dirait le propriétaire en voyant une femme vêtue de noir, une cagoule serrée dans la main, et un sac visé sur le dos ?

Dès que le réveil sonna, Bob sut qu’il était d’humeur à n’être d’humeur à rien du tout aujourd’hui. Il avait traîné un petit quart d’heure… voire une grosse demi-heure. Non. Plus sérieusement, il avait glandé pendant une heure et demie entre sommeil et éveil, éclairé par les rayons de soleil qui traversaient les rideaux. Il faisait anormalement chaud dans la chambre, et, même uniquement en sous-vêtements, sans être couvert au-dessus de la taille, il était en sueur. Peut-être avait-il mal réglé les radiateurs, ou peut-être le soleil tapait-il trop fort, ou qu’en savait-il encore ? Toujours était-il qu’il avait finit par être bien trop en sueur pour rester au lit.
La première chose qu’il fit en se levant fut de régler le radiateur. Il avait effectivement, sûrement par inattention, réglé l’appareil un peu trop fort. Il entrouvrit ensuite la fenêtre en alla dans la douche. Là encore, il resta assez longtemps. Cette journée, c’était une journée calme et où il ne se presserait pas. Les yeux fermés, il laissait avec plaisir les gouttes caresser chaque parcelle de sa peau. Par coquetterie, il avait même testé la fonction massage. Un pur bonheur pour se décontracter. Il n’était finalement pas déçu d’avoir laissé son père installer ça.
Quand il estima qu’il valait mieux sortir, il sortit. Il s’empara de la première serviette passant à portée de main, se sécha sommairement avec et l’attacha autour de sa taille. Il alla ensuite s’affaler dans son canapé et soupira en se rendant compte qu’il n’avait pas préparé à manger. Dans un grognement de lassitude, il se releva et alla à la cuisine dans l’espoir de trouver quelque chose de tout prêt. Finalement, il se contenta d’un bout de pain et d’une brique de lait. Il retourna au salon et fouilla dans sa bibliothèque. Il voulait se faire un film. Il en prit un au hasard et l’entra dans la console de jeu qui lui servait aussi de lecteur DVD. Il s’affala à nouveau dans le canapé et regarda le film.

Une heure et demie plus tard, il se leva, alla s’habiller et revint dans le salon, se lançant un nouveau DVD. Un peu après la moitié du film, il entendit du bruit dans sa chambre. Il se leva et se dirigea vers la porte. Posant sa main sur la poignée, il attendit. Ce qui était tombé était en train de bouger. Lentement, il tourna la poignée et poussa la porte. Derrière, une jeune femme venait de se relever. Il n’alluma pas la lumière, la distinguant parfaitement dans la pénombre. Il resta silencieux un moment. Une voleuse ? Tout semblait la désigner ainsi. Néanmoins, il n’arrivait pas à se convaincre que c’était lui qu’elle était venue cambrioler. Sa chute était bien trop ridicule pour ça.

- Bonsoir. Vous vous êtes fait mal ?

Ce n’était pas la première chose qu’aurait demandé une personne sensée, mais Bob ne l’était pas particulièrement, et ce n’était pas nouveau.

Très honnêtement, Nelïya n’aurait pas voulut savoir la note que Vicky, sa « professeur de vole » lui aurait donné pour cet entrainement ! La note aurait été un peu trop circulaire à son goût…

*Y’a vraiment qu’à moi que ça arrive ce genre de chose…*

Premièrement, aucuns bruits ne s’était fait percevoir. Mais il ne fallut pas attendre plus d’une minute pour que la porte ne s’ouvre. Le cœur de Nelïya se figea… Elle allait se faire pincer !

La surprise fut pourtant de taille, car dans l’embrassure de la porte ne se tenait ni un vieillard édenté armé d’une carabine, ni une mégère en pyjama rose brandissant un poêle, mais un jeune homme. D’ici elle pouvait évaluer sa taille à … 1m 75, 1 m80 au mieux.
Alors que son esprit cavalait à la recherche d’une excuse potable capable d’expliquer sa présence, elle sentit ses joues rosirent sous l’effet de l’intense froissement de son orgueil de voleuse. C’était bien la situation la plus ridicule dans laquelle elle avait réussit à se fourrer depuis ses premières inspirations sur terre !


La jeune voleuse s’était plutôt attendue à un « qu’est ce que vous fouttez là ?! », ce qui expliqua qu’elle ne répondit pas tout de suite, se contentant de le regarder avec un air déconcerté pendant un bref instant.
Puis, puisant dans les ultimes vestiges de sa fierté féminine, elle décida de faire comme si de rien n’était, a l’instar de ce jeune qui ne semblait pas s’alarmer outre mesure.

-Ouais, ça va. La moquette … Bon choix… Elle amortie bien.

D’un geste bref de la tête, elle appuya du regard la direction du sol. Puis avec nonchalance, elle épousseta son pantalon, et lissa ses manches, après quoi elle fourra sa cagoule dans son sac qu’elle rejeta sur son épaule. Ce geste lui couta une légère grimace. Son épaule la lançait douloureusement, résultat de l’effort conséquent qu’elle avait du faire pour se hisser su la façade. Sa chute quand à elle n’avait rien arrangé, mais rien n’était cassé, c’était le principal.
Dissimulant tant bien que mal un certain gène, elle renvoya son regard accroché la silhouette de l’homme.
Elle le distinguait surement mieux que lui ne la voyait elle. Châtain, à l’allure athlétique, elle pouvait distinguer d’ici la couleur bleu glacée de son regard mystérieux.

*J’ai de la chance… J’suis pas tombée sur un thon …Au moins il y avait quelque chose d’intéressant à regarder dans cette chambre…*

Songea-t-elle avec une certaine ironie.

-'Soir au fait. 'Scusez le dérangement... Je faisais que passer...

L’intrus ne répondit pas tout de suite, ce qui laissa le temps à Bob de la détailler. Elle devait faire une dizaine de centimètres de moins que lui, voire plus. Elle devait être plus jeune que lui, mais pas beaucoup plus. Ce qui se voyait avant tout, c’était la couleur de ses cheveux. Ou plutôt de ses mèches. Des mèches blanches, c’était pas bien banal. Il distinguait plus ou moins ses yeux mais avait du mal à en définir la couleur. Ce qui se voyait aussi, c’était le rouge-à-lèvres qui n’en était pas vraiment un. En fait, ça ne ressemblait pas vraiment à du rouge. Cagoule, habits noirs, sac-à-dos…
Bob restait planté là, calme. Non pas qu’il lui faisait confiance – il ne faisait plus confiance à personne depuis bien longtemps – mais quelque chose lui soufflait qu’il n’avait rien à craindre d’elle.

« Ouais, ça va. La moquette … Bon choix… Elle amortie bien. »

Il laissa échapper un ricanement. Elle agissait comme si de rien n’était, comme si ce n’était pas anormal qu’en tant qu’inconnue elle rentre chez lui sans permission et par la fenêtre. En même temps, n’agissait-il pas lui-même ainsi ?

- Ce n’était pas vraiment son but principal. Mais heureux qu’elle ait pu servir.

Le sourire qu’il affichait laissait savoir qu’il était sérieux. Son sourire s’effaça lorsqu’il remarqua la grimace de l’inconnue. Ses yeux se posèrent aussitôt sur l’épaule. Apparemment, la moquette n’amortissait pas si bien. À moins que ce ne fut autre chose…
Elle posa à nouveau son regard sur lui. Il n’avait pas bougé d’un poil depuis tout à l’heure. Il se prit à essayer de définir la couleur de ses yeux, chose assez difficile vu le peu de lumière dans la pièce.

*Marron, peut-être… ou noisette…*

Encore une fois, ce ne devait pas être le bon moment pour ça. Mais il avait déjà saisit le principal de sa description au cas où il déciderait d’appeler la police – même si les chances étaient plus qu’infimes – alors il prit comme excuse que ce serait un détail de plus à leur donner. La vérité était qu’elle était plus que plaisante à regarder. Pas seulement à cause de ses formes… L’être entier était fascinant.

« 'Soir au fait. 'Scusez le dérangement... Je faisais que passer... »

D’un simple geste de la tête il lui rendit son salut, et, sans prévenir, il s’approcha d’elle. Il s’arrêta à moins d’un mètre, plongeant son regard dans celui de la visiteuse, pour ensuite baisser les yeux sur l’épaule qui l’avait fait grimacer.

- Laissez-moi voir votre épaule…

En six ans qu’il ne faisait rien de particulier, il s’était inscrit à plusieurs cours. Musique, notamment, mais aussi quelques autres. C’est grâce à l’un de ces cours particuliers payé par son père qu’il avait apprit les rudiments de la médecine. Son professeur lui avait d’ailleurs dit que s’il poursuivait ses études, il aurait pu faire un bon médecin. Mais Robin tenait trop à la liberté de son emploi du temps, et puis, le professeur avait pu dire ça uniquement parce qu’il avait été grassement payé.
Une excuse de plus pour ne pas se lancer dedans.

Heu… C’était qui ce mec ? Il y avait quelque chose de très louche… Trop louche … Déjà qu’il s’était iniquité de son état avant de s’alarmer de sa présence anormale, mais maintenant il poussait jusqu’à exprimer son contentement de ne pas la voir blessée.
Etait ce parce qu’elle avait perdu l’habitude qu’on qu’inquiète pour elle que la jeune femme se sentait de plus en plus méfiante face à l’attitude du jeune homme ?

*Ca sent le pourri … Je suis encore tombée sur un mec pas net …Canon mais pas net*

Peut être y avait-il simplement de la gentillesse qui dictait les agissements de ce garçon, mais la vampire jeta un coup d’œil bref pour évaluer la distance qui la séparait de la fenêtre. A peine 1 mètre … Son cœur s’apaisa, et son angoisse diminua.

*Il fait son gentil et il va me jeter aux flics à la première occaz. Faut que je me carapate rapidos !*

Elle s’injuria d’avoir ôté sa cagoule. Loin d’ignorer qu’elle arborait un look remarquable, elle savait pertinemment qu’une description d’elle pour faire un portrait robot la trahirait à coup sur.
Bien qu’attendue la question « que faites vous ici » ne tomba pas.

-Bon bha je vais pas vous déranger plus longtemps….

Lentement, son corps pivota pour retourner à la fenêtre. Une présence, un souffle proche, son corps qui se fige net. L’homme venait de s’approcher. Il était là, tout près. Une goutte de sueur froide glissa sur la nuque de la voleur pour se perdre dans l’étendu de son dos.

Elle se rend compte qu’elle a oublié de respirer depuis l’instant où il a violé son « espace vital ».

