Why not ...? [ Nel ! ]

* Conneries ! ... *

Cela ne l'empêcha pas de sourire d'un air désabusé, en secouant nonchalamment de la tête. Voilà qu'il commençait sérieusement à s'habituer à l'air de Paris, les mois passants. Or, s'habituer c'était mourir, dans sa profession. A la fois agacé de se laisser endormir par cette ville de malheur, il ne pouvait non plus s'empêcher de souffler et de laisser de temps à autre quelque vent de bien-être faire le ménage dans sa tête et chasser les idées noires et indésirables.
Assis sur la terrasse d'un des nombreux cafés qui pullulaient sur l'Avenue des Champs-Elysées, il sirotait un soda simple ... sans alcool. Cependant, une chose était restée immuable : Ian avait veillé à choisir une table pour deux à l'extérieur, afin de pouvoir fumer ses cigarettes sans contraintes. Cela ne l'avait point dérangé : le temps était au beau fixe, et demeurer en plein air était un plaisir plus qu'un devoir envers ses autres concitoyens. Enfin ... ne poussons pas trop loin la tolérance non plus. C'étaient surtout des maudits parigots avant d'être ses concitoyens ...
Tirant une délicieuse bouffée de tabac avant de la relâcher sous formes de volutes de fumées, il observa les arabesques paresseuses qu'elles arboraient devant ses yeux... et ses pensées se tournèrent vers Alessa.

Alessa... cette hybride mi-humaine, mi-chat qu'il avait croisé au détour du Cimetière du Père-Lachaise. A croire que cet endroit avait quelque chose, était une sorte d'épicentre destiné à lui faire croiser la route des personnes qui joueraient un rôle détermlnant dans son futur. Le marin avait ses manies superstitieuses, mais d'ordinaire, il évitait de prêter attention à ces vies prédestinées et à ces destins joués. Décider de son avenir était tellement plus beau et gratifiant ... plus dangereux, également. Peut-être était-ce elle qui, finalement, l'avait fait changer de point de vue sur son environnement, sur ce qui lui arrivait ... Les images de leurs étreintes faisaient tambouriner son coeur et vaciller son esprit, mais il se força à se reprendre et éteignit un peu plus nerveusement qu'il ne l'était nécessaire, son mégot dans un cendrier prévu à cet effet. Devait-il oublier celle qui avait pris la place de sa femme l'espace de quelques heures ?

Il n'avait pas envie d'y penser maintenant ... même si il savait très bien qu'il ne pourrait guère s'empêcher d'en parler à Nelïya. Car c'était bien pour la jeune vampire qu'il attendait là, un peu en avance par rapport au rendez-vous qu'il lui avait fixé. Fidèle aux circonstances qui avaient joué tout du long de leur histoire depuis la première fois qu'ils s'étaient vus, il avait glissé sous sa porte un petit mot, bref, afin de lui proposer une entrevue là-même d'où il pouvait voir voiture et promeneurs défiler. Bien sûr, il allait sans dire que c'était lui qui payerait, en dédomagement de la dernière fois où c'était elle qui l'avait invité. Il savait qu'elle viendrait ... Et puis, de toute façon, elle devait venir. Leur dernière conversation, il la regrettait à présent. Avec le recul, il comprit la louable intention de son ancienne ennemie et avait pris le temps de réfléchir. Ce n'était pas si stupide que ça, tout bien considéré...

Un sourire éclaira le faciès de l'homme lorsqu'il aperçut la démarche familiaire de sa nouvelle alliée.

" Surprise ? "

Avec aménité, il l'observa brièvement, de la tête aux pieds.

" Alors ... on n'a pas changé de couleur de cheveux cette fois ?

Ce ne fut par un sursaut que Nelïya se réveilla. Elle ouvrit les yeux doucement, et seul son dos trempé de sueur trahissait son sommeil cauchemardesque. Pendant un instant, ses yeux clignèrent à plusieurs reprises essayant de vérifier qu’elle avait bien remit le pied dans la réalité. Mais l’image restait parfaitement stable, et cohérente. Son corps se relâcha, et elle se permit un soupir de soulagement. Elle détestait faire des rêves réalistes. Elle détestait rêver tout court d’ailleurs, mais quitte à choisir, elle préférait encore rêver se transformer en schtroumpf , et devoir fuir un agent du MIB, plutôt que de rêver de James.Mais voilà cette nuit, s'était bien de lui dont elle avait rêvé, et pas des Schtroumpf ...

La vampire, dormait souvent peu pour éviter tous songes susceptibles de raviver des souvenirs auxquels elle ne voulait plus penser. Mais hier, une migraine l’avait littéralement assommé. Ne pouvant même plus faire un pas sans avoir l’impression que sa tête allait exploser, elle avait finit par se coucher, pour s’endormir aussitôt. Son regard encore vitreux chercha l’affichage digital du réveil qui annonçait 5h30. Elle grimaça… En temps normal elle ne s’accordait que 4 heures de sommeil, là, elle en avait dormit 10.

