De retour au Midnight

Plusieurs mois maintenant que Raphaël n'avait pas montré le bout de son nez. Lassé de l'attendre, Azphel était à plusieurs reprises venu au Midnight, mais sans trouver le propriétaire des lieux. Désireux plus que tout de lui faire une surprise très salée, il s'était tenu à l'écart de ses plans pendant l'absence de l'ancien vampire, se contentant de frapper ça et là de temps en temps, et de créer quelques nouveaux vampires. Sa troupe et lui même restèrent assez discrets, en attendant le départ. L'association avec un esprit de vampire possédant un corps humain avait été intéressante, mais l'issue n'était pas réjouissante. Un statu quo, rien de mieux. Peu importait en vérité.

Lorsqu'il apprit le retour du vieux vampire, Azphel décida de lui rendre une visite immédiate. Accompagné de trois autres vampires, deux hommes et une femme vêtus de cuir et de clous, à la mode punk, il se rendit au Midnight. Avant même de passer par l'entrée, il rejoignit les ombres quelques rues plus tôt pour reconnaître les lieux. Passant par toutes les ombres de la ville, il se glissa dans le bureau privé de Raphaël, fouilla dans les tiroirs pour en sortir une feuille blanche et un stylo, et inscrivit dessus "Devine qui vient te rendre visite". Il écrivait mal, mais lisiblement, et il se contenta de signer d'une petite goutte de sang. Pas le sien, bien sûr, il ne s'agissait pas de prendre des risques inutiles.

Il quitta ensuite la pièce aussi furtivement qu'il était venu, et rejoignit sa petite troupe. Tous quatre se présentèrent alors devant le videur de la boîte, formant un tableau de peu de confiance. Les deux hommes étaient très musclés, l'air provocateur, pantalon et veste de cuir, grosse barbe pour l'un, imberbe pour l'autre, les cheveux colorés et dressés en collerette. La jeune femme, quant à elle, avait une tenue vestimentaire similaire hormis un décolleté blanc provocateur sous la veste de cuir, et mâchant du chewing-gum en faisant des bulles assez souvent.

A côté d'eux, Azphel semblait presque sortir du cadre. Plus petit que ses compagnons, assez fin, peu musclé, vêtu d'un pantalon de cuir marron et d'une chemise de tissu noire, presque classe. Cheveux bruns, longs et raides rejetés en arrière et finement peignés, une peau assez lisse et plus pâle que celle des autres. Ombre à ce tableau presque classieux, la partie gauche de son crâne émergeant de sa peau dans une vision angoissante, et sertie à la place des dents humaines de dents de reptiles acérées. Au fond de son orbite gauche s'apercevait son œil, privé d'os pour tenir, retenu uniquement par une masse musculaire sous la peau. La mâchoire inférieure était cependant à sa place, et il avait pris soin de maquiller son horrible infirmité comme s'il s'agissait d'un masque stylisé destiné à faire grosse impression, masquant la cicatrice qui bordait le crâne ressorti et passant par dessus l'os une sorte de vernis brillant faisant penser à une sorte de plastique.

Le quatuor de l'étrange se présenta au videur, qui, faisant bien son métier, se plaça face à eux pour les empêcher de passer. mais avant qu'il puisse parler, Azphel l'interrompit d'office.

"Inutile de nous chasser, on ne va pas tarder à venir nous chercher."

Et ils laissèrent le videur incrédule sur cette phrase, se contentant de rester sur le côté de la file, reluquant les jeunes gens qui entraient en notant leur physique, et attendant patiemment que Raphaël découvre son petit cadeau...