*Calme toi Nel, il ne te fera rien …*

En continu, elle se répéta cette phrase. Puis son visage se détend d’un sourire un peu forcé. D’une voix trop précipitée à son gout elle ajoute:

-Mon épaule ? Ha ce n’est rien… Rien du tout !

Instinctivement, elle recule pour rétablir une distance « convenable » entre elle et lui. Son regard se détourne de l’océan bleuté qui compose les prunelles de cet inconnu.

*Reprend toi Nel ! Tu n’es pas une mauviette !*

D’un pas franc elle avale l’espace qui la sépare de la fenêtre. Elle s’apprête à poser un pied sur le rebord, quand tout à coup, une sirène de police rugit dans la ruelle. Le corps bandé par la stupeur, elle ne peu réprimer une grimace de mécontentement. La police sillonne le quartier. Sortir maintenant c’est se jeter dans la gueule du loup.

La police ou le blondinet … Le choix et vite fait. Elle retire son pied du rebord, et ferme la fenêtre.

-Finalement… Ce n’est pas très prudent, vous avez raison… Vous avez de l’arnica ?

L’inconnue était méfiante, et ça se voyait. Étrange. Pourtant, ça aurait dû être lui le méfiant. Enfin… Pas lui lui, mais lui celui chez qui une personne venait de s’introduire sans son accord. À la limite, il aurait pu comprendre qu’elle soit étonnée. Après tout, on ne voyait pas toujours quelqu’un se préoccuper d’un intrus entré sans permission. Mais c’était une des particularités de Bob, une des choses qui le rendaient unique, même si peu de monde allaient jusqu’à lui pour le découvrir. Alors pourquoi être méfiante. Croyait-elle qu’il jouait un rôle ? Que pensait-elle qu’il ferait ? Qui serait assez idiot pour élaborer un stratagème basé sur une fausse confiance ?
Quoique, il fallait surtout être brillant pour faire ça. L’idiotie était sûrement de ne pas le jouer, ce rôle, et de réellement s’inquiéter pour elle.

Elle lorgnait vers la fenêtre. Robin soupira intérieurement. Il trouvait dommage qu’elle veuille déjà partir.

« Bon bha je vais pas vous déranger plus longtemps…. »

Il n’avait pas particulièrement envie de la laisser partir en sachant que son épaule lui faisait mal. D’autant plus si elle devait partir par la fenêtre, et donc escalader. Il s’était donc approché en lui demandant de lui laisser voir son épaule.

« Mon épaule ? Ha ce n’est rien… Rien du tout ! »

Elle avait dit ça trop précipitamment. Ça plus le sourire trop visiblement forcé, et il était évident qu’elle mentait. Néanmoins, il ne fit rien pour l’arrêter cette fois. Il n’allait pas la forcer à rester, ce ne serait pas correct, même si qu’elle parte n’était pas bien raisonnable. C’était tant pis pour elle, si elle voulait s’écraser de cette hauteur.
Du moins, c’est ce qu’il voulait mais n’arrivait pas à se résigner à penser.

Elle se recula alors qu’elle prononçait ces mots, détournant aussi le regard. Elle se dirigea ensuite vers la fenêtre, et, cette fois, Robin laissa vraiment échapper un soupir. Il espérait qu’elle ne parte pas, pour son bien. Heureusement, elle ne le fit pas, et Robin crut deviner pourquoi. La sirène de police l’avait surprise et lui avait fait retirer le pied du rebord de la fenêtre. Alors elle était recherchée…
Intéressant.

« Finalement… Ce n’est pas très prudent, vous avez raison… Vous avez de l’arnica ? »

- J’ai de la pommade, pour peu que vous acceptiez de dénuder votre épaule pour que je vous en applique. Venez avec moi.

Il lui fit signe de passer au salon tandis que lui allait à la salle de bain chercher ladite pommade. Il s’arrêta devant l’armoire à pharmacie, s’appuyant sur le lavabo en se regardant dans le miroir. S’il avait paru impassible – même pour lui-même – jusqu’à présent, il sentait à présent que quelque chose clochait chez cette fille. Ou plutôt, chez lui par rapport à elle. Il se passa de l’eau sur le visage, s’essuya avec la serviette et revint dans le salon avec la pommade.

- Installez-vous, finit-il par dire en indiquant le canapé.

hrp : dsl j'ai pas fait aussi bien que les autres fois.



Ce n’était l’idée de se faire masser une épaule douloureuse par un homme qui déplaisait à la jeune vampire. En d’autres circonstances elle aurait même sauté sur l’occasion… Le problème était que cet homme était pour elle un illustre inconnu qu’elle soupçonnait de nourrir des idées on ne peut moins catholiques à son égard, et que de fait, elle n’aimait pas se faire manipuler par n’importe qui. Ce fut donc un silence que Robin eut en guise de réponse. D’une démarche aérienne, d’une grande discrétion -la faute à la « déformation professionnelle »- elle se rendit dans le salon.

*La vache !!!*

En comparaison avec cette pièce, son petit F2 à moitié meublé faisait pâle figure ! Elle croyait à peine à ce qu’elle voyait… Ce mec devait avoir quoi … 25 ans au grand maximum, et il avait déjà tout ce qu’on pouvait désirer pour un salon, encore plus quand on est un homme. Outre le superbe canapé en cuire qui devait déjà couter la moitié d’un bras, les meubles étaient d’une facture impeccable. Le téléviseur, était de toute dernière génération, à l’instar de la console qui se dissimulait en dessous.
Une haute bibliothèque était presque pleine à craquer de DVD, livre et autres divertissements. Enfin le charme de la pièce lui était donné par la grande baie vitrée, fermée à cette heure, mais qui devait offrir une lumière très agréable en plein jour.

*… J’ai dut tomber sur un trafiquant de drogue …*

Ce fut la première hypothèse qui germa dans un coin de sa tête, alors que son regarde glissait avec envi sur les accessoires de cette pièce. D’un mouvement discret elle vérifia qu’elle avait toujours son couteau à lame rétractable rangé dans sa poche gauche. On ne sait jamais !

*Ou un fils de riche …*


Elle manqua de peu de sursauter. Une nouvelle fois, c’est avec une grande discrétion qu’il s’était approché. Sans se faire prier plus longtemps, elle s’exécuta. Le cuir grinça un peu lorsqu’elle prit place. Une fois assise elle se rendit compte à quel point son corps était épuisée et cassée de partout. Ses muscles tiraient et gémissait, et ses articulations se plaignaient encore des efforts que Nelïya avait exigé d’eux. Il s’en fallut de peu pour qu’elle ne s’allonge pas et sombre dans le sommeil sur le coup. Alors qu’elle le vit s’approcher, elle le stoppa dans son élan.

-Je peux le faire vous savez… Il me reste une deuxième épaule valide.

Qu’il la trouve pudique ou coincée, elle n’en avait rien à faire. Son épaule restait son épaule, et c’était elle de choisir qui pouvait la toucher. Elle tendit alors la main pour qui lui remette la pommade.

En sortant de la salle de bain, il s’arrêta pour observer l’inconnue. Elle regardait autour d’elle, apparemment impressionnée par le salon. Étrangement, cela tira un sourire à Bob qui appréciait l’idée qu’elle se plaise chez lui.

*…Quoi ?*

Bob cligna plusieurs fois des yeux, baissant la tête et portant sa main à son front. À quoi pensait-il ? Une fois la pommade appliquée, elle attendrait que la police parte et s’en irait aussi. Puis il n’entendrait plus parler d’elle. Il releva les yeux vers elle. Non, ce n’était pas la plus belle qu’il ait vu, il ne fallait pas se mentir. Mais quelque chose dans son regard, dans ses manières, dans sa voix le…
Il s’arrêta là, ça ne servait à rien d’aller plus loin dans sa réflexion. Elle partirait très vite, et il n’entendrait plus parler d’elle. Et c’était mieux ainsi.

Elle tâta quelque chose dans sa poche, ce qui n’échappa pas aux sens de l’hybride. A en juger par la méfiance qu’il sentait chez elle, elle devait vérifier si elle aurait de quoi se défendre au cas où il tente quelque chose contre lui. A en voir la taille de la poche, il avait une vague idée de ce que ça pouvait être. De toute façon, elle n’aurait pas besoin de l’utiliser contre lui, alors il ne s’en fit pas d’avantage.

Il la surprit, c’était évident. Elle s’installa sur le canapé, et Bob, voyant ça, crut qu’il avait été fait pour elle. Il était des personnes, comme son père, qui visuellement n’allaient pas du tout avec le décor de cet appartement. Mais elle, c’était comme si c’était chez elle. Une fois de plus, il chassa rapidement cette pensée.

« Je peux le faire vous savez… Il me reste une deuxième épaule valide. »

Il observa quelques secondes la main qu’elle tendait. Ça la gênait qu’un homme lui mette de la pommade ? Ou peut-être était-ce le fait qu’il fut un inconnu. Enfin peu importait. Il lui laissa la pommade.

C’est alors qu’on frappa à la porte. Il alla la porte en se demandant qui pouvait sonner à cette heure, tout en ayant une vague idée du « qui ».

« Bonsoir monsieur. Police. Excusez-nous de vous déranger à une heure si tardive, mais nous sommes ici à propos d’un vol. Le voleur aurait été aperçu dans le coin. Auriez-vous vu quelque chose ? »

Bob se retint de regarder vers l’inconnue. C’était forcément elle qu’ils cherchaient. Il fit mine de chercher dans sa mémoire alors qu’il pesait le pour et le contre de la dénoncer ou non. S’il l’aidait, il serait complice. Et il ne lui devait rien. Il posa à nouveau son regard sur les agents.

- Hmm… non. Je suis désolé, je n’ai rien remarqué. En même temps, je ne fais pas vraiment attention aux gens, vous savez…

Il se rendait compte qu’il devrait avoir honte de mentir aussi facilement, surtout à un policier, mais il n’arrivait pas à se résigner à la dénoncer ainsi. Heureusement, le policier ne sembla pas imaginer une seule minute qu’il mentait.

« Je vois. Merci quand même. Bonne soirée. »

L’autre agent sonnait déjà à la porte d’à côté. S’ils sonnaient chez tout le monde aux alentours, ils ne risquaient pas de partir avant quelques temps.

Il referma la porte et s’adossa dessus en regardant longuement l’inconnue. Il était impossible qu’elle n’ait pas entendu.

- … Vous voulez passer la nuit ici ?

Il n’y avait aucune trace de plaisanterie dans sa voix ou son expression. Il était tout ce qu’il y avait de plus sérieux. Il ferma la porte à clé, tout en laissant le trousseau dans la serrure pour montrer à l’inconnue qu’il ne la retenait pas prisonnière et retourna la voir.