Le point positif était qu’elle n’avait plus mal à la tête.

Elle s’extirpa de son lit, impatiente de se remettre en activité dans la réalité, plutôt que de repenser à James. Elle savait pourtant que cela ne serait pas si simple. Le rêve avait était tellement réaliste qu’elle avait l’atroce impression que c’était du vécut. C’était comme lorsque l’on rêvait de la mort d’un proche, et que même une fois réveillé on ne pouvait s’empêcher d’être choquer pour toute la journée. C’était la même chose. Ses yeux, sa voix, son visage, son parfum, tout ça allait la hanter sans qu’elle ne puise rien y faire, et elle ne pourrait pas s’empêcher de se retourner pour vérifier qu’il n’était pas dans son dos, ou de tressauter à la vue d’une coupe de cheveux un peu trop ressemblante à celle dont elle avait gardé le souvenir.

*Pfff tout ça parce que j’ai cru l’apercevoir dans ce foutu marché …Je vais finir digne… Si ce n’est pas déjà le cas =.= ‘*

Une fois devant le miroir de la salle de bain, elle constata qu’elle avait déjà eut meilleure mine. Son manque de sommeil, qui était surement la cause de sa migraine de la vieille, avait aussi marqué son visage de cernes sombres. Premièrement, elle avait pensé qu’une touche d’anti cerne réglerait ce détail, mais finalement, après réflexion, elle trouva que cet air fatigué la vieillissait, ce qui n’était pas plus mal, au moins cette fois elle pourrait caresser l’espoir qu’on ne lui demande pas sa carte d’identité pour un film interdis au moins de 16 ans…
Douchée, habillée, coiffé, elle s’en alla distribuer les prospectus. C’était son job depuis peu. Pas très bien payé, certes, mais elle n’avait pas trouvé mieux qui lui permette d’avoir assez de temps libre pour ces petites virées en ville et ses entrainements. Et au moins elle pouvait travailler son endurance et sa capacité de vitesse accrue, même si le soleil, levé avant elle, ne la mettait pas dans les meilleures conditions. La nuit lui avait toujours donné plus de force.
En rentrant plusieurs heures plus tard, après une matinée faite de distribution, et potassage à la bibliothèque, elle ne vit pas tout de suite le message glissé sous la porte par le marin. Ce n’est qu’au moment où elle posa le pied dessus, glissant par la même occasion, et manquant de peu de s’exploser la margoulette par terre, qu’elle remarqua le bout de papier.

*Fuck ! C’est quoi ce machin ?!*

Elle attrapa le terroriste qui avait manqué de peu de lui offrir un séjour à l’hosto, et le déplia pour tomber sur un message dont l’écriture lui été totalement inconnue. Elle pouvait cependant dire que ce n’était pas une écriture de femme car les lettres manquaient de rondeurs. Grandissant dans sa poitrine, un doute, une appréhension incontrôlable, la prit, devant ce message qui portait les traces d’un plume masculine. C’était stupide, elle n’avait pourtant pas reconnue l’ecriture de son ancien meilleur ami, mais elle ne fut soulagée qu’au moment ou elle vit la signature « Ian ».
Rassurée, elle laissa un sourire se dessiner sur son visage. Il lui donnait rendez vous à 14h. Elle avait donc 15 min pour aller prendre une douche afin d’effacer les traces de sa course matinale qui lui collaient à la peau depuis plusieurs heures. Après s’être décrasser elle enfila un débardeur noir qui avait perdu un peu sa couleur et un peu sa forme, et un jean si bien troué par endroit que l’on n’aurait sut dire s’ils étaient le résultat d’une usure, ou bien celui de l’expression d’un styliste, et quitta l’hôtel.

Après le feu rouge, le cauchemar serait finit. Elle regrettait de ne pas avoir eut la présence d’esprit de prendre le métro. Ces parisiens étaient des vrais malades au volant ! Elle ne fut jamais aussi soulager de descendre de mobylette ! S’assurant que l’antivol était bien mit, et le casque sous le bras, elle remonta le trottoir pour apercevoir l’enceinte du bar où elle avait rendez vous. A la terrasse, elle remarqua Ian..

"Surprise ?"

-Pourquoi le serais-je ? demanda-t-elle, en poussant de la jambe, la chaise, pour s’y installer. Elle posa son casque à ses pieds, et releva les yeux vers Ian, qui, elle venait de le remarquer, fumait une cigarette. Pourquoi tout le monde autour d’elle fumait !

" Alors ... on n'a pas changé de couleur de cheveux cette fois ?