Le quatuor dut bien attendre trois heures avant de recevoir la visite attendue. Le videur les surveillait avec méfiance, leur jetant régulièrement des regards durs, mais sans rien dire.
Raphaël se rendit au Midnight en passant en premier lieu par son bureau, car il revenait d'un entraînement nocturne et ses vêtements étaient en partie déchirés. Ne tenant pas à se montrer ainsi en public, il passa se changer et vit alors le message étrange qui l'attendait sur son bureau. Le papier était taché de sang et mal écrit. Le vampire sonda immédiatement la pièce pour repérer d'éventuelles présences dissimulées, mais la pièce était vide. Il jeta alors un œil attentif aux caméras de surveillance : la salle du bar était plutôt calme. Il vérifia alors le porche, et la vision qui s'offrit alors à lui lui déplut fortement.
Il prit simplement le temps d'enfiler un long pardessus pour masquer l'état de sa chemise, et traversa la grande salle d'un pas vif sans un regard pour la clientèle. Il ouvrit la porte qui menait au porche, passa devant le videur et s'arrêta devant Azphel. Il observa les trois punks qui l'accompagnaient en fronçant les sourcils et en plissant les yeux, puis revint vers leur chef, croisa les bras, soupira et dit d'une voix la plus neutre possible mais qu'il ne parvenait pas à garder parfaitement calme :

Alphonse... Je te croyais mort.

Azphel eut d'abord un grand sourire en voyant enfin Raphaël. A dire vrai, il commençait à s'impatienter clairement, et se demandait si le vampire était encore là. Lorsqu'il se pointa enfin, une certaine joie parcourut les veines du vampire. Et l'odeur qui se dégageait de l'ancien lui plut encore plus, mais le surprit. De la sueur, un peu de sang. Pas assez pour un meurtre, mais suffisant pour l'instant. En revanche, il tiqua lorsqu'il osa l'appeler "Alphonse".

Son véritable nom, il le détestait, le haïssait, ce nom d'humain de basse mesure qu'il avait porté jadis. Autant dire que son ton de réponse fut assez sec, en réponse à cette insulte gratuite typique de Raphaël.

"Comme c'est étrange. Moi, je te croyais devenu une lopette. Comme quoi, tout le monde peut se tromper."

Même s'il disait ça sur le ton de la provocation, il ne s'attendait à aucune réaction violente du vieux vampire. Il s'était "rangé", chose qu'il ne pouvait pas du tout accepter de la part de celui qui lui avait fait connaître cette sublime condition de monstre.

Le vieux vampire serra les poings, et une lueur dorée passa dans ses yeux. Encore stimulé par l'entraînement physique qu'il venait de faire, il fut tenté de prouver à Azphel qu'il se trompait.
Mais ils se trouvaient à l'entrée de son propre établissement qui prônait la paix et la non-violence, et devant son videur, un collègue vampire qu'il employait depuis plusieurs années et qui ne connaissait pas son côté sombre. Aussi se retint-il, et il resta parfaitement immobile. La tension était cependant presque palpable.

Ne me sous-estime pas.
Que viens-tu faire ici ?

La question était prononcée sur un ton qui signifiait clairement qu'il n'était pas le bienvenu.

Azphel eut un sourire particulièrement ironique, qui reflétait parfaitement le fond de sa pensée : il avait visé juste, et le vieux vampire venait de prouver ses dires. Il n'avait pas l'intention d'insister tout de suite, mais il n'en restait pas moins déçu. A une époque, il n'aurait pas hésité une seconde à lui arracher la tête pour une telle insolence.

Mais pour le moment, il tenait juste à prouver ou à réfuter ce qu'il avait entendu dire. Rangé, pff, et puis quoi encore? A ses yeux, seul l'instinct comptait, et il comptait bien réveiller la Bête qu'il avait connue. Toujours aussi insolent et provocateur, il ignora le ton employé par Raphaël, et se dirigea tranquillement vers l'entrée de la boîte.

"Moi aussi je suis content de te voir. Avec tout ce temps, je suis sûr qu'on a un tas de choses passionnantes à se raconter, non?"

Sans gêne, il s'apprêtait à rentrer à la barbe de tous, et avait bien des arguments pour entrer dans le plein exercice de ses droits. Et au regard qu'il avait envers Raphaël, il avait déjà une solide argumentation en tête.

Raphaël resta de marbre lorsqu'Azphel lui adressa ce sourire moqueur. Il ne bougea pas d'un pouce lorsqu'il se dirigea vers la porte qui menait dans la salle principale. En revanche, avant qu'il ait pu l'atteindre, un mur de flammes apparut entre le vampire et la porte, l'empêchant d'entrer. Les flammes se dissipèrent aussi vite qu'elles étaient apparues, et elles ne touchèrent pas Azphel. Ce n'était pas le but.
Le videur s'était reculé contre le mur, inquiet, se demandant ce qui était en train de se passer.

