Un nouveau pied en terrain connu [pv Ian]

Papier devant les yeux et plume en main, il rédigeait une lettre à son bras droit, lui demandant de lui rapporter instamment des nouvelles du trafic, sur l'état de son bâtiment, sur la santé de ses hommes et sur l'ambiance en général. S'ennuyaient-ils ? Réussissaient-ils à vivre grâce à l'économie de leur pécule ? Lui-même se portait-il bien ? Combien de nouveaux clients, combien d'acheteurs en général ? Que coûtaient les frais de réapprovisionnement dans cette période ? Autant de questions qui lui seraient utiles lors de son prochain passage à Bordeaux, l'empêchant ainsi d'ennuyeuses révisions sur la situation. De toute manière, même si ces requêtes n'avaient pas été utiles, il les aurait formulées quand même ... Rien que pour se distraire, se changer les idées et se donner l'impression qu'il était chez lui, dans son bureau à écrire cette même lettre si il n'avait pu se rendre directement sur place. Du reste, il était plutôt confiant. Jamais un de ses gars ne l'avait abandonné, et il revenait sur la terre riche qui l'avait vue naître le coeur gonflé d'orgueil et de la satisfaction de voir que le navire reluisait, même si il n'était déjà plus tout jeune. L'entretien était sérieux, et donnait encore plus, si il était possible, l'envie de repartir voguer.

Poussant un soupir qu'il était allé chercher loin en lui-même sans s'en rendre compte le moins du monde, les muscles de son dos se relâchaient, la ligne de ses épaules se détendait, et l'homme se sut apaisé, par le seul bienfait de l'écriture. Remontant le bras de sa chemise dans un geste lent et calme, sa respiration se ralentissait, adoptant presque celle du dormeur, signe incontestable de repos pour le corps. La pointe imbibée d'encre glissait toute seule le long des lignes invisibles du papier clair, composaient des mots de sa belle et large écriture, légèrement penchée. Il avait toujours apprécié le fait d'écrire, tenant avec soin son journal de bord depuis qu'il avait pris la décision d'embarquer régulièrement, avec des compagnons choisis et fidèles. C'était sa facette sensible qui s'exprimait là, revigorée depuis la mort de sa femme, qui avait été la seule à en bénéficier.

Les mouvements de son poignets ralentirent. Ses yeux se voilèrent. Sentant que la menace des souvenirs revenant à la charge tournait autour de sa conscience, il se ressaisit, et crispa ses doigts avec plus de force, désormais pressé de terminer ce travail de rédaction.

# ... Je m'arrête là, mon bon ami. Tâche simplement de passer faire un tour du côté de la comptabilité : j'ai négligé d'y prêter autant d'attention que je le devrais, et le regrette désormais. Non pas que je n'ai pas confiance, mais tu me connais ; chez moi la prudence est toujours de mise. Que rajouter d'autre...? J'espère que les services postaux ne tarderont pas trop cette fois-ci. J'enrage de voir la plupart du temps ces bureaux fermés, à l'activité ralentie. Et pourtant, j'attendrais bien un an si il le fallait.
Envoie le bonjour à tous nos hommes, qu'ils se maintiennent en forme, et embrasse ta femme pour moi. J'espère que le gamin grandis bien et qu'il fait correctement ses pompes. Si il est sage, je lui raménerais sûrement quelque chose de Paris. Méfie-toi mon vieux, tu as enfanté d'un p'tit gars de la terre, vu son obsession pour la capitale... ça doit venir de sa mère, ça !

Bien à toi,

I. Englehorne #

Au moment où il recapuchonnait son stylo dans un 'clic' discret, des coups à la porte se firent entendre. Curieux, lui qui ne recevait pour ainsi dire jamais de visite, il se leva rapidement et gagna le battant, l'ouvrant sans poser de questions. Quelle ne fut pas sa surprise de se trouver nez à nez avec...Nelïya. Sans dissimuler son trouble, il aurait pourtant voulu réussir à articuler ne serait-ce qu'un mot ... mais rien. Ce fut elle qui brisa le silence.