La réflexion l'a fit sourire. C’est vrai qu’elle n’avait pas changé depuis la dernière fois qu’ils s’étaient vus. S’était-il attendu à la voir débarquer avec les cheveux roses ?
-Non … Pourquoi ? Ca te dérange qu’une fille plus jeune de 3 ans ait déjà plus de cheveux blanc que toi ?
Renchérit-elle, avec malice.

Prenant son temps, Ian parcourut du regard Neliya, l'observant de la tête en bas. Son sourire ne disparut pas lorsqu'il se décrivit la tenue de son 'amie'. Plus décontracté ... Au vu du casque sous son bras, la surprise sur lut sur le visage du marin : motarde ? Ou bien roulait-elle sur quelque chose de plus petit, comme une mobylette ? L'image lui apparaissait comme curieusement loufoque. Une vampire sur un deux roues ... remarque. Comme elle lui avait souligné avec constance, elle n'était pas si différente du commun des mortels en apparence. Mais combien d'autres de leurs concitoyens jouaient-ils ainsi sur leur apparence normale et trompaient ainsi la majorité des parisiens quand ils le désiraient ?

-Pourquoi le serais-je ?

Il secoua la tête, amusé en la regardant s'asseoir. Elle ne paraissait pas le moins du monde étonnée, effectivement. Soit elle était sincère et bénéficiait d'un sang-froid et d'une capacité d'adaptation hors du commun, soit elle avait eu le temps de se faire à l'idée en venant le rejoindre, soit ... elle était une excellente comédienne. Aucune de ces trois réponses ne l'auraient lui-même surpris.
Tout du moins, les deux congénéres se retrouvaient sans trop de peine, comme si ils s'étaient quittés la veille. Et pourtant, un an d'événements s'étaient déroulés aux yeux du marin. Tout un univers avait été bouleversé.

-Non … Pourquoi ? Ca te dérange qu’une fille plus jeune de 3 ans ait déjà plus de cheveux blanc que toi ?

A ces mots, il éclata d'un rire franc et léger et secoua la tête, répondant d'un ton plein de malice :

" Je t'en fais volontiers cadeau ! Je ne suis pas encore volontaire pour ce qui est de grisonner, merci bien ! "

Levant son bras, il fit signe à un des serveurs, afin que la jeune fille puisse commander à son tour.

" Bon ben ... prends ce que tu veux hein ! J'te le paye. "

Une fois qu'elle eut prit sa commande, il alluma une seconde cigarette, qu'il fuma avec tout autant de volupté que la première. Il demeurait volontairement silencieux, suivant à la lettre ses vieilles habitudes : il détestait débuter une conversation avant que son interlocuteur et lui même eurent été servis. S'interrompre au beau milieu l'horripilait affreusement. Patient, il ne le dérangeait en rien au contraire d'attendre, tout en jetant de fréquents coups d'oeil à Nelïya, agrémentés de temps en temps de sourires dans le but de la rassurer sur ce vide. Pas de coups fourrés et aucun mouvement d'humeur. Simplement une manie.
Le verre arriva enfin, et le garçon parti, il rejeta une bouffée de fumée dans un soupir :

" Quelle chaleur ... il y avait longtemps que je n'en avais pas connu d'aussi pesantes... "

Ian se tourna vers elle et prit une gorgée afin de se rafraîchir le gosier. Il était temps de passer aux choses sérieuses ...

" Bon... je suppose que tu te demandes pourquoi je t'ai demandé de venir ici, hein ? "

Songeant à la manière de tourner cela, il finit par poursuivre :

" J'ai réfléchi. Pas mal réfléchi, même. Et puis, le temps aidant, certains événements également m'ont aidé à voir sous un nouveau jour et ... poussé à reconsidérer ton offre. "

Il faisait bien évidemment référence à l'entretien qui avait terminé houleusement entre eux, au bar de l'hôtel. Il aurait aimé que les choses se passent autrement, mais ce soir-là, il s'était senti passablement déprimé. Et ses réactions en avaient été témoin à la perfection.

" Tu vois ce que je veux dire ...? "

Un sourire qui aurait pu passer pour carnassier fleurit au coin de ses lèvres ... avant de disparaître tout aussitôt, avec la fugacité d'un clin d'oeil complice.

Il faisait encore chaud aujourd’hui, et Nelïya d’injuria d’avoir mit un haut noir.

*Ma pauv’ fille y’a des jours où t’es pas futée !*

En plus elle n’avait même pas mit de crème… Avec sa peau blafarde de « rosbif », née sous la pluie et les nuages, elle allait se retrouver couverte de coups de soleils… N’allez pas vous imaginer que sa condition de vampire la faisait détester le soleil. Ces histoires de vampires qui finissent en tas de cendre sous les rayons U.V c’était de la publicité mensongère, une fiction, une intox, appelez ça comme vous voudrez.
Elle, elle adorait le soleil, même si elle finissait trop souvent rouge écrevisse à son contact, elle était encore loin de pouvoir finir dans un cendrier !