Raphaël, après avoir jeté un regard méprisant aux trois punks qui accompagnaient son infant, se tourna doucement vers lui, sans avancer toutefois. Son visage restait dur et inexpressif, et il s'exprima sur un ton sec.

Je n'ai rien à te dire.
Va-t-en.

S'en était bien trop peu aux yeux d'Azphel pour lui faire peur. Il avait connu les rages destructrices de l'ancien vampire, quelques flammes n'étaient rien. Cela inquiéta un peu ses accompagnateurs, mais pas lui. Il ne fit que se tourner vers Raphaël, toujours se sourire moqueur aux lèvres.

"Je vais boire un coup. J'ai pas souvenir d'avoir enfreint les règles de ton bouge, tu ne peux pas m'interdire d'entrer. Si tu veux pas m'voir, t'as qu'à rester dans ton bureau, m'sieur l'directeur."

Le mot directeur était, dans sa bouche, bien plus qu'une provocation, mais une insulte assumée. Il était évident que ce simple rôle engendrait un profond dégoût chez lui. Bien entendu, il tâchait encore et toujours de le pousser à la faute, de voir ressortir la Bête. Quoi d'autre pourrait l'empêcher de rentrer, si ce n'était la force ?

Sujet: Re: De retour au Midnight Mar 4 Jan 2011 - 18:13

Raphaël voyait bien, de par les provocations d'Azphel, qu'il voulait le pousser à s'énerver et à user de violence contre lui. Aussi était-il bien décidé à n'en rien faire. Il ne voulait absolument pas se battre contre lui, tout du moins pas ici, pas maintenant, pas avant de savoir pourquoi il venait lui rendre visite.
Ce qui était clairement sensé être une insulte n'en fût pas une pour lui : il était fier de son établissement. Et il était hors de question qu'il y laisse entrer un individu comme Azphel.

En tant que directeur de cet établissement, il est de mon droit d'en interdire l'entrée à tout individu que j'estime suspect ou dangereux.
Si tu as quelque chose à me dire, quelque chose d'important, nous pouvons converser dehors.

Sujet: Re: De retour au Midnight Mer 5 Jan 2011 - 15:14

"Je viens boire un coup, j'ai dit. Ça va faire un mois que je viens ici tous les soirs, si j'avais voulu mettre le bazar, mon cher, ce serait fait depuis longtemps, et tu le sais très bien. Ce n'est pas parce que je n'approuve pas le masque que tu te poses que je ne sais pas respecter certaines règles. T'as beau être propriétaire, tu n'as rien contre moi pour me chasser."

Le vampire jouait avec les armes de son ancien maître, ces armes qu'il avait aujourd'hui, mais qui à ses yeux n'avaient pas la moindre valeur. Il entra malgré l'interdiction, en précisant un petit "c'est pas las végas, ici" et un sourire jusqu'aux oreilles. Il ne mentait pas. Pas alors que ça n'avait pas d'utilité. Il n'avait jamais posé de problèmes, du moins, pas dans la ville, ou pas en personne, pour s'assurer "l'immunité" légale pendant un moment. Il voulait le pousser dans ses derniers retranchements.

Sujet: Re: De retour au Midnight Ven 7 Jan 2011 - 18:39

Azphel rétorqua qu'il venait depuis un mois, chaque soir, et qu'il se tenait à carreau. Cela étonna Raphaël, qui connaissait le loustic, et songea que s'il n'avait encore rien fait, c'est qu'il préparait quelque chose. Aussi, lorsqu'Azphel annonça qu'il n'avait rien contre lui pour le chasser, il répondit :

Pas pour le moment.

Il le laissa entrer, ne voulant pas interdire son accès au bar s'il était devenu un client fidèle, mais il entra à sa suite et ne le lâcha pas des yeux. Si le petit groupe s'installait à une table, Raphaël ne les suivrait pas, mais se mettrait au niveau du comptoir, pour les observer.

Sujet: Re: De retour au Midnight Lun 10 Jan 2011 - 13:49

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