-C’est encore moi

Le marin acquieça, attendant la suite. Elle semblait un peu dans le même genre d'état que lui : gênée, ne sachant pas trop comment s'exprimer...

-Moi aussi j’ai un truc à te dire Si je te paye un truc à boire au bar de l’hôtel, tu voudrais bien écouter ce que j’ai à dire …

Jetant un oeil à sa montre, constatant qu'il était moins tard qu'il ne le pensait de prime abord, Ian n'eut pas à subir un conflit intérieur pour se décider quant à la réponse qu'il lui donnerait. Son maintien était détendu, sa voix délicate et de plus, elle avait réussi à piquer au vif sa curiosité, encore renforcée. S'adressant à elle d'une voix douce et légèrement plus basse, il acquiesca.

" Attends une seconde... "

Sans refermer le panneau, il s'assura qu'il n'avait rien oublié, éteint les lumières allumées dans la pièce... mais laissa dans la chambre son revolver, sortant simplement vêtu de sa chemise et de son pantalon. Ses clefs en main, il verouilla derrière lui et, un sourire aussi aimable que possible sur les lèvres, il tendit la main en direction des escaliers, la laissant passer devant.

" Après toi ... "

Le visage juvénile de l’éternelle s’éclaira d’un sourire, alors que son invité acceptait son invitation. Ils descendirent donc ensemble. Le bar, était plutôt vide, bien que l’heure ne dépasse même pas encore les 22h00, on ne comptait que 6 personnes.
Les deux anciens ennemis prirent place à une table de deux et le serveur ne tarda pas à leur sauter dessus, le pauvre devait s’ennuyer. Encourageant Ian à prendre ce qu’il voulait, la vampire prit, en bonne « rosbif », un thé. Ce qui ne l’aiderait surement pas à dormir, mais qu’importe, maintenant ses nuits servaient à bien d’autres choses qu’à son sommeil…
La salle peu peuplé, n’en était pas moins sans animation ; un faible brouhaha de papotage, mais surtout la radio en fond comblait un silence qui aurait pu être pesant dans une salle presque vide. De plus, celle-ci était assez forte pour couvrir les conversations, ce qui arrangeait la jeune fille.
Nelïya attendit que le serveur revienne avec leur commande pour commencer à parler. Elle ne voulait pas que celui-ci le coupe, et en plus, elle devait encore réfléchir à comment aborder la chose.
Etait-ce, la musique de fond, ou la chaleur agréable de l’endroit, qui la détendait à ce point ?
Quoi qu’il en soit, elle se sentait très à l’aise, même si elle savait qu’elle allait parler d’un sujet délicat, elle se sentait sereine.
Leur commande arriva, bien rapidement, elle remercia poliment l’employé, lui offrant un sourire charmant, mais ça, s’était juste parce que il l’était aussi.

Ses mains se refermèrent autour de la tasse, et immédiatement, une douce chaleur se rependit dans ses paumes, comme si au creux de ses mains, elle tenait un petit soleil…
Elle adorait cette sensation. Les mains, réchauffées, propageaient ensuite la chaleur dans tout le corps, et bien qu’elle n’ait pas froid, elle adorait cette sensation …

Elle jeta un coup d’œil en biais au serveur, il était retourné à essuyer des verres, et à ranger des bouteilles, rassuré de la savoir loin, elle se retourna vers Ian, et ouvrit enfin la bouche.

-J’ai repensé à ce que tu as dit …Sur le fait que tu étais venu ici pour ta vengeance, mais que ça ne s’était pas passer comme prévu, à cause de ce qu’il s’est passé avec moi.

D’un geste calme, elle souleva sa tasse et souffla dessus pour la refroidir. Avant de reprendre :

-Et à vrai dire, je ne pense pas que le fait que je sois, en apparence, une gamine de 18 ans, soit la véritable raison qui t’ait poussé à ne pas me tuer…

Toujours, elle affichait un air calme, et le fait de parler de sa mort frôlée, ne semblait pas la choquer, ni la déranger outre mesure

-Je pense que l’on est plus aux temps des Spartiates, où les femmes encourageaient leurs maris pour la guerre… Là où je veux en venir, c’est que je pense qu’aucune femme de nos jours, n’aime à voir les mains de son mari couvertes de sang… Comme aucun gosse n’aimerait avoir la déception de voir son père transcrire lui-même les codes moraux qu’il lui a enseigné.