En face, Ian semblait de meilleure humeur qu’à leur dernière rencontre. Le soleil peut être … En tout cas, quoi qu’en soit la cause, cela ne pouvait que ravir la jeune femme qui se promit intérieurement de ne pas le mettre en rogne cette fois.

Il ria sincèrement à sa remarque, et cela rendit la vampire encore plus à l’aise qu’elle l’avait été jusque là. C’est vrai qu’elle ne s’était pas posé beaucoup de question à propos de cette invitation... Elle se rendit compte qu’elle s’y était rendue avec naïveté … Juste avec le contentement qu’elle ne soit pas de James, et la satisfaction de revoir le marin renouer le contact. Et dire que lorsqu’elle était revenue, elle lui avait fait toute une scène de grande méfiance avec la fouille en règle et tout le tralala, et qu’là elle était venue avec autant de légèreté que si elle allait retrouver un ami d’enfance. Mais s’était quoi ce relâchement ?! Il faudrait se reprendre de toute urgence, il ne s’agissait pas de se ramollir !

" Je t'en fais volontiers cadeau ! Je ne suis pas encore volontaire pour ce qui est de grisonner, merci bien ! "

Un ton malicieux, et la fin d’un rire léger avait pimenté ces propos, réduisant à néant la résolution de méfiance qu’elle venait de se formuler. Comment résister, à cette étrange complicité qui s’était établie clandestinement entre eux ? Comment rejeter la douceur de ces prunelles azurées, et la chaleur de ce sourire taquin ? Impossible… Et puis elle était fatiguée d’être sans cesse suspicieuse, fatiguée d’être farouche en présence d’autrui, fatiguée de cette fidèle solitude qui l’accompagnait si souvent. Elle pouvait bien faire une exception… Baisser les armes… Pour une fois…

A son tour elle ria de sa réflexion… Elle ria, imaginant Ian grimaçant devant son miroir découvrant que sa chevelure avait perdu la teinte doré de son « jeune temps ». Un rire discret, aux accents chatoyants, un rire bref, qui s’évanouit à l’arrivée du serveur interpellé par Ian.

" Bon ben ... prends ce que tu veux hein ! J'te le paye. "[ /center]

Peu familiarisé à être invitée, elle s’en trouva un tantinet gênée, et lorsque le garçon vint prendre sa commande, sa voix annonça qu’elle désirait un jus de kiwi d’un timbre plutôt réservé qui tranchait avec l’assurance qu’elle avait montré jusqu’alors.

Ian de son côté s’était allumé une nouvelle cigarette apparemment très détendu. Il ne fallut pas patienter longtemps pour que le verre arrive

-Merci. Dit –elle à l’adresse du fumeur, lorsque le serveur se fut éloigné.
Puis la conversation s’accéléra. Promptement on passa au vif du sujet, après une petite introduction au combien classique sur le thème de la météo du jour.

[center]" Bon... je suppose que tu te demandes pourquoi je t'ai demandé de venir ici, hein ? "

[i]Il semblait chercher comment aborder la chose, ce qui ne faisait que renforcer la petite idée, qui avait germé dans la tête de Nelïya quand au véritable but de cette rencontre. Mais elle ne dit rien. Se contenta de fermer les paupières un instant, pour ensuite encourager Ian à poursuivre, d’un sourire complice. Il resta songeur un bref instant puis poursuivit :

"J'ai réfléchi. Pas mal réfléchi, même. Et puis, le temps aidant, certains événements également m'ont aidé à voir sous un nouveau jour et ... poussé à reconsidérer ton offre. Tu vois ce que je veux dire ...? "

D’un geste mesuré, les coudes de Nelïya s’appuyèrent sur les accoudoirs plastifiés de sa chaise, et elle se redressa. Passager, un sentiment entre la nervosité et l’excitation fit palpiter son cœur.
La dernière fois, elle se souvenait encore trop bien de la façon dont la conversation avait finit, et elle s’était juré de ne pas le fâcher une fois de plus... Mais d’un autre côté, il venait d’avoir ce drôle sourire… Et puis il avait bien dit avoir « reconsidéré son offre » ! Jouant la carte de la mesure, Nelïya laissa passer un ange avant de répondre ;

-Je crois oui … Mais quelques précisions éviteront tout mal entendu …

Ses coudes avaient quitté les accoudoirs qui les avaient supportés une minute plutôt. Ses mains s’avancèrent pour entourer délicatement son verre, dont la fraicheur la fit presque frissonner, mais qui lui faisait un bien fou par cette torride chaleur.
Intéressée ses prunelles n’avaient pas quitté celle d’homme qui lui faisait face.