- Si vous restez je ferais mieux de me présenter : je m’appelle Robin, mais vous pouvez m’appeler Bob. Ou Bobby. Ou Rob, ou Robbie enfin comme vous voulez.

Après un petit laps de temps, il ajouta.

- Je suppose que vous ne voudrez pas me donner votre nom…

C’était une sorte d’incitation masquée à ce qu’elle se présente. Mais au moins, il se sentirait moins ridicule si elle ne se présentait pas que si il avait demandé « Et vous, quel est votre nom ? ».

Pendant un court instant, leurs regards se sondèrent. Il essayait visiblement de cerner l’attitude la jeune femme aux réactions farouche, alors qu’elle-même dressait tous ses remparts l’empêchant d’accéder à ses réponses. Comme deux chiens de faïence ils s’étudièrent en silence. Puis, d’un geste résigné, il lui remit la pommade.

-Merci … Si elle n’avait rien laissé paraître de son soulagement, il n’en était pas moins existant. Elle avait craint qu’il se montre moins « coopératif », et qu’il commence à lui exposer les raisons qui expliquaient pourquoi il ferait mieux de le faire. Mais ce ne fut en rien le cas. Et cette simple chose la remit en confiance.

Elle ôta le bouchon du tube, et tira sur sa manche pour dénudera comme elle le pouvait son articulation meurtrie. D’un effleurement, elle repéra la zone la plus douloureuse. Puis, alors que d’une main couverte de crème elle s’apprêtait à commencer son massage, la sonnerie retenti.

Son geste resta en suspend, alors elle fit rouler son regard pour le braquer sur le jeune homme. Attendait-il quelqu’un ? A moins que … Avait-il prévenu la police pendant le court laps de temps où elle l’avait perdu en visuel ? La vague confiance qui s’était rependue en elle un seconde plus tôt s’effondra comme un vulgaire soufflé.

Il ne lui restait plus qu’à observer le dos du jeune home qui s’éloigner pour ouvrir la porte.
Les battements de son cœur après s’être suspendus, venaient de reprendre une cadence folle. C’était une voix masculine qu’elle percevait, bien qu’elle ne puise pas voir le visage de l’homme qui venait d’apparaître à la porte, elle comprit qu’il était bien de la police. Son rythm cardiaque grimpa en flèche, sa poitrine en devint douloureuse, la main toujours suspendue dans son geste. Elle attendait le verdict. La sentence.
Mais alors qu’elle entendait presque le cliquetis victorieux des menottes, le garçon répondit au policier, avec un jeu d’acteur qui aurait fait jouir les plus grands cinéastes.


Une seconde après, il refermait derrière le policier qui passait son chemin. La jeune vampire était tout simplement sidérée, quand à lui il s’était simplement adossé au mur, et avait viré ses yeux glacés sur elle.


La situation suivait un scénario improbable… Cet homme venait de mentir pour la protéger. Soit il était trop gentil, sois en manque de baise !


Une nouvelle fois, le visage de la jeune femme exprimait un incompréhension dans son était le plus pur. Sa main se posa finalement contre son épaule, et elle commença le massage d’un geste distrait, comme quelqu’un qui mâchonne un bout de stylo en cherchant une solution à un problème de mathématique particulièrement épineux.

La finesse de ses sourcils gagna en angle secs, alors elle les fronçait d’un air plus méfiant que jamais.

-Pourquoi vous faites ça ? Je n’ai rien pour vous … Pas d’argent … Rien à vous donnez … ? Pourquoi vous ne m’avez pas dénoncé ? Vous savez que c’est moi qu’ils recherchent !

Sa voix allié la méfiance et l’incompétence de sa logique à comprendre celle dudit « robin ».

Il était aussi simple de remarquer que l’inconnue était perdue que de distinguer un point noir sur un tableau blanc. Incompréhensiblement, Robin appréciait l’idée qu’il l’étonnait. Il n’avait pas envie d’être le seul dans le doute dans cette histoire… L’inconnue commença enfin à masser son épaule l’air pensive. La même expression qu’il savait avoir eu à bien des reprises plusieurs années plus tôt quand il essuyait encore les bancs des écoles en ne comprenant pas les cours. Puis ses sourcils se froncèrent.

« Pourquoi vous faites ça ? Je n’ai rien pour vous … Pas d’argent … Rien à vous donnez … ? Pourquoi vous ne m’avez pas dénoncé ? Vous savez que c’est moi qu’ils recherchent ! »

Bonne question. Il aurait rit si elle avait simplement demandé si il voulait de l’argent. La dernière chose qui lui manquait, c’était l’argent. Son père multimillionnaire accédait à chacune de ses demandes quelle qu’elle fut. Fils unique, sa belle-mère étant stérile, il hériterait totalement de la colossale fortune de son multimillionnaire de père, et ce, malgré les multiples tentatives de la vipère d’essayer de le convaincre de lui laisser l’héritage. En un coup de fil, son compte en banque déjà bien rempli pouvait se remplir encore plus. Non, il n’avait vraiment pas besoin d’argent.

Alors pourquoi faisait-il ça ? Oui, c’était vraiment une bonne question…

- Je me doutais bien que c’est vous qu’ils cherchaient. Je pourrais très bien vous répondre que, vous trouvant en train de vous appliquer de la pommade dans mon salon, ils m’auraient accusé de complicité. Ce serait une excuse parfaite pour me faire passer pour un salaud qui ne pense qu’à lui.

Il passa derrière le canapé, s’appuyant dessus, et posa son regard sur la télévision où les images du DVD en lecture continuaient de se suivre. C’était un très vieux film, un des seuls que Robin ait vu plusieurs fois. Il ne se lassait pas de le voir et le revoir. L’histoire en elle-même était certes belle, mais ce n’était pas la seule raison qu’il avait de l’apprécier.
C’était le film préféré de sa défunte mère. Et la chanson qu’elle y préférait était en train de passer… Il se prit à marmonner certains passages, ayant disparu dans ses pensées.

- …Suddenly my life doesn’t seem such a waste, it all revolves around you… Fermant doucement les yeux, il continua, toujours d’une voix presque inaudible : And there’s no mountain too high, no river too wide. Sing out this song and I’ll be there for your side…

Il s’arrêta là, rouvrant les yeux sur l’inconnue. Étrangement, il avait envie d’être à ses côtés si elle chantait cette chanson, et le fait de l’avoir aidée lui faisait penser que sa vie n’était plus aussi fugace.

*Tu perds complètement la boule, mon vieux…*

Il soupira doucement, ne la quittant pas des yeux, puis reprit la parole.

- Vous n'avez rien pour moi, mais eux, que m’auraient-ils donnés, à part le sentiment de vous avoir privée de vos ailes ? Votre silhouette, votre comportement, votre voix… Vous respirez la liberté. Vous me faites penser à un petit oiseau volant à son gré où il veut et quand il veut. La dernière de mes envies serait de le mettre en cage.

Son regard, sa voix, tout laissait comprendre sa sincérité. Il risquait gros à la cacher, mais la savoir à l’abri lui ôtait tout malaise quant à ça. S’il se faisait prendre, son père avait un avocat particulièrement doué. Et quand bien même il ne parviendrait pas à le défendre, il se sentait capable de plonger pour qu’elle conserve sa liberté.
Et cela l’effrayait un peu.

- Je ne peux pas vous forcer à me croire, à me faire confiance. Vous m’avez demandée, j’ai répondu.

Il porta une nouvelle fois son attention sur le film, puis se redressa et alla vers la cuisine.

- Vous voulez boire quelque chose ?

Le sourire amusé que la question de la jeune femme avait marqué sur le visage de Robin, ne la dérida pas le moins du monde. Au contraire, les sourcils restèrent foncés et figés dans l’expression de son incompréhension. La première excuse qu’il évoqua ne manquait pas de bon sens songea la chapardeuse. Certes, elle le faisait passer pour un salaud… Et encore, pouvait-on blâmer quelqu’un qui se protège avant de protéger la personne totalement inconnue qui l’avait mit dans –excusez l’expression- la merde ?

Ce n’était pourtant pas celle-ci qui l’avait véritablement poussé à la ne pas la dénoncer… nageant encore plus dans le vague, elle trouva le silence qu’il laissa planer inssuportable. Elle remarqua son regard glissé sur elle, pour aller caresser l’écran de sa superbe télévision… En bruit de fond, elle percevait les dialogues, sans vraiment y attacher grande importance.

…
L’expression de Nelïya passa de la méfiance à la surprise en à peine un soixantième de tour de tortueuse. Non seulement le fait de l’entendre fredonner une chanson dans sa langue maternelle, lui fit l’effet d’une douche glacée, mais de plus, sa voix se déclinait en de doux timbres harmonieux qui effleurèrent les oreilles de la jeune femme pour se faufiler droit vers son cœur.

Lentement, ses prunelles pivotèrent pour entre apercevoir les images du film. Il ne lui disait rien. Elle ne l’avait vue, mais visiblement ce DVD était un des favoris du garçon. Ce qui était réflexion faite assez étrange, car ce n’était apparemment pas un film de guerre, d’action, ou de science fiction comme la gente masculine était connue pour affectionner. Bien au contraire, il semblait plus se classer dans le style « Film à l’eau de rose », a en juger par la scène qui défilait en tons rougeoyants sur l’écran plat.
Un court instant l’un comme l’autre, furent rejeter ailleurs. Ils se trouvèrent loin de cette pièce, loin de cette soirée, le temps de deux secondes ils se retrouvèrent parmi les acteurs, en plein cœur du film. Puis …


La mâchoire de la jeune femme venait de s’ouvrir, et menaçait dangereusement de se décrocher à l’écoute de ces mots. Celle là, elle ne l’avait pas vue venir… Jamais l’on n’avait peint d’elle un tableau aussi proche de celui qu’elle voulait incarner… Pour la première fois depuis bien longtemps elle sentit ses bases trembler, sous l’effet d’un compliment gorgé d’une trop grande sincérité… Elle crue qu’il venait d’augmenter le chauffage, mais c’est avec une gêne décuplée qu’elle comprit que la chaleur qu’elle ressentait émanait de ses joues rouges pivoines. Son assurance et ses défenses éclatèrent en en mille morceaux alors qu’elle se prit non seulement à rougir, mais aussi à détourner le regard pour laisser sa chevelure retomber sur son visage. Comme si elle prier pour disparaitre.


Ridiculement sa mâchoire se mit en marche sans laisser le moindre son sortir, puis d’une voix qui trahissait son saisissement elle bégaya péniblement :

-he.. Je .. vo… te ...Un ...thé ?