Son regard n’avait pas quitté celui de Ian.

-Tu n’aurais eut aucun mérite à faire ça… Que je sois une femme, où même un homme, de 18 comme 30 ans, abattre ta douleur sur une créature qui n’est liée ni de prêt, ni de loin à ce qui c’est passé dans ta vie, ne t’aurais pas rendu plus valeureux que ceux qui t’ont prit ta famille. Et tu le sais très bien Ian…
Ce n’est ni la preuve de faiblesse, ne la preuve de lâcheté. C’est la preuve que tu as gardé ton humanité, la preuve que tu n’as pas tout perdu, celle que tu n’es pas tombé aussi bas que ces monstres. Et ça encore je suis sûre que tu le sais déjà.

Cette fois, elle s’arrêta, pour boire une gorgé de son thé.

-Ca m’amène au deuxième point, que je voulais aborder…

Nouvelle gorgée. Puis ;

-L’homme ne vit pas de violence, mais de justice… J’ignore, quelles raisons ont poussé ceux de ma race à s’en prendre, aux tiens. Mais vampire, ou humain, pour le meurtre d’une femme et d’un enfant, on a toujours un compte à réglé avec la justice… Sans oublier qu’ils s’ont peut être pas été les seuls victimes…
Tu disais que Paris était ton enfer, parce qu’il y grouillait des tas de vampires. Et si tu regardais ça sous un autre angle… La structure sociale des vampires, est un peu à l’écart de celle des humains, dans le sens où ils sont immortels, et qu’ils ne peuvent pas se reproduire, ils ne sont pas si nombreux que ça. Moins que les hybrides en tout cas… Quoi qu’il en soit, les vampires avec l’âge finissent par rester entre eux, en groupe, s’éloignant des mortels. On ne se connaît pas tous bien évidement… Mais sachant que Paris est leur terre d’asile, non seulement tes chances de retrouver ceux, ou celui qui a fait ça, sont plutôt dans la bonne partie du pourcentage, mais tu pourras, peut être trouver ici d’autres vampires qui te permettront de remonter à eux bien plus facilement… Et pour ça, je peux t’aider… Si tu le souhaite évidemment… Je ne t'oblige à rien, et tu es dans ton droit de me dire de me meler de mes affaires. Mais sache que je suis de ton côté ...

Apparemment, l'idée qu'il accepte aussi aisèment l'invitation de la vampire semblait avoir réjoui celle-ci. Et pas qu'un peu, si il devait en croire le sourire éclatant qu'elle avait arboré. Un peu sur la réserve, son imagination fonctionnait à plein régime : mais pourquoi diable lui avait-elle proposé une autre conversation ? Il se doutait que cela devait avoir un quelconque lien avec leur entretien précédent ... et cela n'était pas pour le réjouir totalement, m'enfin... Tous deux entrèrent, comme deux vieux habitués dans le bar de l'hôtel, plutôt déserté. Il préférait cela... trop de gens, à cet instant, alors que tout se bousculait dans sa tête, aurait accentué son malaise et son appréhension au lieu de les soulager. L'atmosphère ici lui conviendrait très bien. Pas trop de silence, pas trop de bruit. Quelque chose d'intime, une sorte de bulle qui protégeait tous les clients attablés, à discuter entre eux. S'installant à une table située presque au milieu de la salle, ils n'eurent guère de temps à attendre, en effet. Un peu perdu dans ses pensées, Ian commanda sans grande conviction un café. Tant pis pour le sommeil qui tarderait à venir après. Il remercia d'un hochement de tête amical Nelïya de l'inviter. Ce n'était pas ce que coûtait un café, mais bon ... c'était gentil de sa part quand même, malgré tout.
Ian eut du mal à finir par fixer son regard sur le visage seul de sa vis-à-vis, et pas à balayer la salle des yeux encore une fois. Mal à l'aise, tout de même ? Peut-être un peu ... Tâchant de concentrer également son attention sur le poste de radio plutôt que sur le silence légèrement gênant, il se forca à arborer une mine moins sombre et plus avenante, histoire de ne pas décourager la tentative de Nelïya.

Enfin, le serveur revint et déposa les consommations demandées. Au moins, il pourrait se cacher derrière sa tasse de café ...

* Lâche ... *

Poussant un soupir, il but une petite gorgée, négligeant d'y rajouter du sucre. Il l'avait pris bien noir, et grimaca légèrement en déglutissant. Elle, en revanche, semblait se sentir chez elle, comme si c'était lui qui s'était exilé pendant six mois. Six mois, bon Dieu ! Déjà ... le temps passait si vite, et si lentement à la fois. Et pourtant, ils se retrouvaient comme si ils ne s'étaient pas quittés, comme si leur litige remontait d'il y avait à peine une semaine. Reculant son bras, il l'appuya à la chaise, croisant ses jambes. Sa posture ressemblait davantage à celle qu'il abordait sur son bâtiment plutôt que celle d'une bonne conduite, mais il s'en fichait. Il était en compagnie d'une personne qu'il commençait à bien connaître, et se trouvait dans un bar d'un fichu hôtel parisien à dix heures du soir. Alors quelle importance ?

-J’ai repensé à ce que tu as dit …Sur le fait que tu étais venu ici pour ta vengeance, mais que ça ne s’était pas passer comme prévu, à cause de ce qu’il s’est passé avec moi.

Il blêmit à nouveau. Maintenant qu'elle savait, elle ne le lâcherait plus, ça c'était certain ... De toute manière, dès qu'il apercevait son visage désormais, il ne pouvait que repenser à ce qu'il avait fait, non fait, ou ce qu'il avait failli faire. Il faudrait que la Seine continue de couler un bon moment avant que ce souvenir obsédant ne lui sorte définitivement de la tête... avec un peu de chance. On n'oublie jamais une telle chose. Il lui adressa un haussement de sourcils en hochant brièvement de la tête, comme pour lui signifier qu'il savait, et qu'il attendait la suite, attentif malgré lui.

-Et à vrai dire, je ne pense pas que le fait que je sois, en apparence, une gamine de 18 ans, soit la véritable raison qui t’ait poussé à ne pas me tuer…

Sa main se crispa sur l'anse de la tasse et il lui jeta un regard noir, avant de reprendre une gorgée, sans douceur. Le choc contre la soucoupe fut rude, après coup. Il craignait ce qu'elle allait dire par la suite. Il ne se vexait pas, loin de là, mais prenait mal l'interprétation qu'elle était en train de lui débiter. Le grand homme, qui a epargné une pauvre gamine, ramassé deux fois dans les rues. Et le pire c'était son assurance tranquille ... comme si elle était persuadé d'avoir su lire en lui. Si elle savait ...

-Je pense que l’on est plus aux temps des Spartiates, où les femmes encourageaient leurs maris pour la guerre… Là où je veux en venir, c’est que je pense qu’aucune femme de nos jours, n’aime à voir les mains de son mari couvertes de sang… Comme aucun gosse n’aimerait avoir la déception de voir son père transcrire lui-même les codes moraux qu’il lui a enseigné.

Elle n'avait pas le droit... la dureté dans ses yeux s'amoindrit, se changeant en une profonde tristesse. Elle n'avait pas le droit d'invoquer le souvenir de Bridgess. C'était son fantôme à lui, celle qu'il appelait à lui dans les moments les plus durs. Et dans sa tête, il hurlait comme un fou. Comme un fou en colère.

* Tais-toi... *

Il n'avait pas un seul instant détourné les yeux. Terriblement immobile désormais, seul un profond raidissement des muscles de son dos et de ses épaules trahissait la colère qui grondait.

-Tu n’aurais eut aucun mérite à faire ça… Que je sois une femme, où même un homme, de 18 comme 30 ans, abattre ta douleur sur une créature qui n’est liée ni de prêt, ni de loin à ce qui c’est passé dans ta vie, ne t’aurais pas rendu plus valeureux que ceux qui t’ont prit ta famille. Et tu le sais très bien Ian…
Ce n’est ni la preuve de faiblesse, ne la preuve de lâcheté. C’est la preuve que tu as gardé ton humanité, la preuve que tu n’as pas tout perdu, celle que tu n’es pas tombé aussi bas que ces monstres. Et ça encore je suis sûre que tu le sais déjà.