Le garçon était à hauteur de la porte de la cuisine, mais elle était sûre qu’il avait assisté à la chute vertigineuse de son assurance.

*La loooooooooooooooooose !!!! C’est la honte … *

Pourtant, en elle, une délicieuse chaleur se rependait, « Vous me faites penser à un petit oiseau volant à son gré où il veut et quand il veut », ces mots marquerait son âme jusqu’à la fin de son éternité.

-J’ai rien volé … C’est parce qu’ils n’ont pas eut le temps de s’en rendre compte, mais j’ai rien piquée … J’essayais juste de voir si je serais assez rapide pour leur échapper.

Sans réellement comprendre pourquoi elle ressentait le désir incontrôlable de préciser à ce « robin » qu’elle n’était pas si mauvaise que les apparences semblaient indiquer, elle avait prononcé ses mots en essayant de rependre un peu d’assurance.

Un lueur de surprise, voire d’inquiétude pointa dans le regard du jeune homme quand il vit la réaction de l’inconnue à sa réponse. La bouche ouverte, puis le rose… Non. Le rouge lui montait aux joues. La surprise chez lui fit alors place à… Il ne savait pas vraiment ce que c’était. Il la trouvait assez mignonne gênée, et le fait qu’elle détourne le regard, et se cache derrière ses cheveux ne faisait qu’accentuer cette constatation. Il alla alors à la cuisine le sourire aux lèvres, et demanda, se retournant vers elle arrivé à la porte, si elle voulait boire quelque chose. Il se rendit alors compte d’à quel point sa réponse avait dû la surprendre. C’était comme si on avait coupé le son. On voyait la bouche bouger, mais aucun son n’en sortait. Du moins, pas tout de suite.

« he.. Je .. vo… te ...Un ...thé ? »

C’en aurait été amusant s’il avait eu envie de se moquer d’elle. Il aurait vraiment pu comparer ça à la télévision. Un problème d’antenne donnant le son en retard, et de très mauvaise qualité. Bob était habitué à ce que les filles perdent contenance devant lui. Il avait fini par s’en amuser. Mais pour elle, ce ne devait pas être par rapport à son physique, sinon, elle n’aurait pas été si sûre d’elle jusqu’à présent. Le fait qu’il ait pu la troubler par ses mots ou ses gestes lui faisait plaisir. Un sourire gentil se forma sur ses lèvres en l’observant.

- Un thé, très bien. Je vous fais ça.

Il se retourna pour entrer dans la cuisine et passa derrière le bar. Allumant la plaque chauffante, il rempli une casserole d’eau avant de la poser dessus. Il se mit alors en quête de thé. Il était évident qu’il en avait. Son père venait tout le temps avec quelque chose, et il se souvenait bien l’avoir accueillit un jour avec une boîte pleine de différents thés dans les bras. Ne restait plus qu’à la retrouver.

« J’ai rien volé … C’est parce qu’ils n’ont pas eut le temps de s’en rendre compte, mais j’ai rien piquée … J’essayais juste de voir si je serais assez rapide pour leur échapper. »

Il arrêta sa recherche en l’entendant, et se tourna vers elle. Il la regarda l’air grave, le temps d’assimiler l’information. Était-ce simplement un défi qu’elle s’était lancée ? Les conséquences auraient été bien graves si elle s’était fait prendre. Alors pourquoi ? Pourquoi ce besoin de savoir si elle pouvait leur échapper ?

*Arrêtes, ça te regarde pas.*

Il sourit alors, pour lui assurer qu’il la croyait.

- Je ne vous demande pas de vous justifier, vous savez. La vérité c’est que ce que vous avez fait m’importe peu. Je… je suis assez heureux que vous soyez ici.

Il se sentait ridicule. « Je suis assez heureux que vous soyez ici ». Ça ne rimait absolument à rien !

*Bob tu n’es vraiment qu’un abruti…*

Pour cacher sa gêne quant à ce qu’il venait de dire, il se retourna pour chercher à nouveau le thé. Scrutant chaque placard un par un, il réussit enfin à retrouver la boîte, qui était plus grande qu’à son souvenir. Et le plus étonnant, c’était qu’elle semblait pleine. Après avoir fermé le placard et posé la boite sur le bar, il l’ouvrit, et dit à haute voix pour qu’elle puisse entendre :

- Voyons voir ça. Menthe, citron, pêche, fruits rouges… fraises des bois… abricot… fruit de la passion… noix de coco ?!

*Bon sang, c’est quoi tous ces arômes !?*

Sa surprise était allée croissante au fur et à mesure qu’il citait les noms sur les sachets, mais la noix de coco l’avait complètement ahuri. Lui qui ne connaissait que le thé à la menthe et au citron…

- Alors euh… Un de ceux que je vous ai proposé vous intéresse ?

Il avait toujours les yeux rivés sur le contenu de la boite, continuant de fouiller dedans. Il ne cessait de trouver de nouveaux arômes. Avec un soupir, il arrêta le feu et apporta la boite de thés.

- Tenez. Le plus simple est encore que vous en choisissiez un parmi tous ceux-là.

Il retourna alors à la cuisine, sortit deux tasses qu’il remplit avec l’eau chaude et les ramena au salon. Il posa l’une des tasses devant son invitée, gardant l’autre pour lui. Il se pencha alors au dessus de la boite de thés, et, piqué dans sa curiosité, se saisit d’un des thés à la noix de coco qu’il plongea dans sa tasse. Il pensa alors à aller chercher des petites cuillers et du sucre qu’il tendit avec un sourire à l’inconnue si elle en voulait.

L’épaule de Nelïya lui faisait toujours un peu mal. La pommade n’aurait pas un effet immédiat, elle le savait bien. Essayant d’oublier le ridicule qui venait de lui embraser les joues de pourpre, elle fit faire quelques rotations à son articulation douloureuse. D’ici quelques jours ça ne serait plus rien ….

Son regard s’égara sur le téléviseur. Le film était bel et bien un film d’amour. Etrange pour un mec de regarder ce genre de film.


Une nouvelle fois, il ne manqua pas de la surprendre par ses paroles. Il se fichait donc de savoir qu’elle pouvait être une voleuse, une tueuse, ou une psychopathe ?! Et puis « je suis assez heureux que vous soyez ici », ça voulait dire quoi ? Ils se connaissaient à peine, comment pouvait-il se réjouir de sa compagnie ? Etait-il si seul que ça ? C’est vrai qu’à y réfléchir, elle n’avait pas vue d’affaires pouvant appartenir à quelqu’un d’autre que lui… Plongée dans ses réflexions, elle n’entendit pas la liste astronomique des arômes qu’il avait à lui proposer. Heureusement, il réapparut bientôt avec la boite contenant toute les variétés sous le bras.
Elle y jeta un coup d’œil curieux, fut surprise de voir qu’il possédait autant de parfum, et décida d’en prendre un à la menthe. Ils avaient tendu la main en même temps pour piocher dans la boite, mais elle avait suspendu son geste pour éviter le contact.

Que faisait-elle là, en compagnie d’un homme, en pleine nuit, à boire du thé ? Décidément, les situations courantes et banales ne semblaient pas être son truc.

Sa réflexion se contorsionnait toujours pour essayer de comprendre pourquoi il lui avait dit qu’il était content de la voir. D’un geste distrait elle plongea le sachet de thé dans sa tasse, et perdit son regard sur les images du film. « Robin »… Qui était-il ? Pourquoi une telle attitude ? A moins que …

-Vous êtes gay ?

La question avait franchit ses lèvres en même temps qu’elle avait germé dans sa tête. Elle s’en rendit compte et ajouta précipitamment.

-heu je ne demande pas ça par ce que vous êtes maniéré ou pour mettre votre virilité en doute … c’est juste que … Vous êtes serviable, pas moche, riche, sympa, et que j’ai vue aucune petite culotte trainer sur le lit, ou de sous tif pendre d’un tiroir, et en plus vous regardez un film d’amour. Et … Je trouve ça louche…

Elle maudissait sa curiosité qui l’avait poussé à poser la question aussi abruptement. Elle détourna le regard pour le fixé sur sa tasse. Elle ignorait comment il allait prendre sa question, car elle-même ne savait pas trop pourquoi elle l’avait posé.

Alors qu’il allait prendre le thé à la noix de coco, l’inconnue tendit elle aussi la main. Avant qu’il n’ait pu faire quoi que ce soit, elle s’arrêta, comme si toucher sa main aurait pu la contaminer de quelque manière que ce soit. Il eut un moment d’hésitation, se demandant s’il devait la laisser prendre en première ou non. Pas qu’il réfléchissait à s’il devait être poli, plutôt qu’il se demandait si elle allait en prendre avant lui. Le fait qu’elle n’ait pas l’air d’en avoir l’intention le força à se servir en premier. Il plongea le sachet dans sa tasse, et appuya dessus avec la cuiller. Il avait toujours fait ça alors que son père lui disait d’être patient. Mais la patience, pour Bob, ça ne signifiait pas grand-chose. Au mieux, ce qui s’en rapprochait le plus chez lui, c’était la flemme.

« Vous êtes gay ? »

Bob écarquilla les yeux en regardant ailleurs, de préférence vers le bas à droite, en se penchant vers l’avant. Non pas qu’il y avait quelque chose d’intéressant à y voir, juste que c’était sa manière à lui de réagir à ce genre de choses. S’il avait commencé à boire, il aurait tout recraché sur la table, mais la suite aurait été la même.

« heu je ne demande pas ça par ce que vous êtes maniéré ou pour mettre votre virilité en doute … c’est juste que … Vous êtes serviable, pas moche, riche, sympa, et que j’ai vue aucune petite culotte trainer sur le lit, ou de sous tif pendre d’un tiroir, et en plus vous regardez un film d’amour. Et … Je trouve ça louche… »

Bob se sentit un peu mieux. L’espace d’une seconde, il avait cru qu’elle disait ça pour ses gestes ou son physique. Remarquez, elle en avait parlé, des gestes et du physique. Il releva les yeux vers elle, un petit sourire naissant sur ses lèvres. Serviable, pas moche, sympa… Bon, elle avait dit riche aussi, mais ça, ce n’était pas vraiment sa faute… Enfin faute, façon de parler.

- Non, je ne suis pas gay, fit-il après s’être raclé la gorge. Pour l’absence de petites culottes ou de sous tif, je n’ai pas vraiment l’habitude de recevoir de visites. Pour le fait d’être serviable, j’ai été élevé comme ça…

Mouais. Il avait surtout élevé pour obéir au doigt et à l’œil à la femme de son père, et il en gardait quelques vestiges. Comme quoi, il n’y avait pas que du mauvais dans ce genre d’éducation.