Aucun mérite... Il ne se souciait plus du mérite. Il ne se souciait plus de cette vieille valeur qui l'avait trahie. Où était le mérite de se comporter comme un monstre en assassinant une femme seule et un petit garçon ? Où ?

-Ca m’amène au deuxième point, que je voulais aborder…

Qu'elle savoure bien son thé... il lui ferait regretter de l'avoir envoyé chercher pour lui vomir sa leçon de morale. Et plus il l'écoutait, plus un sourire s'élargissait sur ses lèvres. Mais un sourire qui n'était porteur d'aucune joie. Une fois qu'il fut certain qu'elle en eut terminé, il se rassit convenablement, se positionnant bien face à elle, présentant un visage totalement ironique.

" C'est ça que tu voulais me dire ? Tu voulais me faire croire que nous ne vivons pas de violence ? Mais regarde autour de toi ! Les gars qui t'ont agressé à l'église eux, tu crois qu'ils vivent de justice ? Oh oui, certainement, mais de la leur ... Dans ce monde maintenant, c'est chacun pour soi, Nelïya ! Chacun pour soi, tu entends ? "

Sa voix avait changé de ton. Plus ferme. Comme lorsqu'il avait l'habitude de donner des ordres. Ses yeux, eux, étaient devenus glacés, impénétrables.

" La justice ne peut rien pour moi ! J'ai appris à m'en passer, tu vois ! Tout est pourri, et corrompu ! Sur quoi veux-tu compter aujourd'hui ? Ouvre les yeux ! Nombreuse ou non, la communauté vampire n'est plus à mes yeux qu'un ramassis d'ordures... je te place à part. Mais je ne pourrais jamais les ranger dans la même catégorie que les hybrides qui, eux, ne m'ont jamais causé du tort ! Je m'habitue à leur présence, commence à les cotôyer un peu plus chaque jour, mais les vampires ..."

Il secoua la tête, une haine sans nom inscrite sur ses traits.

" Il n'y aura pas de pardon. Pas de justice, sinon la mienne. Et si il faut que j'y laisse ma peau, c'n'est pas un problème ! "

Il se leva soudain, avançant jusqu'à se placer près d'elle, de côté. Baissant son visage au niveau du sien en se penchant ,appuyant une main sur la table, il lui souffla :

" J'aurais pu te tuer, tu entends ? Mais je te prenais pour une gosse... et j'en ai eu un, gosse ! Tu es une femme... et j'ai eu une femme ! Tu comprends, ça ? "

Se redressant, il la considéra un moment, puis se radoucit, malgré la fermeté persistante dans sa voix.

" Je réfléchirai à ton offre... mais n'espère pas trop ... Bonne nuit, Nelïya. "

Puis, il marcha résolumment vers la sortie, ignorant totalement si elle s'enhardirait à le suivre, ou si elle resterait là, à méditer à leur table.

Sans grande surprise, Ian blêmit, se crispa, et s’énerva… Nel l’avait –elle prévu ? Peut être pas, mais elle l’avait sentit venir en tout cas. Surement parce que quelque part, elle savait qu’elle mettait les pieds dans un terrain qui ne la regardait pas vraiment, et que le propriétaire de ses lieux passés, qui n’était autre Ian, retrousserait babines et sortirait les griffes pour la faire disparaître de là. Mais comme elle l’avait souligné, elle ne poserait pas un pas de plus si il désirait la renvoyer à ses affaires à elle.
Elle n’avait jamais eut comme projet d’insister, et elle ne le ferait pas. Elle aimait trop sa liberté pour entraver celle des autres… Peut être ressentait-elle une certaine déception, d’une réaction si ferme de la part du capitaine, mais elle savait aussi que ce qui était à dire, était dit, et que donc, elle ne ressentirait pas le regret de l’avoir gardé pour elle. Maintenant, s’il se bornait à envoyer en l’air ses paroles, très bien. Mais au moins s’était fait et elle ne pouvait en ressentir qu’un soulagement.