- Sympa… Très franchement je ne vois pas quoi répondre à part « si vous le dites », désolé… Pas moche… il lui adressa un petit sourire un peu gêné. Hum… Merci. Je dois avouer que je vous trouve très belle, vous aussi. Quant au film…

Là, son visage fut vidé de toute expression, et il tourna lentement la tête vers la télévision. Il regardait, et en même temps il était ailleurs. C’était comme s’il regardait dans le vide tout en voyant très bien les images qui défilaient.
Il se gratta l’arrière de la tête, se forçant à sourire en regardant à nouveau l’inconnue.

- En fait, c’était le film préféré de ma mère. Quand je le regarde, j’ai parfois l’impression qu’elle est avec moi.

Même si son sourire était, il fallait l’admettre, très bien fait, il était impossible de le croire sincère. Sa voix, qui avait légèrement tremblé sur la fin de phrase, ses yeux qui s’étaient fermés pour cacher le triste regard qui pointait à chaque fois qu’il parlait d’elle, sa tête légèrement baissée, rien n’aidait ce faux sourire à paraitre vrai. À part peut-être une seule chose, mais invisible à l’œil nu : l’envie d’y croire. Même en sachant pertinemment que ce n’était qu’un masque, Bob avait envie de se dire qu’il était réel, et que l’absence de sa mère ne l’affectait pas autant.

Puis, son sourire s’effaça, il rouvrit les yeux et dévisagea son invitée.

- Si vous ne me donnez pas votre vrai nom, dites-moi au moins comment je peux vous appeler… ?

C’était une manière assez médiocre de changer de sujet, certes, mais ça réglait deux problèmes : déjà ça permettrait d’arrêter de parler de sa mère, et aussi qu’il puisse l’identifier par une autre appellation que « l’inconnue », « son invitée », ou « la belle jeune femme en noir »…

Le regard de la jeune femme se forçait à ne pas laisser paraître le certain mal aise qu’elle ressentait aux suites de sa question, ho combien indiscrète.
Robin, à sa surprise ce mit à sourire, au lieu de s’offusquer. Avait-elle tapé dans le mille ?


Apparemment non.


Bien élevé alors … Et solitaire ? Pourtant avec un physique comme le sien, il aurait pu se permettre de draguer à tire de bras… Mais elle comprendrait plus tard, que celui qu’elle avait prit pour un beau gosse riche, était bien plus que ça. Qu’il se dessinait en réalité sous une couche d’assurance, pour mieux dissimuler une sensibilité discrète que peu d’homme se permettait à montrer…


Qu’on lui fasse des compliments était rare, qu’un homme s’attarde sur son physique l’était encore plus. « Très belle ». Pourquoi pas « belle » tout court… Elle savait que ce compliment aurait dut flatter son ego, mais la réalité était qu’être belle ne lui importait plus. A quoi bon, un visage advenant, pour un cœur qui gagnait en froideur un peu plus chaque jours ? Cette beauté n’était que tricherie. Elle avait la jeunesse éternelle de son côté, piégée là ou la peau d’une femme perd en acné sans gagner en ride… Suspendue dans l’apogée de sa beauté enfantine, là ou le charme d’une femme n’est encore qu’un bourgeon.
Mais pourquoi ? Pour qui ?

Pour rien. La solitude se devait d’être son unique amour.

Alors, elle prenait peut soin de son apparence. Les miroirs étaient devenus ennemis, et son visage trop familier, jour après jour.
Mais ce soir, il était vrai que la tenue noire devait la mettre plus en valeur que les jeans trouvés et les pulls étirés qu’elle portait en journée. Alors peut être que oui, ce soir elle « était très belle », mais elle ne s’attarda pas sur le compliment et heureusement il lui donna matière à réflexion…



Ce fut à ce moment que quelque chose en elle se modifia, qu’une couche de glace se fissura. Elle avait cherché avec tellement de force une raison de se méfier de lui, que le sourire las et triste qui lui servit, la désarçonna avec violence. L’espace d’un instant, elle avait vue au détour de ses prunelles, le vide. Le vide accouplé à la douleur qu’il avait fait naître.
La culpabilité la fit détourner les yeux. Elle se sentait de trop, assise là, arrivé au mauvais moment, un cheveu sur la soupe. Elle avait l’impression d’avoir violé son intimité par son arrivée, et ses questions bourrues.


Le changement de sujet, bien qu’il déviait sur elle, était le bienvenu. Il la dévisageait sans détours en posant cette question, et elle soutint son regard avec un peu moins défis.
Elle réfléchissait à ce qu’elle pouvait répondre à ça. Triturant sa lèvre inferieur entre ses dents, elle finit par baisser une deuxième barrière.

-Vous pouvez m’appeler Fox … Robin.

Ses lèvres esquissèrent un fantôme de sourire, puis elle posa sa tasse, et brisa le contact visuel en se redressant avec vivacité. Etait-elle sur le départ ?

Ses doigts fins firent glisser la fermeture éclaire de sa veste, qu’elle ôta d’un mouvement d’épaule efficace. Il faisait chaud, ici, plus que dehors. Cette couche, lui tiendrait plus chaud qu’autre chose. Elle se retrouvait en simple sous pull à col roulé, noir.
-Je peux poser mes affaires où ? Demanda-t-elle d’une vois ou pointait peut être un peu de timidité.

Cette femme avait quelque chose d’étrange. Là où la plupart des femmes qu’il complimentait par politesse ne se sentaient plus, et, il les entendait, s’enhardissaient discrètement auprès de leurs amies d’avoir eut un compliment de sa part, elle, qu’il avait sincèrement désigné comme très belle, ne semblait pas y faire attention. Un peu comme… lui. Sauf que lui faisait toujours mine d’être touché, se cachant derrière son hypocrisie. Bien sûr qu’il savait qu’il était beau. Mais qu’est-ce que ça lui apportait, au fond ? Le « plaisir » d’être abordé par des femmes superficielles, et rendre celles qui pourraient être intéressantes bien trop gênée, impressionnées ou mal à l’aise pour oser l’aborder, et leur faire perdre leurs moyens en faisant le premier pas. Non, vraiment, c’en était presque un fardeau.
Elle, n’avait ni l’air superficielle, ni gênée par rapport à lui…

Quand il parla de sa mère, elle détourna les yeux. Il savait qu’elle ne se sentait plus à l’aise d’avoir posé cette question. C’était toujours le cas. La culpabilité, le fait de penser qu’elle n’aurait pas dû en parler, tout ce genre de choses. C’était toujours pareil…
Et c’était aussi ce qui lui avait fait changer de sujet.

« Vous pouvez m’appeler Fox … Robin. »

Fox… Qu’est-ce que ça pouvait bien être ? Un surnom ? La renarde ? Il répéta mentalement ce très court nom quelques fois. Fox… Elle aurait aussi pu s’appeler Bird… Ou Free…

- Enchanté… Fox, dit-il en esquissant un sourire.

Il eut juste le temps de remarquer ce qui ressemblait à un sourire avant qu’elle ne pose sa tasse et se redresse. Avait-il fait quelque chose de mal ? Avait-elle décidé qu’elle était assez restée ? Pensait-elle que la police était déjà partie ? C’est en fait cette question qui lui avait fait reposer les pieds sur terre. Il ne devait pas oublier qu’elle était recherchée, tout de même. Pas qu’il y accordait une très grande importance, mais il devait prendre en compte qu’elle n’était pas aussi parfaite qu’elle en avait l’air.
Il fut soulagé de la voir uniquement retirer sa veste. S’il n’avait pas complètement perdu l’esprit, une personne qui se dévêtit ne présageait généralement pas un départ.

« Je peux poser mes affaires où ? »

L’intonation de la voix était un pur plaisir pour ses oreilles et lui tira un sourire. Il posa sa tasse et se leva pour tendre la main vers sa veste afin qu’elle la lui donne.

- Je vais accrocher votre veste. Pour votre sac, vous pouvez le laisser derrière le canapé, ou le poser là-bas.

Sur ces derniers mots, il avait pointé le mur sous la baie vitrée, pas loin du canapé. Puis, jugeant que si elle parlait de poser ses affaires, elle envisageait de rester la nuit, il poursuivit :

- Dormir sur le canapé vous ira ? D’après mon père, il est très confortable dès lors qu’on ne bouge pas trop pour ne pas tomber. Et comme c’est un grand amateur de literie, je le crois sur parole.

Son regard retomba sur la télévision, où passait une des chansons qu’il préférait personnellement du film, trouvant que les acteurs chantaient très bien, et que les deux textes différents chantés en même temps se complétaient bien. Il en connaissait par cœur l’introduction à présent, tout comme les paroles. Mais bien qu’il les savait par cœur, il ne comprenait pas vraiment ce que ça représentait.

« Why does my heart cry ? Feelings I can’t fight. You’re free to leave me but just don’t deceive me and please believe me when I say I love you. »

Un parfait charabia pour lui. Il comprenait que cette chanson parlait de jalousie, mais ne ressentait pas ce sentiment de mal aise que ressentait sa mère devant ce passage quand elle le regardait quelques décennies auparavant. Après tout, pour comprendre la jalousie, il fallait connaître l’amour…

Rester là ce soir, avait séduit Nelïya. Les raisons de cette tentation lui échappaient pourtant… Etait ce pour goûter, l’espace d’un soir, à la vie d’un une femme qui avait à porté de main tout ce qu’elle pouvait désirer : de l’écran plat jusqu’au un bel homme. Etait ce pour fuir la misère de son propre logement ? Pourtant, elle l’aimait bien son petit F2. Son premier chez soi depuis tellement d’années … Etait ce pour s’abandonner au sentment de sécurité que ces lieux éveillaient en elle ?

Quoi qu’il en soir la perspective d’affronter le froid, la police et la distance pour rentrer à son logis lui semblait insurmontable. Elle voulait rester là ce soir. Gommer sa solitude, l’oublier, discuter avec cet homme. Dormir chez lui. Partager son chez-soi, comme s’ils étaient amis… Ou plus ?


Sans se montrer farouche, elle lui tendit sa veste, et la lui laissa avec confiance.
Son regard courra une nouvelle fois sur la pièce, comme pour y étudier les éléments qu’elle aurait loupés au premier coup d’œil Mais inlassablement, il retomba sur Robin.

Au fond d’elle, quelque chose lui murmurait d’abuser de la situation. Après tout, ne l’avait-il pas qualifié de « très » belle ? Lui résisterait si elle se pendait à ses lèvres, s’accrochait à sa peau, lui offrait son corps, au creux d’une nuit de désir inassouvie depuis trop longtemps ? Peut être en avait-il autant envie qu’elle : De conjuguer leur solitude le temps d’une lune.

Ne serait-elle pas folle de ne pas sauter sur l’occasion ?De pouvoir enfin combler son mal d’affection ? Une nuit. Juste une nuit, laisser la morale de côté, et dérober au bellâtre son attention, sa chaleur, sa sueur, pour assouvir ses désirs refoulés, et disparaître, au soleil levant comme elle savait si bien le faire…

Une lassitude profonde, et un dégout d’elle-même lui remit les idées en place. Voilà donc à quoi elle en était réduite ? A vouloir utiliser des hommes comme des objets, sous prétexte qu’elle ne pouvait pas s’engager ?
Il y avait eut tellement de nuit sans lendemain et tellement de matins au gout amère, de parfum masculin qui ne lui appartenait pas, gravé sur sa peau, comme la marque de son pêché. Combien de fois ne s’était elle pas sentit salit par ses nuits sans amour ? A bien y songé, le plus pitoyable, est qu’elle avait toujours formulé le vœu que ses nuits ne soient pas uniquement du sexe, mais qu’elles laissent placent aux sentiments.

L’attachement, comme l’amour n’était pas fait pour les vampires. Nelïya avait payé de son humanité l’affection d’un vampire, et s’était juré de ne jamais reproduire sur autrui ce qu’elle avait subit.

Ses nuits serraient toujours sans lendemains. Ainsi soit-il, et elle n’avait qu’à s’y résoudre.

Mais ce soir, elle ne pouvait pas se permettre d’abuser de la sorte. Après tout, elle avait une dette envers lui…



-Ce sera parfait ! Répondit-elle avec enthousiasme. Elle qui avait déjà connu la dureté du bitume, l’inconfort des ponts, les maux de dos causé par des matelas à bas prix, ce canapé ressemblait à un nuage moelleux dans lequel elle pourrait en tout confort se donner à Morphée.

Robin s’empara du manteau avec un sourire rassurant, lui laissant savoir qu’il en prendrait soin, comme s’il allait le garder pendant des heures, où l’emmener dans un endroit périlleux. Il la laissa à nouveau détailler la pièce alors qu’il allait accrocher le vêtement à côté de la porte. Il sentait le regard de Fox à nouveau sur lui, et son odeur sur le manteau envahissait ses narines. Il profita d’être de dos pour fermer les yeux et profiter de cet agréable parfum qu’était le sien, tout en savourant le plaisir d’avoir son attention. Avec une lenteur pas vraiment calculée, il laissa le manteau pendre au porte-manteau, et se retourna pour la regarder lui aussi. Un sentiment étrange l’attirait vers elle. Ce sentiment dont l’embryon l’avait poussé à s’inquiéter qu’elle ne se soit pas fait mal en entrant chez lui. Celui qui avait participé à son refus de la dénoncer à la police. Celui qui lui donnait une incontrôlable envie de s’approcher d’elle, tout près. Cette envie qui le prenait le força à s’approcher, sans la quitter des yeux. Des pensées, ou plutôt des envies, se faisaient voir dans sa tête sous forme de flashs. Il voyait leurs baisers, leurs caresses, allant jusqu’à ressentir une idée du bien-être qui en ressortirait.

Mais il ne laissa rien paraître de tout ça. Il s’arrêta à quelques pas d’elles et hésita à revenir sur sa décision de lui avoir proposé de dormir sur le canapé. Il n’était pas vraiment du genre à demander ouvertement à n’importe qui de dormir avec lui, mais les mots commençaient à lui brûler les lèvres qu’il tenait fermées pour ne pas faillir. Il ne pouvait pas, ne devait pas lui en parler. C’était trop tôt, et ils ne se reverraient plus. D’un autre côté, s’ils ne se revoyaient pas, il devait peut-être en profiter maintenant…

« Ce sera parfait ! »

Il hocha simplement la tête pour signifier son soi-disant accord. A en voir son enthousiasme à dormir sur le canapé, il se convainquit de se taire, même si le débat intérieur continuait. Robin, lui était incroyablement calme. Rien ne laissait paraître cette agitation qui le prenait à l’intérieur, la pesée du pour et du contre. D’un côté, il aurait aimé profiter pour une fois de ce que certains voyaient comme un don de la nature. De l’autre, cette Fox était tellement différente des autres qu’il n’était même pas sûr que cela marche avec elle. Il se voyait oser, l’embrasser, et se faire repousser. Que ferait-elle ensuite ? Est-ce qu’elle s’en irait ? Cette pensée lui fit mal. Il se sentait bien en sa présence, et n’avait aucune envie de la laisser partir. D’un autre côté, il lui avait dit qu’il ne désirait pas le moins du monde la priver de ses ailes. La retenir ne ferait que le faire se contredire lui-même, et passer pour un menteur.

Seul signe extérieur de ce débat intérieur, son regard mêlé à son immobilité. Le regard plein de désir laissant voir son envie de la garder avec lui, et son immobilité son refus de lui imposer quoi que ce soit.

Qu’il était compliqué d’être Robin Mauniet, à ce moment-là…

Il commençait à se faire tard. Robin lui souhaiterait sûrement une bonne nuit très rapidement, éteindrait le DVD qui touchait bientôt à sa fin, et irait se coucher. Il penserait avec certitude à celle que seul un mur et quelques mètres la séparaient de lui, et ce jusqu’à ce que le sommeil lui vienne, ce qui ne devrait pas se faire bien vite.

Il ferma les yeux, baissa légèrement la tête, et accompagna comme tout à l’heure la chanson qui passait derrière lui, le cœur qu’il mettait dans ces paroles se ressentant étrangement bien.

- Never knew I could feel like this. It’s like I’ve never seen the sky before. I want to vanish inside your kiss, every day I’m loving you more and more… Listen to my heart, can you heart it sing ? Come back to me and forgive everything… Seasons may change, winter to spring…

Les trois mots qui suivirent menaçaient de faire beaucoup de dégâts s’il les prononçait. Ainsi, il n’en fit rien. Il entendait la voix de sa mère le dire, et, ses yeux fermés, il voyait le premier baiser de ses parents, s’étant passé exactement devant cette scène.

Nelïya se passa la langue sur les lèvres d'un tic nerveux. Le silence planait, et ce n'était pas bon pour elle. Ne pas pouvoir se concentrer sur une conversation l'empêchait de ne pas faire glisser ses idées vers le garçon. Celui-ci d'ailleurs ne lui facilitait pas la tâche non plus… Pas idée d'être si sexy aussi !
Et le voilà qui restait statique, comme si il attendrait quelque chose, ou plutôt quelqu'un. Elle.
Quand à son regard n'en parlons pas. Elle détourna les yeux pour s'y décrocher… Après tout, elle n'était pas une fille facile. Lui bondir dessus comme ses hormones lui dictaient de faire, serait la confondre avec les autres femmes qui étaient passées avant. Car soyons honnête, il avait prétendu ne pas avoir l'habitude de compagnie, elle aurait pourtant donné sa main à couper qu'elle n'avait pas assez de doigts pour compter les femmes qu'il avait séduit rien que cette année !

*Nel, soit forte …*

Never knew I could feel like this. It’s like I’ve never seen the sky before. I want to vanish inside your kiss, every day I’m loving you more and more… Listen to my heart, can you heart it sing ? Come back to me and forgive everything… Seasons may change, winter to spring…

Une nouvelle fois, elle se sentit vibrer au son de son chant. Ok, la chanson était carrément niaise, en sucre et en rose, n'empêche qu'il la chantait vachement bien… Des mots qu'il semblait dire plus pour lui-même que pour suivre la chanson.
Ces mots, elle avait renoncé à les entendre un jour. Cette guimauve n'était pas pour elle, elle ne l'avait jamais été, même du temps de son humanité elle n'avait pas le souvenir de s'être attendrit devant tant de niaiserie et publicité mensongère…
Ce film l'aurait surement gavée avant la fin. Elle n'y voyait qu'une exagération grotesque de la réalité… Comme si les histoires d'amours pouvaient se dérouler comme ça !

L'amour ? Pffff, elle n'en avait eut que des démonstrations à vous faire passer l'envi d'être aimé… Quand elle ce n'était pas sa mère qui retenait son père par un chantage affectif odieux, c'était son meilleur ami qui tombait amoureux d'elle, et qui la vampirisait pour mieux la posséder. Voilà son expérience de l'amour. Ce qu'elle en retenait ? Ce n'était qu'un sentiment égoïste qui visait à assouvir son propre bonheur au profit de l'autre.

-Vous chantez remarquablement bien… Remarqua-t-elle, alors qu'il ouvrait les yeux lentement, elle lui offrait ce compliment un sourire en coin. L'espace d'un instant, leurs regards ce croisèrent, et la jeune femme cru perdre le contrôle d'elle-même.
Elle désirait ce regard, cette attention qu'il fixait sur lui. Elle voulait être la seule pour lui, l'espace d'une nuit, et s'approprier ce qu'il avait à lui offrir… Ses jambes la précédèrent et bientôt elle était plantée face à lui, son regard dans le sien avec une intensité vibrante… légèrement plus petite que lui, elle devait pencher la tête pour ne rien louper de son visage, et son regard d'ambre, le dévorait sans discrétion… Et puis brutalement, elle brisa le contact visuel, et se décala de lui.

-Robin, vous fumez ? Enfin je veux dire vous avez des cigarettes…

Ok, elle s'était fait l'engagement d'arrêter la clope, mais là, il fallait qu'elle s'en grille une sinon c'était lui qu'elle allait se griller ! Elle affichait péniblement un air dégagé.

-Enfin si ça ne vous derange pas que je fume à la fenêtre.

*c'est ça bonne idée je puerais la clope après, il voudra plus me toucher \o/*

Bien qu'elle essayait de ressentir une once d'enthousiasme à cette idée, elle ne s'en retrouva que plus frustrée...

Robin leva imperceptiblement un sourcil en la voyant se passer la langue sur les lèvres. Qu’est-ce que ce geste signifiait pour elle ? A sa connaissance, on faisait ça devant de la nourriture dans les dessins animés, à la limite en ayant les lèvres sèches, ou… Mais pourquoi essayait-il de tout comprendre chez elle ? Pourquoi ne la laissait-il pas simplement se reposer ? Il n’était pas un papa poule pour vouloir tout savoir de cette fille. Même si, en l’occurrence, ce serait un papa hibou, là…

Mais ce qu’il ne pouvait pas rater, c’était sa manière de fuir son regard. Le grand-duc avait une vague idée du pourquoi, puisqu’il avait lui-même inconsciemment laissé paraître ça, pour la tenter. C’était une manière de la forcer à faire le premier pas.
Mais si elle était si gênée par son regard, il ferait mieux de ne plus l’afficher. C’est aussi une des raisons qui l’avait fait fermer les yeux.