Ainsi donc ses prunelle, se laissèrent transpercer, par la bleuté glacée de celles du marin, sans ciller, et avec aplomb. Elle ne faisait qu’encaisser un coup qu’elle avait prévu à l’avance, et elle garda son calme d’une façon remarquable pour une fille au tempérament si électrique.
Mais elle respectait trop l’homme, pour s’emporter contre lui une nouvelle fois. Si les deux se bornaient, elle savait que la discutions n’avancerait pas, de plus cela ferait voler en éclat le lien fragile qui les unissaient. Cela non plus, elle ne le voulait pas. Ce n’est pourtant pas l’envie de lui en coller une pour qu’il ouvre les yeux, qui lui manquait.
Son pessimisme en était presque … Vomitif. Elle refusait de croire à cela… Pourtant, en y regardant de mieux, elle y avait cru un jour, cependant, aujourd’hui, elle n’en voulait plus.
Lui pouvait peut être se permettre de penser que leur monde était pourrit, corrompu, et sans justice valable, il ne lui restait qu’un peu plus d’une cinquantaine d’année à vivre sur cette terre, et probablement bien moins si il continuait sur cette voie. Elle … Si la fatalité ne la touchait pas, combien de temps lui restait-il ? 100, 200, 300 ans, et même peut être bien plus !
Non, elle ne pouvait se résoudre à perdurer dans un monde comme il lui peignait le tableau… Elle avait vagabondé sans but depuis 12 longues années, dans un univers qu’elle avait vu trop noir. Aujourd’hui, elle n’aurait plus cette faiblesse. Et s’il était vrai que ce monde n’avait plus aucune valeur à défendre, alors elle se forgerait les siennes et vivrait à contre courant. Au moins elle vivrait pour quelque chose.

" J'aurais pu te tuer, tu entends ? Mais je te prenais pour une gosse... et j'en ai eu un, gosse ! Tu es une femme... et j'ai eu une femme ! Tu comprends, ça ? "

Le souffle de Ian, lui caressait le visage alors que son regard vrillait le sien avec colère. Elle comprenait oui… Sa femme, son fils, Leurs fantômes tournaient autour de lui, comme deux boulets dont il ne pourrait jamais se défaire. Ils étaient là omniprésent, et invisibles, logés dans la béante blessure que leur perte avait causé chez l’homme qui avait été mari et père un jour et qui s’était retrouvait veuf et seul un autre…
Toute cette colère, toute cette haine, venait de là. Tout ce qui le mènerait à vouloir sacrifier sa vie, pour sa justice venait de là.
Elle comprenait tout ça, trop bien même… La douleur, la vengeance, l’idée insupportable que ses bourreaux étaient libres, que leur race pullulait, et l’envie que tout cela cesse… Ho oui elle comprenait.
Le ton de l’homme se radoucit.

" Je réfléchirai à ton offre... mais n'espère pas trop ... Bonne nuit, Nelïya. "

Elle ferma les yeux un instant alors qu’il s’éloignait. Elle l’avait assez bousculé pour ce soir, elle n’irait cette fois, ni le rattraper, ni le rechercher. Elle porta sa tasse à ses lèvres.

-Bonne nuit à toi aussi Ian. Fut la seule chose qu’elle ajouta surement au soulagement de l’homme de na pas la voir insister plus.
Il quitta la salle, et alors que elle finissait son thé. Puis elle se leva, sans oublier la note, et sortit dans le hall.
Elle ne rejoignit pas sa chambre. Se soir, elle travaillerait son pouvoir de métamorphose. Elle devrait savoir se changer en louve dans toute les situations, par toutes les émotions.

Elle partie vers l’extérieur. Elle ne renterait que lorsqu’elle se soit assez épuiser pour avoir un sommeil trop court et trop profond pour éviter les cauchemars…

» Nouveau Graphisme
» Nouveau recrutement
» Nouveau design !
» Demande de nouveau pouvoir
» Un nouveau défi à relever