Il sentait à peine les mots se former dans sa gorge, comme s’ils venaient de plus loin, qu’il ne faisaient qu’y passer. Les mots, puis les phrases s’écoulaient avec la tranquillité d’un ruisseau à l’eau claire, à la surface à peine déformée par le courant. Il n’entendait même plus les voix des chanteurs, étant remplacée dans sa tête par la sienne et celle de sa mère. Un comble, quand on n’a jamais vraiment entendu la voix d’une personne, n’est-ce pas ? Pourtant, à partir de la voix des enregistrements et vidéos qu’il avait, et qu’il gardait bien cachés dans un dossier dans son ordinateur portable, il arrivait à la reconstituer parfaitement.

« Vous chantez remarquablement bien… »

Il rouvrit lentement les yeux sur son visage, ces paroles l’ayant tiré des pensées dans lesquelles il était tombé si rapidement. L’espace d’un instant, il ne l’avait pas vraiment oubliée, mais elle avait eu sa place dans cette pièce, comme si elle y avait toujours été. Et elle s’y accordait parfaitement bien.

Quand leurs regards se croisèrent, il crut pouvoir lire en elle. Il était certain de sentir en elle le même désir qu’il ressentait personnellement. Elle s’approcha, si près de son odeur si agréable faillit lui faire fermer les yeux. Mais non, il préférait les garder ouverts sur la magnifique réalité qu’il avait devant lui. Elle était si proche. Et ses yeux, son regard dans lequel il se perdrait sans aucune crainte si cela devait arriver… Très lentement, tellement lentement qu’il était difficile de le voir à l’œil nu, il se pencha sur elle… jusqu’à ce qu’elle se décale. Il était impossible qu’elle ait bougé à cause de son envie à lui. Son regard était resté le même que quand elle s’était approchée, et même lui s’était à peine senti bouger. Alors pourquoi avait-elle reculé ?

« Robin, vous fumez ? Enfin je veux dire vous avez des cigarettes… »

Un enfant aurait remarqué que son air n’était pas entièrement sincère.

« Enfin si ça ne vous derange pas que je fume à la fenêtre. »

En elles-mêmes, les deux phrases combinées n’avaient pas vraiment de sens. Vivant seul, dès le moment où il avait des cigarettes, la fumée ne devait pas le gêner. Mais au moins, elle était polie et demandait. Alors, il se concentra sur la question, et son expression se changea en une mine gênée. Se grattant la tête, il réfléchit un moment, regardant vers la cuisine.

- En fait, j’ai arrêté de fumer il y a bientôt un an. Je ne sais pas si il me reste des cigarettes…

Il reposa son regard sur elle, mais un regard vide, qui laissait savoir qu’il n’était plus vraiment là, mais dans ses pensées. Dans sa tête, il fouillait sa maison, chaque recoin, chaque centimètre carré. Bob ne pouvait pas se vanter d’avoir une intelligence supérieure, ni une mémoire surhumaine. Reconnaître un visage à peine connu après dix ans était bien sûr impossible pour lui. Mais il connaissait parfaitement chaque chose qui lui appartenait, notamment son appartement, dans les détails. Ainsi, il visualisa le seul endroit où il avait vu des cigarettes pour la dernière fois, qui n’était autre qu’un tiroir dans la cuisine. Une lueur réapparut dans ses yeux, comme s’il sortait du mode veille, et, sans prévenir, il se dirigea vers la cuisine. Il ouvrit le fameux tiroir pour n’y trouver rien d’autre qu’un briquet.

* Papa… *

Il aurait pu au moins prévenir qu’il s’était servi… Enfin, au moins, il était fier de ne pas avoir cherché ses cigarettes auparavant. En fait, il avait très facilement arrêté.

Il revint la voir avec une mine désolée.

- On dirait que mon père a veillé à ce que je ne sois plus tenté…

Intérieurement, il en était heureux. Déjà, elle n’aurait pas a aller à la fenêtre, ensuite, il ne serait pas tenté de s’y remettre au moins une fois pour rester avec elle, et pas à l’écart.

mp: dsl c'est un peu naze pour la partie narration je peux pas faire parfait tout le temps même si j'ai adoré ton post



* Mille tonnerres de zeus !! Nom d'un baobab chauve !! Le monde entier est donc contre moi … Rhaaaaa quelle cruauté, ce n'est pas juste, pour une fois que je veux être sage …*

-Ha… Bon bha tans pis. Merci d'avoir vérifié.

Répondit-elle avec une once de déception. Son merveilleux plan tombait à l'eau et venait de couler plus rapidement que le Titanic !

Il lui faudrait trouver autre chose pour se détourner du bellâtre. De lui qui n'avait même pas reculé quand elle avait réduit la distance à un presque rien… Etait-ce une invitation ? Fallait-elle qu'elle cède ? Qui pourrait juger ? Ils n'étaient qu'à deux ici. Lui, elle, la nuit qui finirait trop vite…

Tentation, tentation, quand tu nous tiens …


Non, non, non et NON ! Zut alors, elle n'était pas esclave de ses pulsions ! Depuis quand résister à un homme lui demandait autant de volonté ?!

*Pourquoi j'suis pas tombée sur un thon qui sent le cigare …*

Un nouvelle fois, ses prunelles heurtèrent le regard glacé de son hôte. Elle ne dissimula pas sa mine indécise, quand au conflit intérieur qui la tiraillait de toute part… Elle avait de toute façon comprit qu'il devait à peut prêt se livrer le même.
Puis, elle lâcha un soupir.


-Quand vous parliez de liberté tout à l'heure vous aviez raison. Je n'ai aucune attache, et je fais les choses quand j'ai envies de les faire… Je passe des nuits avec qui je veux, et je m'offre à ceux qui me plaisent. Mais quitte à faire ça, je préfère coucher avec des salauds, ça diminue les remords aux réveils quand je ne laisse qu'un parfum sur l'oreiller le lendemain matin.
Ma conduite connaît certains écarts, je dois bien l'admettre, mais je n'ai pas pour principe d'abuser de l'hospitalité d'un homme qui m'offre son toit pour me laisser échapper aux flics, encore moins quand il chante des chansons d'amour avec ferveur… J'espère que je suis claire … Vous êtes séduisant et attirant, mais j'ai une résistance limitée, alors arrêter avec votre regard. Je dis ça pour vous, parce que je sais comment ça finira, et que je ne voudrais pas vous décevoir, ni passer pour une salope… Je préfère qu'on en reste à votre idée utopique que je suis une incarnation de la liberté.

Whoua … Ses propres paroles venaient de lui remettre les idées en places et les hormones en ordre ! Elle avait sentit la vérité de ses paroles en même temps qu'elle les avait prononcé, et sa détermination écrasa son désir. Evidemment, elle se trouvait franche, et un peu blessante, mais celui lui semblait nécessaire. Elle venait de mettre la main sur ce qui l'avait effrayé chez lui au premier abord; ce côté mystérieux qu'il dégagé… Comme James. Hors s'était son admiration pour le vampire qui avait causé la perte de son humanité, elle n'avait pas su faire preuve d'autorité et de franchise quand son ex meilleur ami lui avait dévoilé ses sentiments. Et la blessure était toujours là…
Alors elle s'était promis de ne plus jamais laisser les choses se reproduire. Même si elle devait se montrer blessante. Mordre avant d'être mordue, était devenue sa devise.
Au moins ce qui devait être dit, avait été dit. Elle n'attendait pas de sentiment de sa part, comme elle n'avait pas attendu son aide. Le soleil se lèverait, sur la place vide qu'elle aurait laissée après son depart. Le revoir ? Elle n'y comptait pas. S'il était humain, alors cela ne vaudrait pas le coup, si il était un vampire, elle mettrait plus de ferveur à l'effacer de sa vie. Quoi qu'il en soit, aucune attache n'était possible. Surement ne pouvait-il pas le comprendre. Il ignorait ce qu'elle était. Peut être même la chasserait il une fois au courant …

Rien que le soupir laissait savoir que la suite ne serait pas vraiment la meilleure qu’on puisse imaginer. Quand elle ouvrit la bouche, il se prépara à encaisser. Quoi, et pourquoi, il n’en avait aucune idée. Mais quelque chose lui disait de prendre garde aux mots qu’elle prononcerait.

« Quand vous parliez de liberté tout à l'heure vous aviez raison. Je n'ai aucune attache, et je fais les choses quand j'ai envies de les faire… Je passe des nuits avec qui je veux, et je m'offre à ceux qui me plaisent. Mais quitte à faire ça, je préfère coucher avec des salauds, ça diminue les remords aux réveils quand je ne laisse qu'un parfum sur l'oreiller le lendemain matin. »

Fidèle à lui-même, il n’eu pas la moindre réaction à ces mots. Il restait comme figé, son regard glacé posé sur elle. C’était comme un bloc de glace géant. Du moins, en apparence… Intérieurement, il se posait des questions. Notamment sur la dernière partie. Mais il allait très vite avec ses réponses.

« Ma conduite connaît certains écarts, je dois bien l'admettre, mais je n'ai pas pour principe d'abuser de l'hospitalité d'un homme qui m'offre son toit pour me laisser échapper aux flics, encore moins quand il chante des chansons d'amour avec ferveur… J'espère que je suis claire … Vous êtes séduisant et attirant, mais j'ai une résistance limitée, alors arrêter avec votre regard. »

Comme un défi, il intensifia ce regard. Il ne savait plus vraiment où donner de la tête, alors il analysa rapidement chaque partie. Abuser de son hospitalité ? Pourtant, comme elle le disait, son regard devait bien vouloir dire quelque chose. Abuser, non. Se laisser tenter, plutôt. D’autant plus qu’elle disait qu’il était séduisant et attirant. Mais ce qui attira le plus son attention, c’était l’histoire des chansons d’amour. Est-ce qu’il les chantait vraiment ? Il n’avait jamais rien fait d’autre que la répéter. A bien y réfléchir, c’était vrai qu’il n’avait jamais mis autant de cœur dans ces chansons, même s’il les chantait si bas.

« Je dis ça pour vous, parce que je sais comment ça finira, et que je ne voudrais pas vous décevoir, ni passer pour une salope… Je préfère qu'on en reste à votre idée utopique que je suis une incarnation de la liberté. »

En une fraction de secondes, sans vraiment s’en rendre compte, il avait avalé la distance qui les séparait. Il fut presque surpris de sentir les lèvres de son invitée contre les siennes, et ce même si c’était lui qui était allé les chercher. C’était une grande première pour lui, d’embrasser lui-même une femme, et il trouvait ça tellement plus agréable que de goûter à des lèvres qui étaient venues aux siennes sans qu’il le désire réellement. C’est en y pensant qu’il se redressa à contrecœur. Elle venait de lui dire qu’elle préférait éviter ce genre de choses, et lui n’en avait fait qu’à sa tête. Il posa un étrange regard sur Fox, qui laissait à la fois voir qu’il avait apprécié ce moment mais aussi qu’il était désolé d’avoir osé.
Ou plutôt de l’avoir fait alors qu’elle ne voulait pas.

- Revenons aussi à ce que vous avez dit, sur le fait que vous n’avez vue aucune petite culotte ou de soutien-gorge chez moi. La vérité c’est que pour ça je ne suis pas comme vous. Vous préférez ne pas vous attacher à qui que ce soit, et vous couchez avec n’importe qui en les laissant au matin, eh bien pour moi c’est presque la même chose. A vrai dire, vous êtes la première personne que j’embrasse, dans le sens où c’est moi qui fais le premier pas. Je n’ai pas pour habitude de m’attacher à qui que ce soit. Mon père lui-même n’a pas toute ma confiance. Mais vous…

Robin esquissa un geste de la main vers la joue de la jeune femme, et se ravisa à quelques centimètres. Avec un soupir, il baissa la tête, puis se recula. Il éteignit le film, puis se retourna vers elle.

- J’aimerais que nous nous revoyions. Je…

Avec un soupir, l’hybride serra le poing, et détourna les yeux. Voilà pourquoi il avait toujours tenu ses distances avec tout le monde. Sans un mot, il alla à la chambre en en ramena des draps. Faisant rapidement le « lit » de Fox, il se dirigea ensuite vers sa chambre, et, s’arrêtant à mi-chemin, il tourna légèrement la tête dans sa direction, puis, sans la regarder, lui dit :

- Excusez-moi pour tout à l’heure. Je n’aurais pas dû dire ou faire tout ça. Je comprends que vous ne souhaitiez pas me revoir… Bonne nuit.

Et il se remit en marche vers sa chambre.

Leurs regards se sondèrent. Etait l'ambre qui défiait le la bleuté, ou l'inverse ? Elle n'aurait sut dire… Les secondes s'écoulèrent, trop vite, ou trop lentement, elle ne savait pas. Elle ne savait plus. La vision bouleversante de cet homme qui venait d'avaler littéralement les mètres qui les séparaient pour déposer ses lèvres sur les siennes, l'avait perturbé au plus au point.
N'avait-il pas entendu ce qu'elle venait de dire ? Voulait-il lui prouver l'erreur de son jugement ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi ne pas l'avoir repousser ?

Figée, elle ne participa au baiser, ses yeux n'exprimaient que la surprise, et son corps entier s'était bandait, de peur ? D'envi ? De quoi ? Elle ne savait pas. Elle ne savait plus.

Grisée de surprise, et de … De quoi ? Bonheur … Envi… Fureur … Colère… il y avait tellement de chose qui la traverserait en ce moment, que ses propres idées lui échappaient.
Dire qu'elle en avait castré pour moins que ça, et qu'elle se retrouvait simplement figée alors qu'il venait de lui dérober en toute impunité un baiser…

Quelle ironie. La voleuse venait de se faire voler.

Leurs visages étaient toujours si prêt … Et Nelïya, n'avait toujours pas fait le moindre geste. Il prit la parole, et les lambeaux de son âme s'arrachèrent d'avantage…


*la ferme … tais toi… ne dis rien… vas t-en…*

Sans qu'elle puise le contrôler, son corps s'agita de tremblements fébriles. Le gifler, le faire taire, ne pas connaître la suite. Mais son corps refuse de bouger…


*SHUT UP !!!*

Envi de pleurer.


La pièce était vide. Il venait de la laisser. Ses jambes se dérobèrent, et laissèrent son corps s'affaler de tout son poids sur le lit.

Le visage plongé entre ses mains, elle maudissait le monde, elle maudissait ce "robin", elle maudissait les évènements qui l'avaient amené ici, et plus que tout elle se maudissait de le désirer…

Son regard se noya dans le vide. Et les heures s'écoulèrent…. Encore et toujours … 4h du matin, ses yeux étaient restés ouverts, elle n'avait pas dormit une seule minute.

Elle se redressa… Alla chercher ses vestes. L'enfila, d'un geste lent, las comme si chaque muscles étaient douloureux. Pourtant son épaule allait mieux. Non ce n'était pas de là que venait la douleur.
Vitreux, son regard caressa la direction qui menait à la chambre… Elle pouvait tout lui dire, tout lui expliquer. Qu'elle n'avait rien à lui offrir qu'une paire d'ovaire stérile et une main qui ne pourrait jamais porter d'alliance sans qu'elle ne s'y brûle, qu'ils n'étaient pas du même monde, qu'aimer lui était interdit, autant que d'être aimé, que tout ça ne mènerait à rien, qu'elle n'avait jamais eut les ailes de la liberté, mais plutôt des fers au cœur… Mais à quoi bon. Il ne savait d'elle que ce qu'elle lui en avait donné … "Fox". Il l'oublierait bien vite.

Sa main accrocha son sac pour le jeter sur son épaule… Son regard courra sur la pièce une nouvelle fois, et tomba sur le coin d'une revue. Sans grand enthousiasme, elle y porta une attention plus poussée. La dégagea de la pile sous laquelle elle dépassait.
Une pub pour une exposition temporaire au musée… "les joyaux du royaume unis" …

Un soupir déchira sa poitrine, et elle fit volte face, marqua un temps d'arrêter devant la chambre. Faillait-il qu'elle le remercie, ou qu'elle lui demande pardon …? Ni l'un, ni l'autre. Elle choisit de l'oublier.

La clé tourna dans la serrure, et avec doucement la porte se referma derrière elle. L'esprit vide, elle redescendit dans la ruelle sombre et déserte. Pas de coup d'œil vers la fenêtre, non son regard fixé le sol.
Et la nuit l'avala doucement. Elle disparut comme elle était apparue.

Il aurait dû aller dans son lit. Se coucher. S’endormir vite. L’oublier encore plus vite. Elle ne serait plus là le lendemain, c’était un fait. Pourquoi resterait-elle ? S’adossant dans le silence le plus total à la porte, il repensa à l’expression de Fox. Il comprenait maintenant le sentiment d’embrasser sans que le baiser soit rendu, ce sentiment de frustration qu’avaient dû connaitre toutes ces courageuses filles – ou étaient-ce ces allumeuses ? – qui avaient osées aller jusqu’à chercher ses lèvres, et à qui seule l’absence de froid empêchait de penser qu’elles embrassaient une statue de glace. Il se laissa glisser le long de la porte, et baissa la tête. Quel idiot il avait été. Pourquoi avait-il tant voulu la tenter ? Pourquoi avait-il ressenti ce besoin ? Il enchainait les reproches, mais uniquement à son égard. Il était hors de question de rejeter quelque faute que ce soit sur Fox.

Combien de temps s’était passé ? Depuis combien de temps attendait-il en pestant contre lui-même ? D’ailleurs, qu’est-ce qu’il avait attendu ? Qu’elle entre ? Qu’elle vienne le chercher pour lui dire qu’il n’avait pas eu à s’excuser ? Lui dire que pour elle aussi, elle… Elle quoi ? Que ressentait-il vraiment ? Il passa ses mains dans ses cheveux, puis les tira légèrement, comme si ce geste allait l’aider à réfléchir. Derrière la porte, il entendait le souffle de Fox, et rien d’autre. S’était-elle endormie ? Il l’espérait, même s’il ne l’avait pas entendue relever les draps. Peut-être qu’elle s’était endormie assise. Lui dévorait presque les ongles de ses pouces à attendre.

Je n’peux pas tomber amoureuse…

Il n’aurait pas dû regarder ce film…

I was made for loving you baby, you were made for loving me…

* Sileeeeeence ! *

Love lifts us up where we belong…

Pourquoi revoyait-il cette scène ? Et pourquoi y voyait-il leurs visages et y entendait-il leurs voix ? La situation n’était pas du tout la même. Christian n’avait pas fui, lui…

Soudain, il entendit enfin du mouvement. Il ferma les yeux pour se concentrer sur ce qu’il entendait. Elle marchait, et pas vers la chambre. Il l’entendit enfiler ce qu’il identifia comme sa veste, et retint un soupir.

* Non, ne pars pas… *

Il aurait dû se lever, ouvrir la porte, lui dire de rester. Mais il était figé, comme elle l’avait été pendant leur baiser. Ou plutôt quand il l’avait embrassée, puisqu’elle n’y avait pas participé. Doucement, il appuya sa tête contre la porte, ouvrant ses yeux sur la fenêtre par où elle était entrée plusieurs heures auparavant. Elle n’était même pas fermée. Il referma les yeux en entendant le sac se frotter à la veste de Fox. Le genre de réaction qu’on avait quand on n’arrivait pas à accepter quelque chose, qu’on accompagnait généralement d’un soupir. Mais là, il ne soupira pas. Il en retenait sa respiration, et son cœur même battait plus lentement pour ne pas le déconcentrer. Il entendait des feuilles, sans vraiment identifier ce que c’était. Puis un soupir qui lui fit mal. Puis la clé tournant dans la serrure, la porte s’ouvrant, et se refermant. Impulsivement, son poing alla cogner la porte, alors qu’il serrait les dents. Elle était partie…

Il rebaissa la tête, fermant les yeux, les poings serrés.

- Why does my heart cry ? …

Il attendit encore une minute – ou était-ce plus ? – puis se leva et ouvrit la porte et balaya la pièce du regard. Vide. Son regard fut attiré par une revue, et plus particulièrement une publicité.

- Les Joyaux du Royaume-Unis…

« J’ai rien volé … C’est parce qu’ils n’ont pas eut le temps de s’en rendre compte, mais j’ai rien piquée … J’essayais juste de voir si je serais assez rapide pour leur échapper. »

Assez rapide pour leur échapper… Un certain intérêt pour une exposition… Un accoutrement tout noir… Les pièces s’assemblaient petit à petit dans sa tête. Il regarda l’adresse de cette exposition. Quelque chose lui disait qu’il y trouverait cette jeune femme.

- Maintenant je sais dans quel coin je me promènerai…